La nuance contre l’arrogance



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abstinence leur a valu des accusations d'aristocratisme, d'anti-démocratisme ou d'irrationalisme, mais elle se justifie pleinement par leur analyse de la média-sphère majoritaire (« petite-bourgeoise »). Répliquer, c'est se condamner à rédupliquer les termes de la question qui vous est posée, de l'objection qui vous est faite. Prendre parti (ne serait-ce que pour soi-même), c'est accepter de se congeler dans le frigidaire de ce qu'on a publié (avant-) hier - alors qu'il vaut bien mieux cultiver sa vacuole et la poursuite de son individuation, puisque de toutes façons, dans nos types de sociétés hyper-communicantes, on est toujours assez connecté.

Deux figures convoquées par Barthes peuvent servir d'emblèmes à ce refus d'entrer dans le jeu des objections. Le personnage de Swedenborg pousse cette logique d'abstinence jusqu'à sa limite extrême dans le domaine existentiel : « écrivant sans cesse lui-même », il « ne lisait pas ce qu'on écrivait contre lui », au point de ne pas même répondre aux lettres qu'on lui envoyait (TV, 148). Le scientifique devenu mystique se mettait ainsi dans la meilleure position possible pour se livrer à un travail de création: non seulement il échappait à la logique réactive de quiconque se croit obligé de répondre aux questions qu'on lui pose, mais il se constituait une vacuole protectrice libérée des affres de la « gestion » épistolière qui paraît tellement tourmenter Barthes.

L’argument d'Antisthène fournit à une telle position d'abstinence sa justification rationnelle, intimement liée à la théorie de l'individuation : dès lors que « seul existe l'individu », dans son devenir permanent fait de moments toujours divers et de multiples nuances toujours passagères, toute nomination - dans la mesure où elle enferme le mouvement de cette individuation dans une catégorie à la fois générale et figée - ne peut que rater la réalité qu'elle cherche à désigner. On ne se bat dès lors que sur des mots, et « deux discours contradictoires ne se contredisent pas ; ils ne font que s'appliquer à des objets différents ». La pensée se situe ainsi non seulement au-delà du Bien et du Mal, mais au-delà même du principe de non-contradiction. Si l'on pouvait suivre Antisthène dans sa radicalité, « la contradiction ne serait plus une arme qui défait l'adversaire » - ce qui nous permettrait d'entrer dans « le règne de l'irréductible », de « l'individuation absolue » et de la nuance sans fin (TV, 91-92).

Ce règne pacifié n'est malheureusement pas de ce monde. Aussi bien Gilles Deleuze que Roland Barthes répondaient scrupuleusement à leur courrier, et aucun d'eux ne pouvait neutraliser les conflits faisant rage autour d'eux.
DELEUZIANISER SOLLERS

Dans la séance du 29 avril 1978, Roland Barthes introduit dans son cours consacré à la figure de la Réponse la lecture d'un très long extrait décrivant André Gide pris comme un rat dans un piège médiatique : pour complaire à un ami, et sans prêter trop d'attention à son contenu précis, il a signé avec Sartre une pétition qu'un autre ami lui demande maintenant de désavouer avant que Mauriac ne l'attaque dans les colonnes du Figaro ; une fois l'article paru, le premier ami lui demande de répondre à l'attaque de Mauriac, sans que Gide ne comprenne toujours très bien sur quoi porte exactement la controverse (N, 149-150)...

Moins d'un an après la crise des « nouveaux philosophes », on imagine bien les résonances d'une telle situation : votre ami Sollers a pris parti pour un camp, vous y allez de votre petite lettre privée, en soulignant son caractère privé et en vous gardant bien de vous engager sur le fond, puisque vous n'y abordez qu'une « question de forme »; malheureusement, votre ami Deleuze pique la mouche et vous convoque à son « amical tribunal »... Comment se sortir du piège24 ? Le masque de Gide vous permet à la fois déjuger les deux parties sans prendre parti entre elles (« ils sont assommants ! ») et de mettre en scène de façon réflexive votre propre attitude de fuite (« Je suis en voyage », N, 150).

