Histoire du vicariat



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C. NO 46 : IMPLANTER L’ORDRE DE SAINT-DOMINIQUE

AU RWANDA ET AU BURUNDI

PREFACE
Rendre grâces. En cette année du Seigneur 2010, notre vicariat du Rwanda et du Burundi célèbre l’année jubilaire de 50 ans d’existence dans cette région de l’Afrique des Grands Lacs. Les festivités ont débuté à Kigali le premier Août et seront clôturées à Bujumbura le premier Août prochain. Rendre grâces à qui et au sujet de quoi ?
Une rétrospective nous permet de répondre a ce double questionnement. A qui ? Evidement à Dieu qui a envoyé ses ouvriers dans son champ apostolique du Rwanda et du Burundi. Ces ouvriers sont nombreux. Ils ont été embauchés à des époques différentes. Le premier, d’heureuse mémoire, est le papé Honorius III qui a autorisé notre père Saint Dominique à fonder son Ordre. Le deuxième est Mgr André Perraudin, évêque de Kabgayi, qui a invité les Dominicains à venir fonder l’Ordre dans son Diocèse. Nous pensons également, avec gratitude, à Mgr André Makarakiza, archevêque de Gitega, qui a autorisé la fondation de l’Ordre au Burundi. Terminons cette liste des évêques qui nous ont accueillis dans leurs Diocèses en mentionnant Mgr Servilien Nzakamwita. Il vient de nous inviter à venir implanter l’Ordre dans son Diocèse de Byumba. Nous sommes en train d’y construire une première maison qui, si Dieu le veut, sera le début d’un grand complexe de bâtiments, comprenant une chapelle ouverte au public et un centre polyvalent. Cette implantation représente un grand espoir pour l’avenir.
Dans leur travail apostolique, les frères ont collaboré avec plusieurs communautés de la branche féminine de l’Ordre. Nombreuses au début de la mission, il en leste aujourd’hui 3 communautés : les Moniales de Rweza au Burundi, les Dominicaines Missionnaires d’Afrique et les Dominicaines de l’Annonciation. Fasse le ciel que cette collaboration aille de l’avant.

Nous avons à rendre grâces à Dieu aussi pour avoir permis à notre vicariat de traverser des périls nombreux et mortels. Ces périls, de nature essentiellement politiques, expliquent beaucoup de nos difficultés. Ils ont été l’occasion ou la cause de nombreux départs de nos frères parmi lesquels deux prêtres et deux diacres. Ils ont perturbé le programme de nos ministères, entre autres, en nous faisant abandonner l’Université Nationale du Rwanda, en obligeant beaucoup de nos frères expatriés à quitter le Rwanda. Il a même été question, en 1973, de la suppression de notre vicariat. Heureusement Saint Dominique a interposé sa main. Comme nous allons le voir, la tourmente politique du Rwanda, commencée en 1959 pour culminer en 1994, a été l’occasion providentielle pour la fondation de notre maison de Bujumbura ainsi que pour notre collaboration avec les autres entités dominicaines de l’Afrique (l’Interafricaine). En parlant du jubilé de 50 ans du vicariat, on pense spontanément aux deux frères aînés, qui fêtent leur 50ieme anniversaire de prêtrise l’an prochain. Il s’agit du frère Gilles-Marius DION, ordonné le 06 Avril 1961 et Bernardin MUZUNGU, ordonné le 23 Mai de la même année. Ils sont les témoins vivants de la chaleur et de la froidure du climat sous lequel notre vicariat a vécu. Voilà un notre motif de rendre grâces à Dieu. A la fin de cette année jubilaire, si Dieu le veut, nous aurons plusieurs ordinations sacerdotales. A cette occasion nous aurons raisons de chanter : « gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes, objet de sa bienveillance» (Lc 2, 14).


