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ÉVY, Éditeur
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LETTRES A M. l'ANIZZI
XVII
Fontainebleau, 13 juin 1804.
Mon cher Panizzi,
Le premier mot de l'impératrice en me voyant a été pour me demander de vos nouvelles ; puis si vous aimeriez à venir ici. J'ai répondu du plaisir que vous auriez, mais j'ai dit que je ne savais pas si vous étiez libre en cette saison ; de tout quoi je ne perds pas un moment pour vous donner avis.
Répondez suivant votre cœur, pourvu que votre lettre soit montrable. II y a ici Nigra, Sormani et un attaché italien dont je ne sais pas le nom, la princesse Murât, les deux princesses filles du prince de Canino, madame de Rayneval, madame de Lourmel, madame Przedzewska et cinq ou six autres fort belles. La semaine prochaine sera le tour des Allemands, à ce que je crois.
L'empereur, la semaine passée, est tombé dans la pièce d'eau après dîner, coiffé par le bateau qui s'était retourné. Il n'y avait absolument personne
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sur la pièce d'eau. Comme il est toujours homme de aang-froid, il a plongé pour se débarrasser du bateau et a regagné tranquillement la berge à la nage.
Je vous quitte pour mettre mes culottes, j'espère que vous avez payé celles de Poole.
XVIII
Fontainebleau, 22 juin 1864.
Mon cher Panizzi,
Je suis encore dans la plus grande incertitude sur ce que je ferai, ou plutôt sur ce que je pourrai faire. Selon leur habitude, Leurs Majestés ne nous ont encore rien dit de positif, mais on nous annonce qu'on nous retiendra jusqu'à samedi soir. Je réclamerais ma liberté pour demain sans deux considérations graves.
La première, que l'empereur m'a demandé un travail que je n'ai pas encore terminé et que je voudrais lui remettre avant de partir. Vous devinez de quoi il s'agit, c'est une révision d'épreuves que je ne puis emporter avec moi.
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La seconde considération est que je suis toujours très souffrant. Je suis si mal à mon aise, que je ne sais si j'oserais me mettre en route.
La vie qu'on mène ici est horriblement fatigante, bien que j'évite de faire des promenades et que je me retire dans ma chambre de bonne heure, et que je ne boive guère que de l'eau. Je tousse toutes les nuits au lieu de dormir. Bien des choses que je vous raconterai me donnent encore du tracas et me font faire du mauvais sang. Cependant je ferai de mon mieux. Avant samedi, vous recevrez de mes nouvelles. Si je puis être à Londres ce jour-là, je partirai ; mais cela est fort douteux : le docteur me conseille de rester enfermé chez moi à Paris trois ou quatre jours sans parler, sans remuer, jusqu'à ce que cette toux, qui me fatigue tant, ait disparu. Enfin j'espère que, quoi qu'il arrive, je serai au Brilish-Mu-seum avant la fin du mois. .
J'ai fait votre commission auprès du prince impérial, qui m'a chargé de vous dire qu'il ne vous oubliait pas, et qu'il espérait bien vous revoir. Je suis également chargé de force compliments pour vous par deux dames que vous
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connaissez et avec qui vous avez fait la fameuse campagne de la Rune.
Les élections aux conseils généraux sont assez bonnes ; cependant il y a un certain nombre d'orléanistes qui ont été nommés.
J'ai eu avec quelqu'un une grande conversation au sujet du clergé. Yous en auriez été content ; malheureusement, parler et agir sont deux.
Le temps se remet un peu, cependant les soirées sont toujours très fraîches ; en outre, Fontainebleau est fort humide^
Adieu, mon cher Panizzi; vous aurez sous peu un mot de moi.
XIX
Paris, 27 juin 1864.
Mon cher Panizzi,
L'impératrice, l'empereur et le prince impérial m'ont chargé tous les trois et à différentes reprises, surtout in extremis, je veux dire au moment de la séparation définitive, de tous leurs
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compliments pour vous. Autant m'en ont dit madame de Rayneval et madame de Lourmel. Cette dernière vous envoie son portrait. Est-ce assez tendre?
Ce que vous me dites du ministère anglais confirme ce qui m'a été dit par mon hôte. Yous ne verrez probablement pas lord Palmerston ministre, la reine ne veut pas.
Adieu, mon cher Panizzi ; je vous écrirai un mot demain soir.
XX
Paris, 5 août 1864.