Cherchant à définir la dimension active du Neutre, Barthes est pourtant revenu sur la petite crise du printemps 1977. Tout en répétant être « trop pyrrhonien pour connaître [s] on propos d'adhésion ou de refus », il relate toutefois son malaise devant la « sensation de meute, de curée, de hallali des intellectuels contre les Nouveaux philosophes » et devant les « protestations obsédées pour s'en distinguer, ne pas être contaminé ». Il précise que, selon lui, une conception active du Neutre « ne craindrait pas les contaminations » (TV, 118). Ici aussi, ici surtout, l'empreinte (négative) de Deleuze reste clairement visible dans la réaction de Barthes, puisque sa plaquette se concluait sur un appel à rédiger une « charte des intellectuels » inspirée de Beckett ou de Godard (érigés en exemples de bons rapports aux médias) - alors que « les nouveaux philosophes, c'est vraiment l'infection qui s'efforce d'empêcher tout cela » (NP9 134).

Entre Sollers et Deleuze, qui prennent chacun parti pour un camp opposé, Roland Barthes va déjouer le paradigme binaire {pour ou contre les « nouveaux philosophes » ?) et se sortir du piège à rat en inventant un troisième terme: deleuzianiser Sollers... Sous la figure de l'Oscillation, Sollers est présenté comme l'incarnation médiatique de l'individuation résistant à toute congélation individuée, comme une puissance de variation et de répétition infiniment différenciante. « Sollers empêche l'image de prendre » :

Le « scandale » sollersien : il s'attaque à l'image, semble vouloir empêcher à l'avance la formation, la stabilisation de toute image : même celle de celui qui essaie des directions différentes, explore des contradictions, avant de trouver sa voie définitive (mythe du cheminement noble). Même cette image semble peu possible, tant le brouillage des conduites est grinçant ou comme on m'a dit souvent (mot typiquement collectif): « indéfendable ». (TV, 173-174)

Une telle description de l'ami Sollers fait dune pierre trois coups. D'une part, elle mine l'alternative d'un choix à faire entre deux amis et deux projets intellectuels dont l'argument d'Antisthène nous a montré qu'ils ne sont qu'illusoirement contradictoires et incompatibles. On s'extrait du piège en prenant une hauteur éthique, tant il est vrai que l'éthique est un discours « du « non-choix », ou du « choix-à-côté » : de l’ailleurs du choix, l’ailleurs du conflit du paradigme » (N, 33). Pour échapper aux grosses notions dualistes, on sollicite une fonction créatrice: « choisir est plus facile qu'inventer » (PR, 46), mais c'est dans l'invention d'un troisième terme insoupçonné que résulte la vertu active du Neutre.

D'autre part, dans la mesure où une réflexion sur le Neutre est pour Barthes « une façon de chercher - d'une façon libre - [s] on propre style de présence aux luttes de [s]on temps » (N, 33), deleuzianiser Sollers permet de situer l oscillation au cœur de ce style de présence aux luttes de son temps. Même s'il s'engage bien moins activement que Deleuze dans les combats du moment, et même s'il ne partage pas « l'éréthisme d'engagement de l'écrivain actuel » (PR, 366), Barthes n'en vit pas pour autant isolé au sein de sa petite vacuole d'ivoire. Toute la préparation du roman est dépeinte sous la pression du « chantage permanent de l'Actualité à quiconque l'oublie ». Le monde nous « saute constamment au visage » :

Bavures policières, motards matraqués, déchets nucléaires, affrontements à Cherbourg, lettre noble de Guattari au Président de la République refusant une invitation à la Journée de l'Enfance et rappelant tous les thèmes gauchistes (travailleurs immigrés tabassés dans des commissariats, extradition Piperno, assassinat de Goldman, etc.) - tout cela pendant que je sophistiquais longuement pour savoir comment s'enfermer en vue d'une Œuvre littéraire! (PR, 352)