Après cette rétrospective, voici une brève prospective, à la manière d’un rêve ou plutôt d’une prière. Comme nous venons de le dire, et nous y reviendrons encore longuement dans la suite, la situation socio-politique a constitué la principale difficulté de la vie et du ministère de notre vicariat. A l’heure qu’il est, le climat politique semble devenir de plus en plus clément. Aussi, tous nos espoirs semblent permis. Alors que jusqu’ici notre province constituait la base de nos ressources en personnels et en finances, il est devenu clair, à présent, que notre vicariat devra compter de plus en plus sur ses propres forces. Nous sommes en train de penser à renforcer nos structures sociales et financières. La communauté de Bujumbura commence son extension à Kanyosha. La communauté de Kigali vient d’achever l’agrandissement de sa chapelle et projette l’élargissement des activités du Centre Saint-Dominique. Le vicariat commence enfin à mettre en pratique son désir de fonder une troisième communauté à Nyagatare. Celle-ci pourra être un centre de rayonnement du charisme dominicain dans cette région du pays où les structures apostoliques sont encore peu développées. Cette communauté sera en même temps une grande fenêtre ouverte sur l’Afrique de l’Est. Cette zone est actuellement promise à d’énormes possibilités.
Cette préface est, en quelque sorte, le résumé des pages qui vont suivre. Je suis heureux de présenter ce travail à tous les frères de notre Ordre qui ont aimé notre vicariat et continuent de soutenir nos efforts.


  1. LIMINAIRE

Avant d’entrer dans le vif du présent propos, expliquons l’origine de cette dualité du titre. Un proverbe profane dit : à quelque chose, malheur est bon. Les chrétiens disent mieux : Dieu écrit droit avec des lignes courbes. Cela veut dire qu’Il écrit l’histoire du salut de l’humanité avec l’histoire profane des individus. Cette introduction veut expliquer comment notre Vicariat se situe providentiellement dans deux pays, sans que cela ait été programmé par ses Fondateurs. Voici comment. En 1973, pour des raisons socio-politiques, le frère Bernardin Muzungu rwandais, qui demeurait à Butare, a trouvé refuge à Bujumbura. A cette époque, le frère Liboire Kagabo burundais, faisait ses études à Fribourg en Suisse. Il y était envoyé par les Dominicains du Rwanda pour une formation religieuse et des études universitaires. Il était en première année de Théologie, après une licence en Philosophie. Pour les mêmes raisons que son confrère, il n’avait plus l’espoir de retourner au Rwanda après ses études. C’est dans ces conditions qu’il est revenu en juillet 1974 au Burundi. Les deux frères ont trouvé accueil au Grand Séminaire de Bujumbura, l’un comme Professeur et l’autre comme Etudiant. Le salaire du premier pouvait couvrir la facture de leur hébergement au Séminaire. A deux, ils ont pu réfléchir à l’avenir immédiat de leur vie dominicaine. Nous poursuivrons cette idée ultérieurement en développant séparément l’histoire des deux communautés dans les deux pays.


Le plan de cette réflexion va comprendre deux volets. Le premier essaie de présenter l’histoire événementielle globale du vicariat. Le deuxième va présenter une analyse de quatre secteurs de la vie de nos communautés. Ces secteurs peuvent s’exprimer en quatre verbes : engendrer ou la politique de recrutement, nourrir ou le système économique et financier de nos communautés, éduquer ou le programme de formation religieuse et professionnelle, travailler ou les divers engagements apostoliques.
En fait de méthode, comme le dit l’adage latin In omnibus respice finem, l’histoire que je vais écrire dépend de la situation actuelle de notre vicariat. Elle va raconter le passé qui explique le présent et indique ainsi le chemin à suivre vers un avenir meilleur. Comme cette histoire va rencontrer des sensibilités différentes, j’ai transmis la première version de mon texte à des frères qui connaissent cette histoire et qui ont joué un rôle significatif dans la vie de notre vicariat afin de bénéficier de leurs avis. En une deuxième étape de consultation, j’ai envoyé la deuxième version de mon texte à tous nos frères profès solennels. Le texte définitif que vous allez lire est le résultat des avis des uns et des autres dont les éléments pertinents sont déjà intégrés dans cette dernière version. Les contributions écrites contiennent les éléments suivants. Des informations complémentaires, des corrections, des nuances dans certaines de mes affirmations, des avis divergents et une invitation à souligner certaines données. J’ai essayé honnêtement de tenir compte de ces avis. Qu’il me soit permis maintenant, en guise de remerciement, de citer les noms des frères qui m’ont envoyé des réponses écrites. Je les cite en ordre chronologique de leurs réponses. Il s’agit des frères : Yvon Pomerleau, Prudence Hategekimana, Liboire Kagabo, Guy Musy, Ovila Bélanger, Syprien Ntibankundiye et Symphorien Ntibagirirwa. Je remercie spécialement le frèreYvon pour son livre Présence dominicaine au Rwanda et au Burundi (Québec,1999) dont j’ai fait des citations sous la référence de la lettre initiale de son prénom (Y). Compte tenu de ces contributions écrites et des échanges oraux, le texte qu’on va lire comprend trois appréciations. Tout d’abord, il relativise les gloires du passé qui ont laissé peu d’héritages pour notre vie actuelle. Ce choix vient surtout du fait que dans un abrégé d’histoire, on ne peut pas tout raconter. Ensuite, il exprime des regrets au sujet des décisions qui constituent de sérieux handicaps spécialement sur le plan économique et financière pour notre vie d’aujourd’hui. Enfin, il souligne tout ce qui a constitué les pierres de construction de l’édifice de notre vicariat. Voilà la clef de lecture de cette brève histoire que j’ai la joie d’offrir à mes frères en cette période de célébration de 50 ans de notre vicariat.
I. HISTOIRE EVENEMENTIELLE DU VICARIAT
1. Introduction

