De la grammatologie



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LINGUISTIQUE ET GRAMMATOLOGIE

dans la mesure où on la distingue encore originairement de

la face signifiante, n'est pas considérée comme une trace : en

droit, elle n'a pas besoin du signifiant pour être ce qu'elle est.

C'est à la profondeur de cette affirmation qu'il faut poser le

problème des rapports entre la linguistique et la sémantique.

Cette référence au sens d'un signifié pensable et possible hors

de tout signifiant reste dans la dépendance de l'onto-théo-téléo-

logie que nous venons d'évoquer. C'est donc l'idée de signe

qu'il faudrait déconstruire par une méditation sur l'écriture

qui se confondrait, comme elle doit le faire, avec une sollici-

tation de l'onto-théologie, la répétant fidèlement dans sa tota-

lité et l'ébranlant dans ses évidences les plus assurées

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. On

y est conduit en toute nécessité dès lors que la trace affecte

38. Si nous avons choisi de démontrer la nécessité de cette

« déconstruction » en privilégiant les références saussuriennes, ce

n'est pas seulement parce que Saussure domine encore la linguis-

tique et la sémiologie contemporaines ; c'est parce qu'il nous paraît

aussi se tenir aux limites : à la fois dans la métaphysique qu'il

faut déconstruire et au-delà du concept de signe ( signifiant/signifié)

dont il se sert encore. Mais avec quels scrupules, quelles hésitations

interminables, notamment quand il s'agit de la différence entre les

deux « faces » du signe et de 1' « arbitraire », on s'en rend mieux

compte à lire R. Godel, Les sources manuscrites du cours de lin-



guistique générale, 1957, p. 190 sq. Notons-le au passage : il n'est

pas exclu que la littéralité du Cours, à laquelle nous avons bien dû

nous référer, paraisse un jour fort suspecte, à la lumière des iné-

dits dont on prépare actuellement la publication. Nous pensons en

particulier aux Anagrammes. Jusqu'à quel point Saussure est-il res-

ponsable du Cours tel qu'il a été rédigé et donné à lire après sa

mort ? La question n'est pas neuve. Faut-il préciser que, ici du

moins, nous ne pouvons lui accorder aucune pertinence ? Sauf à

se méprendre profondément sur la nature de notre projet, on aura

perçu que, nous souciant fort peu de la pensée même de Ferdinand

de Saussure lui-même, nous nous sommes intéressé à un texte dont la

littéralité a joué le rôle que l'on sait depuis 1915, fonctionnant dans

un système de lectures, d'influences, de méconnaissances, d'em-

prunts, de réfutations, etc. Ce que l'on a pu y lire — et aussi bien

ce que l'on n'a pu y lire — sous le titre de Cours de linguistique



générale nous importait à l'exclusion de toute intention cachée et

« véritable » de Ferdinand de Saussure. Si l'on découvrait que ce

texte en a occulté un autre — et l'on n'aura jamais affaire qu'à des

textes —, et l'a occulté dans un sens déterminé, la lecture que nous

venons de proposer n'en serait pas, du moins par cette seule raison,

infirmée. Bien au contraire. Cette situation a d'ailleurs été prévue

par les éditeurs du Cours, tout à la fin de leur première Préface.

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DE LA GRAMMATOLOGIE

la totalité du signe sous ses deux faces. Que le signifié soit

originairement et essentiellement (et non seulement pour un

esprit fini et créé) trace, qu'il soit toujours déjà en position de



signifiant, telle est la proposition en apparence innocente où la

métaphysique du logos, de la présence et de la conscience, doit

réfléchir l'écriture comme sa mort et sa ressource.

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chapitre 3

de la grammatologie comme science

positive

A quelles conditions une grammatologie est-elle possible ? La

condition fondamentale en est certes la sollicitation du logo-

centrisme. Mais cette condition de possibilité vire en condition

d'impossibilité. Elle risque en effet d'ébranler aussi le concept

de la science. La graphématique ou la grammatographie

devraient cesser de se présenter comme des sciences ; leur

visée devrait être exorbitante au regard d'un savoir grammato-



logique.

Sans nous aventurer ici jusqu'à cette nécessité périlleuse, et

à l'intérieur des normes traditionnelles de la scientificité vers les-

quelles nous nous replions provisoirement, répétons la question :

à quelles conditions la grammatologie est-elle possible ?

A la condition de savoir ce que c'est que l'écriture et com-

ment se règle la plurivocité de ce concept. Où l'écriture com-

mence-t-elle ? Quand l'écriture commence-t-elle ? Où et quand

la trace, écriture en général, racine commune de la parole et

de l'écriture, se rétrécit-elle en « écriture » au sens courant ?

Où et quand passe-t-on d'une écriture à l'autre, de l'écriture

en général à l'écriture au sens étroit, de la trace à la graphie,

puis d'un système graphique à un autre, et, dans le champ

d'un code graphique, d'un discours graphique à un autre, etc. ?



Où et quand commence... ? Question d'origine. Or qu'il n'y

ait pas d'origine, c'est-à-dire d'origine simple ; que les ques-

tions d'origine transportent avec elle une métaphysique de la

présence, c'est bien ce qu'une méditation de la trace devrait

sans doute nous apprendre. Sans nous aventurer ici jusqu'à

cette nécessité périlleuse, en continuant à poser des questions

d'origine, nous devons reconnaître à celles-ci deux hauteurs.

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