Entre le discours journalistique (subi comme lecteur ou pratiqué comme éditorialiste au Nouvel Observateur) et le travail d'écriture d'une Œuvre, entre l'actualité passagère des nouvelles et la force inactuelle des textes littéraires, c'est bien un régime d'« oscillations » qui se met en place pour orienter l'écriture contre « ce qui ne va pas dans le monde », pour concevoir « l'œuvre comme contre-Bêtise » (PR, 269). À une telle oscillation, nul ne saurait échapper, à moins de couper le lien essentiel qui relie, pour Barthes comme pour Deleuze, « la littérature et la vie ».

Et pourtant - troisième coup de force tiré de la deleuzianisation de Sollers - cette oscillation doit elle-même se concevoir comme une stratégie de fuite. Contre tous les discours se lamentant sur la démobilisation et la dépolitisation de nos contemporains, l'intuition commune à Barthes et à Deleuze est que ce n'est pas du côté des formes « traditionnelles » d'engagement (dans un parti, dans un débat médiatique, dans une joute électorale, dans un projet totalisant) qu'il faut aller chercher les formes les plus actuelles de la vie politique. Le potentiel propre à ces formes traditionnelles d'engagement est dramatiquement réduit par le fait qu'elles tendent généralement à accepter les cadres de pensée et d'action définis par des paradigmes pré-existants. Refuser ces engagements, fuir loin de ces cadres, cela ne revient pas forcément à se soustraire au travail politique, mais cela peut au contraire apparaître comme une condition préalable à sa relance.

AGIR PAR LA FUITE

En déjouant le paradigme des intellectuels médiatiques par la projection d'une image « indéfendable », les perpétuelles oscillations de l'ami Sollers risquent d'aider à faire fuir la machine trop bien huilée de l'Universel Reportage, qui se nourrit des attaques et des défenses quotidiennes que se livrent les preux chevaliers des partis qui ont la (dé) faveur du moment. Même si, dans le cas de Sollers, cette fuite semble avoir été rapidement récupérée - au titre de ce que Deleuze décrivait comme « l'insolence des domestiques ou les éclats d'un clown de service » (NP, 134) —, c'est bien dans ce qui fuit et dans ce qui fait fuir que Barthes et Deleuze nous invitent à inventer de nouvelles formes d'actions politiques25. En paraissant « fuir ses responsabilités, fuir le conflit », le sujet au Neutre adopte un comportement marqué d'un stigmate « très infamant ». La doxa, qui « vit à l'aise dans le paradigme » - et qui identifie « la seule façon de répondre » au fait de « correspondre à un terme » - « n'imagine pas qu'il y a une autre réponse : glisser, dériver, fuir ». En constituant un « troisième terme impensable pour la doxa », la fuite constitue le geste privilégié du sujet au Neutre (N, 103).

Sur quoi peuvent déboucher de tels gestes — et de telles lignes - de fuite? Et en quoi peut-on les ériger au statut d'une action politique ? Je conclurai cette lecture parallèle de Deleuze et de Barthes en rapprochant deux notions centrales dans les vocabulaires que chacun d'eux nous propose — les notions de « problème » et d'« aporie ».

Deleuze a constamment conçu son travail de philosophe (et revisité l'histoire de la philosophie) à partir du principe que la création de concepts s'inscrit toujours au sein de l'articulation de « problèmes ». Si l'on souhaite, comme le dit Barthes, « échapper à la mauvaise foi de l'universelle communication et à la libido dominandi qui gît, tapie comme un Monstre, dans l'Universel Reportage » (PR, 374), il ne suffit pas de donner des réponses vraies, mais il faut surtout se poser des problèmes importants — et c'est sur ce plan que les déficits de pensée se font ressentir le plus cruellement. Or les problèmes ne sont jamais résolus : ils ne font que se transformer, souvent au fil de nuances imperceptibles. À l'horizon d'un problème réellement important, il n'y a donc pas son abolition mais son devenir, la poursuite de son individuation. Le travail philosophique apparaît ainsi comme sans fin, dans la mesure où c'est « la vie » elle-même qui est la source première et constamment renouvelée de tous les problèmes26: la vie, dans le vitalisme deleuzien, est problème (effort de position et de résolution de problèmes, transformation et évolution permanente de problèmes).