Pour mieux comprendre les principaux événements de l’histoire de notre vicariat, lisons le premier article de l’introduction de nos Statuts: « Le vicariat de la province Saint-Dominique du Canada au Rwanda et au Burundi remonte à 1960 avec la fondation de la première communauté à Butare. L’érection du vicariat provincial date de 1970. La Fraternité Saint-Dominique de Kigali a été fondée en maison en 1975 et érigée en couvent en 2005. La Fraternité Saint-Dominique de Bujumbura, fondée en 1973, a été érigée en maison en 1977. Le vicariat du Rwanda et du Burundi comprend jusqu’à présent deux communautés: le Couvent Saint-Dominique de Kigali et la Fraternité Saint-Dominique de Bujumbura ».




2. La trame des événements
Essayons de rappeler les événements majeurs de notre vicariat durant ces 50 ans.
2.1. L’appel de Mgr André Perraudin
Le texte qui suit est une lettre adressée par Mgr André Perraudin, évêque du Vicariat Apostolique de Kabgayi, en date du 13 août 1959, au Prieur Provincial de la province dominicaine du Canada, le frère Thomas-Marie Rondeau :



«  Mon Très Révérend Père, c’est avec les sentiments d’une très grande joie et de la plus vive reconnaissance que nous avons reçu la nouvelle de l’acceptation de votre province de venir fonder au Rwanda. J’en remercie tout particulièrement Votre Paternité qui a si bien compris notre appel et y a répondu avec tant de diligence et de générosité. J’ose espérer que le Seigneur bénira très largement votre décision et fera que votre Ordre s’implante solidement en ces belles et si attachantes régions. Je le Lui demande de tout mon cœur.





