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LES TESTAMENTS DE MICHEL PINHAN

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bien qu’il devienne prêtre. Même si le discours est, là aussi, relativement sté-

réotypé, même si les recommandations obéissent à un certain mode de pen-

sée, nous pouvons supposer qu’il reflète quelque peu la réalité de la vie en

commun, et que l’accord n’était pas aussi cordial que cela. Marchand aisé,

mari soucieux du confort de sa femme, du bien-être de ses enfants et de sa

soeur, il déshérite ses petits-enfants, ne veut pas que son neveu ait quelque

chose, hésite à un moment entre ses enfants (même ceux à venir) et l’église.

En effet, si Antoine meurt, tous les biens reviendront à Gabriel et aux autres

garçons, s’il y en a. Si tous les garçons décèdent, les filles hériteront. Et, le

7 janvier 1454, il est dit que si tous les enfants, filles comme garçons, péris-

sent, ses biens reviendront à des couvents (pour trois cents florins). Les

petits-enfants sont là aussi ignorés ! Au-delà du discours plus ou moins offi-

ciel et d’une phraséologie caractéristique transparaît donc une sorte de parole

plus spontanée, grâce à laquelle Pinhan adresse directement des recomman-

dations aux membres de sa famille.

Cette relative spontanéité est due aussi à la langue employée par Pinhan,

le provençal, et non le latin, qui correspond au discours officiel. Notre testa-

teur peut se permettre quelques erreurs . Mais cette langue vernaculaire est

malgré tout très particulière ! Il signale avoir rédigé lui-même certaines ver-

sions, « de ma propria man ». Il n’est pas un scribe « officiel », respectueux

d’une norme en usage au moment où il écrit. Il présente un système original,

riche d’enseignements car révélateur de phénomènes particuliers, et

l’explication de M. Séguy

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: « Le scribe n’est pas lié par des règles orthogra-



phiques, procédant d’une tradition solidement établie et reflétant un état

périmé du phonétisme, discipline dont la contrainte réduit ou même annule

l’impulsion structurale » peut très bien lui être appliquée. Sa graphie est telle

que nous pouvons parfois la qualifier de « phonétique ». Pinhan, qui n’est

pas lié par des règles d’orthographe, est peut-être alors un témoin de l’oralité

de son temps, grâce à une systématisation de ce qui, isolé, serait considéré

comme une erreur !

Il use très peu des abréviations. Seuls quelques termes, très courants,

sont abrégés : « per, sen, liura, sol, denier gros, florin, com-, miech, Ihesus,

maystre, item ».

Son écriture, cursive, est assez personnelle. Il lui arrive de répéter un

mot ; parfois, il en barre un, parfois non. De temps en temps, il écrit un terme

dans l’interligne supérieure, dans la marge, ou même, mais assez rarement, à

la fin du paragraphe. Les folios, de petit format, sont assez aérés, la plupart

sont cancellés (parfois la barre passe sur une lettre, la rendant difficile à lire).

Le manuscrit a aussi subi les assauts traditionnels du temps, des vers, et n’est

pas toujours lisible. Pinhan ne met pas de majuscule aux noms propres, et a

tendance à détacher les syllabes d’un même mot.

26. M. S

EGUY


, « Essai sur l’état des palatales et de –d- romans en occitan du

XII


e

siècle » ;



Annales publiées par la Faculté des Lettres de Toulouse, Pallas I, Toulouse, 1954.

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MARIE-ROSE BONNET

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Il ne bouleverse pas toutes les lois en vigueur, ses particularités intéres-

sant surtout les consonnes. Le système vocalique est assez bien respecté et

n’offre pas de grandes différences avec les autres textes ; le –a féminin final est

par exemple maintenu. Les autres voyelles présentent en général un état

« classique ». Cependant, nous constatons dans quelques cas une certaine

hésitation : u/i/e : « pupil(l)itat / pipilitat / pepilitat ; pupila / pipila < pupil-

lus ; matremoni / matrimoni ». Mais il s’agit là d’un vocabulaire notarial avec

des mots proches du latin. Il utilise aussi « mariage, maridage » (d’influence

française ?) aussi bien que « matrimoni »

: u/y : « bysin / busin ; mauvays / mayvays… ». –Y- ne remplace pas –i-

(comme dans la copie du notaire), mais –u-.

: o/e : « mosenor/ mosener ».

Le provençal médiéval témoigne d’une relative fidélité par rapport au

latin, alors que le français a poursuivi son évolution, sauf pour les termes de

formation savante. Les voyelles sont assez stables, quelle que soit leur ori-

gine. Elles ont peu évolué par rapport à d’autres parlers romans. Pinhan ne

propose pas de grandes différences. Les diphtongues, quant à elles, sont aussi

conformes : « permieyramen / permeyramen ; plerieyra ; entiera… ». Au

féminin, « endevenido, faredo, selebrado, eretie » font « endevenidoyra, fare-

doyra, selebradoyra, eretieyra ». Nous relevons les formes traditionnelles

« mayre, payre, frayre, maystre, ayre = ayse, trayre, laysa, noyri, vaysel », où

la palatalisation a normalement agi. L’orthodoxie de Pinhan quant aux

voyelles est assez manifeste. Par contre, son système consonantique est beau-

coup plus « novateur » ! Toutes les consonnes ne sont pas concernées, et

nous ne verrons que celles qui offrent des différences. L’un des principaux

faits du vocalisme de la période primitive romane est l’amuïssement des

voyelles finales autres que –a. Cela a pour conséquence une fréquence très

grande des consonnes en finale de mot, qui évolueront selon leur nature, la

lettre qui les précède, et même celle qui les suivait, dans la mesure où, avant

sa disparition, elle a eu le temps d’influer sur son entourage, et aussi selon le

mot lui-même, oxyton, paroxyton ou proparoxyton. Certaines disparaissent

dès le latin vulgaire. Que deviennent les autres chez Pinhan ?

Certaines consonnes finales ne sont plus notées : « darie(r) ; eretie(r) ;

qula(r) ; admenistrado(r) ; quanta(r) ; meno(r) ; melho(r) ; particula(r) ;

molhe(r) ; pode(r) ; valo(r) ; capito(l) ». Le phénomène affecte essentielle-

ment le –r final, ainsi que (mais dans un seul cas), -l (qui subit une autre

modification). Lorsqu’il s’agit d’un adjectif masculin terminé par -r, -r dis-

paraît, (et réapparaît au féminin) : « endevenido > endevenidoyra… ». Les

infinitifs sont touchés par cette chute, qu’ils dépendent d’un autre verbe,

d’une préposition, ou qu’ils soient suivis d’un pronom complément : « segui ;

tene ; veni ; prega ; ese ; porta ; qurema ; sabe ; selebra ; manga ; marida ; esta ;

dormi ; plare ; quausa ; ensena ; ... » (mais nous avons une fois « vestir »).

Cette chute du –r (de l’infinitif comme des autres mots) a déjà été observée.

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