Cette conception du « problème » comme moment constitutif de soi toujours articulé sur une relance orientée vers un avenir à imaginer, on la retrouve dans une fiche de Barthes, non intégrée dans les cours: « J'appelle Neutre l'ensemble des traits par lesquels je définis mes constantes, mes problèmes et les solutions que je leur rêve27. » C'est toutefois le terme à'aporie qui paraît chez Barthes recouper au plus près la fonction propre du « problème » deleuzien. Dès le premier cours au Collège de France, qu'il avait d'emblée inscrit sous la double figure (indissociablement liée dans son esprit) de Deleuze et de Nietzsche, il présentait le fantasme générateur du thème de la première année - la question de savoir Comment vivre ensemble - comme « l'aporie d'une mise en commun des distances » (CVE, 37). Dans la séance du 18 mars 1978 du cours sur Le Neutre, à la faveur de la remarque d'un auditeur, il s'aperçoit que « ce dont [il] parle directement et obstinément, c'est de l'aporie », et que presque toutes les figures qu'il passe en revue débouchent en fait sur une aporie, c'est-à-dire sur une « difficulté logique sans issue » (TV, 102). Il en tire un premier problème formulé en termes parfaitement

deleuziens : « comment reconnaître le monde comme tissu d'apories, comment vivre jusqu'à la mort en traversant (douloureusement, jouissivement) les apories, sans les défaire par un coup de force logique, dogmatique ? »

De cette question de vie en général, il passe à une description qui s'applique à cette forme de vie très particulière (et privilégiée) ouverte par l'espace du cours lui-même, au sein d'une marge qui, parce qu'elle est protégée de l'universelle communication médiatique, peut préserver une vacuole créative au sein du tissu social : « Comment vivre les apories comme une création, c'est-à-dire par la pratique d'un texte-discours, qui ne rompt pas l'aporie, mais la dérive dans une parole qui s'enchevêtre à l'autre (public) amoureusement? » (N, 102). Indissociablement fuite devant les impasses d'une logique prisonnière des paradigmes préexistants, et dérive créative tissant les subjectivités entre elles pour leur ouvrit de nouvelles voies de problématisation, cette fuite en acte créatif (et politique) qu'est le cours s'inscrit finalement dans une réflexion qui me servira de conclusion et de résumé, où la littérature, « codex des nuances », et lécriture, antidote de l'arrogance, explorent « la représentation du monde comme aporétique, tissé d'apories », en proposant le pari infiniment renouvelé d'une « pratique qui opère une catharsis de l'aporie, sans la dénouer, c'est-à-dire sans arrogance » (TV, 102).


  1. Voir Yves Citton & Philip Watts, « gillesdeleuzerolandbarthes. Cours croisés, pensées parallèles », Revue Internationale des Livres et des Idées, n° 6, juillet 2008, p. 6-10. Je remercie Philip Watts, Claude Coste, Guillaume Bcllon, Bruno Jeanmart, Denis Hollier, Philippe Roger et Daniel Bougnoux pour ce que leurs sollicitations, suggestions, informations, amitiés ont apporté à cette réflexion.

  2. Michel Foucault, « La grande colère des faits », in Dits et Écrits II, 1976-1988, Paris, Gallimard, Quarto, 2001, p. 279.

  3. Gilles Deleuze, « À propos des nouveaux philosophes et d'un problème plus général », in Deux régimes de fous. Textes et entretiens 1975-1995, Paris, Minuit, 2003, 126-134 - les références à ce texte seront notées dorénavant NP, suivi du numéro de page. Sur la genèse de cette plaquette, on lira avec profit François Dosse, gillesdeleuzefélixguattari. Biographie croisée, Paris, La Découverte, 2007, p. 441-445.