Le travail par ici est surabondant. Je désirais que les Frères Prêcheurs oeuvrent dans la ligne de leur vocation propre. Concrètement j’avais songé pour eux, en accord d’ailleurs avec le T.R. Père Gobert, 1) à l’apostolat de la bonne presse : nous avons à Butare une librairie que je comptais vous confier ; 2) à l’apostolat dans le milieu intellectuel et en particulier dans un groupe scolaire important de Butare ; 3) à des missions paroissiales, surtout dans les centres. Il faudrait pour cela que vos Pères, et en particulier les plus jeunes, s’incarnent dans le milieu et se mettent le plus tôt possible à l’étude de la langue du pays. Bien d’autres possibilités d’apostolat existent ; mais je pense qu’il sera préférable de les étudier quand vous serez sur place. Très volontiers nous mettrons à votre disposition une maison d’habitation tout le temps nécessaire. La librairie pourra vous apporter quelques ressources ainsi que l’aumônerie du groupe scolaire. De toutes façons le Vicariat vous assurera le complément nécessaire. De loin il est difficile de préciser davantage toutes ces choses ; venez en toute confiance et nous mettrons tout au point quand vous serez arrivés. Puis-je vous demander de saluer déjà très chaleureusement les trois Pères et le Frère que vous nous destinez. Et daignez agréer, vous-même aussi, mon Très Révérend Père, mes respectueux hommages en Notre Seigneur et Notre Dame » (Y, p.7).
- Un commentaire :
De cette lettre, soulignons les aspects importants. Cette lettre est vraiment l’expression de la volonté divine qui écrit, comme nous l’avons dit, l’histoire sainte avec les actes des humains. Mgr Perraudin, pour répondre aux besoins de son diocèse, a songé aux divers apostolats des Dominicains qu’il a connus dans son pays, la Suisse, spécialement à Fribourg où ils étaient nombreux à enseigner dans l’Université de cette ville. C’est ce model d’apostolat qu’il veut, sans doute, voir réalisé au Rwanda. De fait, la première Université du Rwanda fut fondée par ces Dominicains à Butare pour répondre à l’appel du premier Président du Rwanda, Grégoire Kayibanda, qui avait été très proche de lui et avec lequel ils ont sûrement partagé ces idées de progrès pour le pays. Il faut retenir aussi la clairvoyance de cet Evêque qui a su indiquer aux Dominicains le genre d’apostolat qui les attendait au Rwanda : l’apostolat par la presse, l’apostolat dans les milieux intellectuels et la pastorale directe dans les milieux urbains. Il n’a pas oublié de les rassurer du soutien économique et financier dont ils auraient besoin. En effet, ils promettaient de mettre à leur disposition une maison d’habitation pour les débuts de leur séjour au Rwanda. Il indiquait également les trois sources de revenus : la librairie, l’aumônerie et l’apostolat dans les paroisses. Fort heureusement, l’évêque précise qu’il faut s’imprégner de la culture du pays pour réaliser une évangélisation en profondeur, tâche propre aux Dominicains. Soulignons, pour finir, que Mgr Perraudin invite les Dominicains canadiens à « implanter solidement » l’Ordre de Saint Dominique au Rwanda, c’est-à-dire y organiser leur vie et leurs apostolats spécifiques d’une manière durable. Comprenons qu’il ne demandait pas des Missionnaires canadiens pour un temps limité mais bel et bien une incarnation définitive de l’Ordre dans le pays spécialement par les natifs du pays.
-La réponse des Dominicains :


La première réponse fut constituée par l’arrivée et le séjour des Dominicains qui ont



vécu successivement dans une petite maison de Butare et ensuite dans une aile du bâtiment administratif de l’Université, pendant dix ans, avant la construction de leur propre maison. Citons les textes qui nous parlent de cette période.


«Le tout premier groupe des Dominicains canadiens qui sont arrivés au Rwanda était constitué par trois frères prêtres et un frère coopérateur : Bertrand Boisvert, Jacques Trembley, Bertrand (Ovila) Bélanger et Gérard Rodrigue. Le Supérieur de la petite communauté, le père Boisvert, était âgé de 48 ans et disposait d’une longue expérience de prédicateur de retraites. Les trois autres n’avaient pas encore atteint la trentaine.
C’est le 23 janvier 1960, à 6 h 00 du soir, que les frères arrivent à Butare. Ils occupent une petite maison au centre ville, mise à leur disposition par l’évêque. L’un ou l’autre fait un premier apprentissage de la langue du pays, le Kinyarwanda, qu’il complète par un stage de quelques semaines dans une paroisse. Cette coutume du stage en paroisse se poursuivra au fil des années pour les nouveaux arrivants. Et puis très vite, les frères s’engagent dans les activités pour lesquelles Mgr Perraudin les avait fait venir : aumônerie du Groupe Scolaire de Butare, prédication de retraites aux prêtres, démarrage d’une librairie» (Ibid., p.8).