Mon cher Panizzi,
Mon odyssée n'a pas été des plus tragiques. La mer était unie comme une glace, et trois dames seulement ont dégobillé; une vingtaine ont passé du rose au blanc verdâtre, et, quant à moi, j'ai fumé fort tranquillement. Mais le diable, qui me persécute, comme il fait pour tous ceux qui sont bien notés là-haut, a fait en sorte qu'entre Bou-
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logne et Rue, le piston de notre locomotive a refusé de fonctionner. Nous l'avons raccommodé. Au bout de dix minutes, il s'est redérangé. Nous étions sous un soleil ardent sans le moindre abri, avec la perspective de recevoir dans le derrière le train parti de Boulogne après nous. Cela a duré une heure et demie. Puis est arrivée une locomotive secourable qui nous a poussés gentiment par derrière jusqu'à Rue, où nous avons pu nous débarrasser de la locomotive inutile, et en prendre une qui nous a menés si grand train, que nous n'avons été que d'une heure, en retard. J'ai, pendant ce temps-là, regretté plus d'une fois de n'avoir pas mis dans ma poche quelques sandwiches de cet excellent bœuf salé que j'avais laissé au British-Museum. Dans l'absence du maître, les domestiques font des bêtises. Pendant que César est à Yichy, le ministre de l'intérieur en fait délie grosse. Vous savez Ou vous ne savez pas que, depuis un certain décret de la République, les journaux ne peuvent pas rendre compte des débats d'un procès de presse. Us ne peuvent que publier l'arrêt et le considérant. Or le Moniteur, qui se fait dansl'of-
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ficine du ministre de l'intérieur, s'est avisé l'autre jour de publier les débats d'un procès de presse. Il a été aussitôt cité au parquet. Cela fait grand scandale, à ce que je vois par les journaux, et montre quelles espèces de niais sont chargés des détails.
J'ai trouvé ici une lettre de Yienne où l'on paraît avoir pour les Prussiens la même tendresse que les rats portent aux chats. Vous aurez vu le discours de M. de Beust à la Chambre saxonne. Cela est très divertissant et ne promet pas pour trop tôt le grand teutoniquc Verein.
Madame de Montijo va mieux, à ce qu'elle dit, et vous attend à Carabanchel cet automne. Elle commence à mieux écrire votre nom, car elle vous nomme Paîïisi au lieu de Panucci. Mais le z toscan est une pierre d'achoppement terrible pour une bouche castillane.
Adieu, mon cher Panizzi ;. portez-vous bien et donnez-vous pour loi d'aller tous les jours chez lirooks l à pied. Mettez-moi à ceux de lad y Rolland.
I. Le Club libéral dans Saint-James's.
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XXI ' : '
•. .; Paris, 10 aolit 18C4.
, Mon cher Panizzi,
J'ai trouvé M. Fould en assez bonne santé, se préparant, après les fêtes, à aller présider le conseil général ■ et à se reposer un peu à Tar-bes. Il me charge de tous ses compliments pour vous et M. Gladstone. Il est dans ce moment en grande faveur, ce me semble, auprès de monsieur et madame, occupé d'ailleurs à rapprocher des collègues qui ne s'aiment guère et qui ne s'aimeront jamais. Suivant toute apparence, cela finira par un replâtrage qui durera Dieu sait combien de temps.
Vous aurez peut-être su que, il y a peu de jours, on a donné à Rome une nouvelle édition de l'affaire Mortara. C'est un petit juif nommé -'Cohen, âgé de neuf ans, qu'on a baptisé malgré ses parents. On aurait dû les brûler vifs : on s'est contenté de les envoyer promener. Il paraît que cela a fait "un--mauvais effet parmi
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nos officiers, qui ont lu, presque tous, les œuvres impies de M. de Yoltaire.
On me dit que Leurs Majestés n'iront pas cette année à Biarritz, je ne sais pas encore le pourquoi.
On craint quelque tapage à Madrid. Prim s'est ruiné, et cherche à se refaire coûte que coûte. Olozaga et lui ne sont pas délicats sur les moyens à employer. On a découvert une conspiration dans un régiment et on s'attend à en trouver d'autres.
Adieu, mon cher Panizzi; donnez-moi de vos nouvelles.
XXII
Paris, 22 août 1864.
Mon cher Panizzi,
Je voulais donner ma lettre à M. Taylor1, mais je crains qu'il ne soit parti. Je lui ai fait voir la Bibliothèque et lui ai donné des billets pour les Lions. Il vous dira les bêtises de Labrouste à la Bibliothèque. On n'avance guère. La grande salle
1. M. Taylor était'un ami de M. Panizzi.
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A M. PANIZZI
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cependant est presque terminée ; l'architecte a eu le bon esprit de vous piller, mais ailleurs il a voulu perfeclionnér, et il s'est grossièrement fourvoyé. A chaque salle, il y a des marches à monter, ce qui indique peu d'intelligence des besoins d'une bibliothèque. Il y a des armoires trop hautes et des crémaillères insensées. D'ailleurs, on continue le catalogue lentement et dans les vieux errements.