  4. Éric Marty, Roland Barthes. Le métier d'écrire, Paris, Seuil, 2006, p. 70.

  5. Ibid., p. 69-70.

  6. Sur cette relation et cette brouille, voir le chapitre « Deleuze et Foucault : une amitié philosophique » in François Dosse, gillesdeleuzefélixguattari, op. cit., p. 364-393. Philippe Roger a eu raison de souligner que le dialogue entre Barthes et Deleuze à propos des « nouveaux philosophes » ne peut être pleinement compris sans s'inscrire dans la triangulation complexe qu'ils entretenaient avec Michel Foucault. Mais ce serait là l'objet d'un autre article.

  7. Éric Marty, Roland Barthes. Le métier d'écrire, op. cit., p. 91-92. Je souligne.

  8. Roland Barthes, « Lettre à Bernard-Henri Lévy », in Œuvres complètes, tome V, 1977-1980, Paris, Seuil, 2002, p. 314.

  9. Roland Barthes, « À quoi sert un intellectuel ? Propos recueillis par Bernard-Henri Lévy », in Œuvres complètes, tome V, 1977-1980, op. cit., p. 365.

  10. Roland Barthes, Le Neutre. Cours au Collège de France 1977-1978, Paris, Seuil, IMEC, 2002, p.195. Par la suite, je renverrai à ce texte par la convention (N, 195).

  1. Philippe Roger a également eu raison de rappeler que, pour quiconque a pratiqué la littérature du XVIIIe siècle - comme c'est son cas, le mien et celui de Barthes - un auteur quelque peu connu écrivant une lettre « privée » à une autre personnalité célèbre ne saurait, sans une ingénuité excessive, être surpris de la voir « circuler dans le public », au point d'être bientôt « publiée ». Dans la suite, je me baserai sur le témoignage d'Éric Marty, que je n'ai pas de raison de mettre en doute, tout en gardant derrière la tête l'idée que des jeux moins naïfs, plus subtils et plus indirects sont sans doute à l'œuvre dans les stratégies des agents. Ce qui m'intéressera, ce seront des gestes mis en scène plutôt que des réalités psychologiques relevant de la sincérité ou de la fourberie.

  2. Roland Barthes, La Préparation du roman I et II Cours et séminaires au Collège de France 1978-1980), Paris, Seuil IMEC, 2003, p. 108. Par la suite, je renverrai à ce texte par la convention (PR, 108)

  3. Roland Barthes, « Lettre à Bernard-Henri Lévy », art. cit., p. 314-315.

  4. Barthes aime évoquer saint Polycarpe, dont Flaubert répétait la litanie « Mon Dieu! Mon Dieu! Dans quel siècle m'avez-vous fait naître? » (PR, 361) - attitude à laquelle Antoine Compagnon donne une place centrale dans son livre Les Antimodernes. De Joseph de Maistre à Roland Barthes, Paris, Gallimard, 2005, p. 412.

  5. Pour une bonne analyse de cette transformation dont B.-H. L. a été à la fois le symptôme, un des catalystes et le surfeur virtuose, voir le livre décapant de Bruno Jeanmart et Richard Labévière, Bernard-Henri Lévy ou La règle du Je, Pantin, Le Temps des cerises, 2007.

  6. Gilles Deleuze, Cours du 2 novembre 1982, disponible en ligne sur le site http://www.univ-paris8.fr/deleuze

  7. Gilles Deleuze, « Les intercesseurs » (1985), in Pourparlers, Paris, Minuit, 1990/2003, p. 177. C'est dans le même volume que figure le « Post-scriptum sur les sociétés de contrôle » (1990), p. 240-246.