2.2. L’appel du Gouvernement rwandais pour la fondation de l’Université
C’est après ces deux ans de présence au Rwanda que ces Dominicains reçoivent un nouvel appel venant de la part du Gouvernement rwandais. Cet appel les impliquait dans un projet non prévu, au départ, celui de la fondation de la première Université du Rwanda. Voici le texte qui en donne les différentes coordonnées :
« C’est en 1962, année de l’Indépendance du pays, que le Président de la République, au nom du Gouvernement, exprime aux Dominicains son désir d’avoir un embryon d’enseignement supérieur dans le pays. C’était pour lui une façon de consolider l’Indépendance récemment acquise et d’assurer le développement de la jeune République » (Y., p. 10).
Pourquoi faire appel aux Dominicains? On raconte que le Président avait comme livres de chevet les ouvrages du père Louis Joseph Lebret, dominicain, qui aurait été pour lui comme pour d’autres leaders africains, une sorte de maître spirituel dans le domaine du développement. Toujours est-il que les Dominicains, contactés par le Président de la République, firent appel au père Georges-Henri Lévesque pour une étude de faisabilité du projet. Celui-ci, était un universitaire chevronné, fondateur de la Faculté des Sciences sociales de l’Université Laval, et une figure bien connue dans l’univers socio-politique du Canada. Séduit par le dynamisme de la jeune équipe au pouvoir au Rwanda et convaincu des besoins d’une Université pour la formation de cadres locaux pour le développement, le père Lévesque, à 60 ans, accepte de relever le défi. L’Université sera nationale et non ecclésiastique. Ce fut là le désir des Dominicains, endossé par le Gouvernement rwandais. Le père Lévesque aura plusieurs batailles à mener pour la création de l’Université Nationale du Rwanda. Les premiers collaborateurs du père Lévesque seront des Dominicains. Pendant une douzaine d’années, le projet de l’Université va drainer presque toutes les énergies dominicaines sur place. En plus du Recteur lui-même, mentionnons le Vice-recteur, le père Pierre Crépeau, qui peut être considéré comme le co-fondateur de l’Université ; le doyen de la faculté des Lettres, le père Augustin Cattin, de la province dominicaine de Suisse ; plusieurs professeurs dont Gilles-Marius Dion, Pierre Dionne, Benoît Pruche, de nationalité française, Benoît Lacroix. Furent affectés à d’autres activités dont l’aumônerie, la librairie et l’extension universitaire, les frères suivants : Dominique Louis, son frère Mannès (André) Louis, Richard Friedli, Guy Musy, ces quatre sont de la province de Suisse ainsi que les canadiens Bertrand Bélanger, Reginald Sylvestre, Luc Lacroix, Gérard Rodrigue, Jean-Baptiste Grégoire et Adrien Labrie. Cette aventure a duré de 1963 à 1974, le temps de mettre sur pied toute la structure académique et administrative nécessaire pour le bon fonctionnement de plusieurs Facultés.
Cet engagement des Dominicains dans la première Université du Rwanda, malgré sa précarité, a joué un rôle non négligeable pour la fondation de notre vicariat. En effet, il s'agissait d'une institution de grande envergure qui a contribué beaucoup au développement du pays et se situait tout à fait dans la ligne du charisme dominicain. Il a ainsi fait connaître l'Ordre au Rwanda contribué grandement à l'essor de la communauté des Dominicains dans la société rwandaise.
C’est dans les années 1972-1973, dix ans après sa fondation, que les Dominicains vont envisager leur retrait de l’Université. A ce moment là, ont survenu des événements  politiques qui ont révélé aux Dominicains une certaine ambiguïté dans leur rôle à l’Université. Officiellement, ils étaient les premiers responsables de l’Université mais en fait, d’importantes décisions étaient prises ailleurs et leur échappaient. Et c’est ainsi que fut résiliée, de commun accord, la convention signée pour une durée de cinquante ans renouvelable» (Ibidem, p.10-12).
2.3. La construction du Couvent de Butare 
« En 1969, les Dominicains ont construit leur propre maison sur un terrain qui leur était cédé par le Gouvernement rwandais en reconnaissance du travail accompli à l’Université. Le Couvent fut construit à proximité de l’aéroport local, entre le centre-ville et le quartier de Ngoma. Il comprenait une vingtaine de chambres réparties sur deux niveaux, en plus de tous les lieux communs habituels d’un couvent. La chapelle et la bibliothèque étaient prévues pour l’accueil d’un public extérieur. C’étaient des bâtiments solides, fonctionnels, construis pour loger une quinzaine de frères. Ce couvent fut inauguré le 4 mai 1969, à l’occasion de l’ordination presbytérale du frère Yvon Pomerleau par Mgr Jean Baptiste Gahamanyi, évêque de Butare. Et, moins de six ans plus tard, les Dominicains devaient abandonner Butare pour Kigali. Ils céderont alors leur couvent au Centre des Handicapés de Gatagara qui y hébergera une école pour sourds muets sous la direction des Frères de Saint-Gabriel » (Ibidem, p.13).
Tels furent, dit brièvement, la vie et le ministère des Dominicains à Butare. Ils y ont accompli un travail remarquable en réponse des appels de Mgr Perraudin et du Gouvernement rwandais. Ils y ont lancé également une ébauche d’enracinement de l’Ordre dans le pays en accueillant les premiers candidats à la vie dominicaine. Au moment de leur départ de Butare, il y avait déjà un certain nombre de frères du pays qui étaient accueillis dans le vicariat.
A partir de ce moment-ci, nous allons développer notre réflexion en tenant compte de l’existence des deux communautés, situées l’une au Rwanda et l’autre au Burundi. Mais avant de suivre les Dominicains dans les deux pays, disons un mot sur la situation socio-politique qui est à la base de cette nouvelle orientation.