Je suis allé vendredi à Saint-CIoud. On y dansait, mais fort tristement. L'impératrice avait les yeux gros. Elle venait d'apprendre la.mort de la princesse Czartoriska, fille de la reine Christine. L'empereur voulait décommander le bal. Le roi a dit qu'il ne fallait pas faire cette peine aux dames. Madame de Lourmel et madame de Rayne-val m'ont fort demandé de vos nouvelles. Madame de Lourmel s'attendait à recevoir votre portrait en échange du sien : voyez ce qu'il vous convient de faire. J'ai demandé quand on allait à Biarritz; mais la question était inconvenante, à ce qu'il m'a semblé. Il paraît que rien n'est encore décidé. Peut-être n'ira-t-on pas. Si on n'y va pas, c'est sans doute qu'on ira autre part ;
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car vous savez que l'impératrice ne peut souffrir Saint-Cloud. Je ne serais pas surpris qu'on méditât quelque voyage, mais où? Chilo sa?
Je ne doute pas qu'il n'y ait prochainement du tapage en Espagne. Le ministère est faible et n'a pas de généraux. On dit que le ministre de la guerre est une créature d'O' Donnell. Les Concha sont peu bienveillants pour le cabinet actuel. D'autre part, les progressistes ont pour chefs deux hommes qui ne manquent pas de talent, mais qui manquent absolument de scrupules, Prim et Olozagà. Il ne serait pas impossible qu'on profitai de notre présence à Madrid pour nous donner le spectacle d'un pronunciamiento. La chose est assez drôle et vaut la peine d'être vue. J'espère que cela vous décidera à venir.
Parmi le petit nombre de bipèdes qui sont encore à Paris, on fait beaucoup de conjectures sur le voyage du prince Humbert. Il y a des gens qui disent qu'il vient pour la princesse *** et que le pape payera la dot de la mariée. Je ne crois pas à cela, mais vous savez que je suis sceptique.
Ce qui me semble certain et qui doit, avoir donné naissance à ce canard, c'est qu'on n'est pas con-
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tent de Sa Sainteté. Montebello, qui est venu ici, en a conté de toutes les couleurs et dit qu'on lui fait faire un métier peu de son goût. Cette conversion du petit Cohen a mis l'armée de très mauvaise humeur et a fait aussi, je crois, quelque impression en haut lieu.
Adieu, mon cher Panizzi. On s'attend à ce que M. de Bismark jette sa Chambré par la fenêtre. La Prusse et l'Autriche sont fort aigres l'une pour l'autre et les,petits États très irrités; mais tout avorte chez ces gens-là. Si la France et l'Angleterre étaient bien unies, elles pécheraient de beaux poissons dans cette eau trouble.
XXIII
Paris, 5 septembre 1804.
Mon cher Panizzi,
Pendant que vous êtes en villégiature, je tousse et j'étouffe. Il faut absolument qu'on me donne une maison de campagne au bord du Nil, si l'on veut que je, vive. Mes contemporains de-
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vraienl bien se cotiser pour me faire cette galanterie.
Vous m'avez fait rire avec votre indignation aristocratique, contre la possibilité d'une mésalliance dans la maison de Savoie. Je vous ai dit que je n'y croyais pas alors, et j'y crois encore moins aujourd'hui, mais en ma qualité de plébéien, je ne trouverais pas la chose si terrible; je la trouverais même très avantageuse à ladite maison, si à de beaux yeux, et à une peau qui doit être fort douce, se joignait la dot que vous savez. Cela vaudrait la peine d'épouser une négresse.
Tout le monde croit qu'il va y avoir une insurrection à Madrid très prochainement, et peut-être une révolution. En Espagne, on n'obéit qu'à une grande épée, et il n'y en a pas dans le cabinet Mon. Elles ne manquent pas en dehors. Il y a 0' Donnell, Narvaez, les deux Concha et Espartero. Le ministre actuel de la guerre est un pauvre hère, créature dO'D'onnell, mais qui par lui-même ne peut rien. Si Prim et les progressistes, qui ont fait, comme il semble, de nombreuses recrues essayent d'un pronunciamiento, il
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est possible que le cabinet aille à tous les diables et l'innocente Isabelle en même temps. Il y a à Madrid plus de vingt mille Français, artisans, industriels ou réfugiés, qui, un jour d'émeute, fournissent des professeurs de barricades très habiles, ainsi qu'on a pu le voir dans la dernière révolution. C'est à quoi aboutissent souvent les efforts pour faciliter les .communications internationales. Chacun prend les maladies de son voisin.