  8. Gilles Deleuze, « Les intercesseurs », op. cit., p. 177.

  9. Dans un commentaire oral inséré dans le cours du 27 avril 1977, Barthes précise explicitement que « la méthodologie structurale [...] s'occupe d'opposition terme à terme » et « pas tant de variations de quantités » : « ce qui fait partie d'une analyse structurale, c'est oui ou non, mais pas plus ou moins », Roland Barthes, Comment vivre ensemble. Cours et séminaires au Collège de France 1976-1977, éd. Claude Coste, Paris, Seuil/IMEC, 2002, p. 168 (noté par la suite CVE, 168). Une des originalités principales de la pensée que Deleuze développe à partir de son commentaire de Spinoza tient justement à se représenter le monde et l'expérience humaine en termes d'intensités (de quantités, de plus et de moins).

  10. Serge Zenkine a bien signalé cette tendance de la pensée barthésienne à rejoindre Deleuze et Guattari en mobilisant « la thématique des flux » dans son article « Méat-Barthes, ou deux transcendances de l’ego «, in Revue des Sciences Humaines, n°268 (2002), numéro spécial « Sur Barthes « coordonné par Claude Coste, p. 233-234.

  11. Relevons toutefois que Barthes souligne plusieurs fois que l'angoisse la plus aiguë, et la plus paralysante, vient non d'alternatives mais de situations d'open fieldoh tous les choix sont possibles, ce qui correspond à des situations non précadrées par un paradigme pré-établi (N, 188).

  12. L'expression sert de titre à un chapitre du beau livre de Claude Coste, Roland Barthes moraliste, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 1998, p. 129-159.

  13. Dans sa prise de position sur les « nouveaux philosophes », Deleuze précise bien qu'il ne s'agit nullement de répondre à leurs attaques contre L’Anti-Œdipe, mais d’analyser ce que le succès de leur nullité permet de repérer dans l'évolution des rapports entre intellectuels et journalistes. Le Roland Barthes des années 1960 a bien sûr participé à la fameuse polémique avec Picard, et Antoine Compagnon dans les Antimodernes ne manque pas de rappeler les violences (et les dogmatismes) des textes de jeunesse consacrés au théâtre autour de Brecht, mais, comme le remarque justement Claude Coste, la pensée et les pratiques de Barthes évoluent pour considérer en fin de compte que « la polémique appauvrit le chatoiement des nuances et fige le devenir de la pensée critique » (Claude Coste, Roland Barthes moraliste, op. cit., section « La crise de la polémique », p. 105).

  14. Une lettre écrite par un auditeur (Hervé Dubourjal), lue en guise de supplément lors de la séance du 18 mars 1978, mettra Barthes dans une situation comparable en lui demandant « comment il vit la contradiction » inhérente à la pratique de faire explicitement référence à Jacques Lacan et à Deleuze, alors que leurs positions sont en conflit (TV, 99) : Barthes évitera de répondre en ne lisant pas cette partie de la lettre. On connaît par ailleurs l'insistance avec laquelle les premières pages de Mille plateaux défendront une pensée nourrie de et... et... et... plutôt que de ou bien... ou bien...

  15. Jean-Claude Pinson a déjà exploré de façon riche et suggestive les parallèles que l'on peut tracer entre les modes de fugitivité développés par les deux penseurs, qu'il insère au sein d'une conception plus large (et très originale) relevant de la poéthique. Voir Jean-Claude Pinson, À Piatigorsk, sur la poésie, Nantes, Éditions Cécile Défaut, 2008, surtout p. 84-94.

  16. Tel est bien ce qui « dégoûte » Deleuze chez les nouveaux philosophes : à travers leur « martyrologie », ils « vivent de cadavres », interprètent toute la politique à la lumière du seul Goulag et ne conçoivent l'histoire que comme un empilement de « victimes ». Cette fascination pour la mort, source « d'amertume et de vanité morbide » (NP, 132), les empêche de poser des problèmes qui soient vitaux pour la France des années 1970.

  17. Cité par Guillaume Bellon dans son riche article « Trajets de l'intime. Les cours et séminaires de Roland Barthes », disponible sur la revue en ligne RectoVerso, http://www.revuerectoverso.com/spip.php?article25 (consultée le 28 mai 2008).




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