2.4. La situation socio-politique et ses conséquences sur l’avenir de notre vicariat
Comme on le sait, depuis 1959 jusqu’à 1994, le Rwanda vit une tourmente socio-politique humainement désastreuse. Cette situation a contaminé le Burundi et même les régions avoisinantes. Parmi ces conséquences, il y en a deux qui concernent directement notre vicariat et que nous allons relater ici. La première concerne la rupture du contrat de direction de l’Université Nationale du Rwanda à Butare par les Dominicains canadiens. La seconde concerne le départ des Dominicains de Butare à Kigali pour une nouvelle orientation de leur présence au Rwanda. Pour ce qui est de la rupture du contrat, voici le texte de la décision du conseil de la province du 1er juin 1973 qui le précise :
« 2. Que le prieur provincial soit mandaté pour déléguer le f. Gilles-M. Dion, prieur, et un autre frère de la communauté de Butare pour signer les papiers destinés à mettre fin à la convention entre l’Ordre et le gouvernement du Rwanda concernant l’Université de Butare; (…) ».
La deuxième conséquence se trouve dans la décision du conseil provincial du 1 mars 1974. Voici le texte de cette décision prégnante de lourdes conséquences : « Considérant que:
1. Avec la remise au Gouvernement rwandais de l’entière responsabilité de l’Université Nationale du Rwanda, et avec la remise à peu près complète à des Rwandais de tâches universitaires autrefois assumées par les Dominicains, prend fin le projet pour la réalisation duquel les Dominicains de la province canadienne ont surtout concentré leurs efforts au Rwanda depuis 1960 ;
2. Par suite du jeu de facteurs multiples et complexes comme l’évolution de la situation politique du Rwanda, la diminution et la dispersion des effectifs dominicains assignés au vicariat du Rwanda, les frères du vicariat n’ont encore pu définir aucun autre projet apostolique et religieux qui corresponde aux conditions acceptées l’an dernier par la communauté de Butare et reconnues par le conseil provincial;
3. Des facteurs ethniques et politiques rendent pratiquement impossible, pour un avenir indéterminé, la constitution d’une relève autochtone, seule capable d’assurer la permanence d’une présence dominicaine significative en Afrique Centrale ;
4. La baisse rapide et grave de nos effectifs, particulièrement chez les plus jeunes, place la province canadienne dans l’impossibilité d’assurer une relève pour sa part ;
5. A cause de l’action de tous les facteurs susmentionnés, et sans qu’ils en soient aucunement responsables, les frères assignés au vicariat du Rwanda ne peuvent remplir les conditions de stabilité et d’enracinement que requiert, par delà les changements individuels, l’établissement d’une fondation dominicaine durable en Afrique Centrale ;
Il est proposé au conseil provincial de décider :
1. De mettre fin, à partir du premier juillet 1974, à toute initiative et à toute responsabilité de la province dominicaine canadienne comme telle au Rwanda ;
2. Par conséquent, de ne plus accueillir de candidats à la vie dominicaine en vue du Vicariat du Rwanda ;
3. De chercher avec les frères africains déjà affiliés à la province dominicaine canadienne la solution la mieux adaptée à leur situation actuelle et à leurs perspectives d’avenir, étant sauf leur droit inaliénable à demeurer fils de la province canadienne ;
4. De permettre aux frères canadiens qui le désirent et qui le peuvent de poursuivre encore pour un certain temps un service pastoral au Rwanda, et cela à titre purement personnel, sans engager la province dominicaine canadienne, étant entendu que ces frères seront éventuellement soutenus financièrement par la province dominicaine canadienne et pourront rentrer au pays quand, en accord avec les autorités de la province, ils le jugeront opportun ;
5. De confier au vicaire provincial le règlement final des obligations et des intérêts d’origine financière pouvant encore relever de la province dominicaine canadienne au Rwanda ».
Relevons les éléments importants de ce texte : il faut d’abord noter que ce texte concernant la suppression du vicariat est une proposition émanant d’un conseil provincial et non une décision effective. Celle-ci est confiée à un autre conseil provincial ultérieur. Cette proposition a déclenché des réactions diverses de la part des frères de Bujumbura et de Butare. Avant de revenir à la réaction des frères de Bujumbura, voyons les différentes décisions concernant les Dominicains au Rwanda.
1°- En date du 21 mars 1974, les frères de Butare envoient au conseil provincial la proposition suivante :
« I. Les frères du vicariat du Rwanda présents à Butare :
A. Reconnaissent le bien fondé des considérants nn.1, 4 et 5 motivant la décision prise le 1 mars 1974 par le conseil de la province canadienne en regard du vicariat du Rwanda ;
B. Désirent corriger les considérants nn.2 et 3 par une information complémentaire en soumettant au conseil provincial les considérants suivants :
1. Des frères de la province canadienne, déjà présents en Afrique centrale (…), aidés par un frère de la province de Suisse, souhaitent y demeurer et sont prêts à continuer à y investir leurs énergies ;
2. Ces frères peuvent ainsi maintenir en Afrique centrale une présence dominicaine significative et importante non seulement à titre personnel mais aussi comme engagement de la province canadienne dans le tiers monde.
3. La constitution d’une relève autochtone est devenue pratiquement impossible pour un avenir indéterminé à cause, d’une part, de l’impossibilité pour la communauté locale de prendre en charge la formation des candidats éventuels et, d’autre part, de la dispersion de fait des frères africains déjà assignés au vicariat du Rwanda.
Voici comment ces frères envisagent la possibilité pour eux de continuer un engagement missionnaire de la province dominicaine canadienne en Afrique centrale :
1. En regard d’une fondation dominicaine comme telle
a. À partir du 1 juillet 1974, ils reconnaissent que la province dominicaine canadienne peut mettre fin à son projet visant à établir en Afrique centrale une fondation dominicaine comme telle ;
b. Ils reconnaissent que tout recrutement sur place en vue du vicariat du Rwanda est impossible.
2. En regard de la continuation d’une mission de la province dominicaine canadienne.
a. Un ou deux frères présentement engagés à Butare dans des responsabilités pastorales, respectivement à l’aumônerie universitaire et au centre de formation scoute, peuvent y demeurer pour une période qui ne dépassera vraisemblablement pas un an. Au moment opportun, ces frères décideront, en accord avec les autorités dominicaines, s’ils doivent se joindre aux autres frères restant encore en Afrique centrales ou rentrer au pays.
b. Deux ou trois frères sont prêts à s’employer pour un an, avec le consentement des autorités diocésaines, à un sondage en profondeur susceptible de permettre une insertion pastorale dans un quartier de Kigali, capitale du Rwanda. A la fin de cette année, une évaluation de ce sondage permettrait de conclure s’il convient d’assumer un engagement missionnaire plus durable ou s’il faut renoncer à tout projet missionnaire de la province dominicaine en Afrique centrale. Dans la seconde hypothèse, ces frères pourraient demeurer en Afrique à titre personnel, en accord avec les autorités dominicaines.
c. Un frère africain actuellement à Bujumbura, capitale du Burundi, est prêt à y poursuivre le travail qu’il accomplit déjà depuis un an, étant entendu qu’il est rattaché à la communauté dominicaine actuellement à Butare.
d. Les frères africains du vicariat du Rwanda actuellement aux études à Fribourg et à Québec devraient aussi préciser les modalités de leur appartenance à la communauté dominicaine de Butare.
II. C’est pourquoi les frères du vicariat du Rwanda proposent au conseil provincial de modifier sa décision comme suit :
1. À partir du 1 juillet 1974, la province dominicaine canadienne met fin à son projet visant à établir une fondation dominicaine comme telle en Afrique centrale. Par conséquent, on n’accueillera plus de candidats à la vie dominicaine en vue du vicariat du Rwanda.
2. Jusqu’au 1 juillet 1975, la province dominicaine canadienne comme telle continue d’assumer sa mission en Afrique centrale par la présence de frères au Rwanda et au Burundi.
3. Les frères africains affiliés à la province canadienne restent rattachés à la communauté dominicaine actuellement à Butare.
4. En juillet 1975, après évaluation du projet de Kigali, la province dominicaine canadienne décidera, en accord avec les frères du vicariat, s’il faut poursuivre son engagement missionnaire en Afrique centrale en tant que province. Dans l’hypothèse d’une décision négative, on verra à trouver pour chaque frère une solution adaptée à sa situation ».
De ce texte, retenons les éléments suivants : 1°- les frères de Butare, sont d’accord avec la proposition provinciale de mettre fin à l’existence du vicariat pour le 1er juillet 1974. 2°- Ils demandent l’autorisation de continuer leur vie dominicaine en Afrique en tant que membre d’une mission dominicaine canadienne jusqu’en juillet 1975.
2°- En date du 20 avril 1974, le conseil provincial répond à la demande des frères de Butare datant du 21 mars de la même année 1974 par la proposition suivante :
« … a) qu’en accord avec les frères travaillant actuellement dans le vicariat du Rwanda et en accord également avec la province de Suisse, on favorise l’orientation du travail des frères vers un engagement missionnaire détaché du projet de la fondation dominicaine qui y était jusqu’alors visé comme objectif fondamental ;  
b) que l’on maintienne la décision déjà prise (réunion du 1er mars 1974) par le conseil provincial de ne plus recevoir de candidats à la vie dominicaine en vue du vicariat du Rwanda;
c) que le frère Luc Lacroix demeure à Butare pour y consolider son centre de formation scoute;
d) que le frère Gilles-M. Dion ainsi que les ff. Guy Musy, de la province de Suisse, et Yvon Pomerleau soient autorisés à constituer à Kigali, capitale du Rwanda, une équipe de percée missionnaire en milieu urbain;
e) que les frères africains dépendent de la communauté locale du Rwanda ».
En clair, ce texte indique l’autorisation de créer une nouvelle maison à Kigali pour loger une communauté dominicaine missionnaire. Ainsi donc, l’éventualité de mettre fin à toute présence dominicaine au Rwanda, envisageait précédemment pour l’année 1975, est annulée. Notons cependant que cette maison n’est pas un couvent comme celui de Butare mais une communauté missionnaire.
3°- En date du 6 septembre 1974, le conseil provincial complétait la décision du 20 avril 1974 par la proposition suivante : « …que le f. Gilles-Marius Dion soit nommé supérieur de la maison de Kigali… ».
4°- En date du 6 décembre 1974, le conseil provincial complète sa dernière décision par une nouvelle formule en ces termes :
« 2. que soit supprimée canoniquement la maison S. Thomas d’Aquin de Butare, au Rwanda, que soit érigée canoniquement la maison S. Dominique à Kigali, au Rwanda, enfin que le f. Gille-Marius Dion soit nommé, pour une durée de trois ans, vicaire provincial et supérieur de la maison…) ».



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