Tout cela ne devrait pas vous empêcher d'aller avec moi en Espagne. Les étrangers n'ont rien à craindre dans ces occasions-là; ils voient les choses, de près et se forment l'esprit et le cœur.
Je crois que M. Foulcl aura fort affaire pour remettre ensemble des collègues fort désunis. Quel parti prendra-t-on pour la session prochaine, résistance ou concession; c'est ce que personne encore ne sait au juste, peut-être même celui qui décide en dernier ressort.
Les derniers discours de lord Palmerston me
paraissent séniles. Solve senescentem ! Cela res
semble aux dernières années de Louis-Philippe,
ii. k
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lorsqu'il érigeait ses faiblesses en théorie gouvernementale. On dit que lord Russell a écrit de la bonne encre, de son encre particulière, aux Allemands ; ce qui n'est pas probablement le moyen d'arranger les affaires de ce côté.
Adieu, mon cher Panizzi; mille amitiés et compliments. Pendant que vous êtes à la campagne, écrivez] ou promenez-vous.
XXIV
Paris, 20 septembre 18Gi.
Mon cher Panizzi,
M. Childe, que je vous ai déjà présenté, vous expliquera pourquoi il s'est enfui de chez le roi Mausole. Il vous demandera sans doute votre recommandation auprès de sir Richard Maine. Comme il est observateur et grand voyageur, et qu'il tient à connaître à fond what's that, il voudrait bien voir, en compagnie de quelqu'un des plus solides policemen, les curiosités nocturnes
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de Londres, et constater l'utilité des casques. Adieu, je vous écrirai avant de partir.
XXV
Paris, 22 septembre 18G4.
Mon cher Panizzi,
Que diles-vous du traité dont on vient de nous révéler l'existence? À en juger par la fureur des cléricaux, la chose leur déplaît extraordinaire-ment. Le traité a plus d'un* inconvénient, entre autres celui-ci ; que ni la France ni l'Italie ne peuvent l'exécuter dans tous ses articles. Ce qu'il y a de bon, c'est que ce n'est autre chose au fond qu'une signification faite au saint-père d'avoir à faire sa malle. C'est ainsi que le parti prêtre le prend ici. La légation d'Italie prétend que la chose est fort bien vue de l'autre côté des monts.
Cette affaire coïncidant avec le voyage de Schwalbach, on n'a pas manqué de dire : Ergo
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propter hoc. — Je n'en crois rien. Le voyage tient plus probablement à des tracas intérieurs, très fâcheux, mais où la politique n'est pour rien. Vous savez la situation; ce qu'il y a de plus triste, c'est que les badauds se demandent ce qui a pu faire perdre patience à l'homme assurément le plus patient de ce siècle.
X. est à Schwalbach ; on dit qu'il va épouser mademoiselle ***, qui. est un morceau un peu trop bon peut-êlre pour un garçon de son âge. On a le choix, en pareille position, de crever de bonheur en quelques mois, ou d'enrager à la fumée du rôti tout le reste de son existence.
Tous les Espagnols que je vois me garantissent, non pas une émeute, mais une révolution bien complète, sous fort peu de temps.. Narvaez paraît déterminé à pousser les choses à la dernière extrémité, et à rompre en visière avec tout le parti du progrès. Le retour de la reine Christine seul est un défi violent. Si Narvaez tient bien l'armée dans sa main, ce dont je doute, il peut comprimer la première émeute et ne succombera que par défaut d'argent, accident qui, d'ailleurs, est. assez proche, à ce qu'il paraît. Mais l'armée
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est-elle loyale? Narvaez a-t-il encore l'énergie qu'il avait à Ardoz? Tout cela me semble plus que douteux.
Le Times a fait, l'autre jour, sur le Canada un article un peu bien lâche. Je trouve que le cabinet anglais en est venu au point où était arrivé Louis-Philippe sur la fin de son règne, de se vanter de sa couardise et de l'ériger en vertu. Il a grand tort, à mon avis; il ne faut jamais trop se rabaisser, de peur qu'on ne vous prenne au mot.
Adieu, mon cher Panizzi. J'ai loué une maison
à Cannes pour cet hiver, mais vous ne vous
en souciez pas. >
XXVI
Paris, 2 octobre 1864.
Mon cher Panizzi,
Comment avez-vous trouvé votre Muséum et sa docte poussière, en revenant de respirer l'air des champs les plus aristocratiques? Vous avez dû
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retrouver vos sensations d'écolier, lorsque vous rentriez au collège après les vacances.
Je compte aller à Madrid et y rester jusqu'au milieu de novembre, puis m'en revenir à Cannes, où j'ai retenu mon ancienne maison,, sans repasser par Paris, à moins, chose très improbable, qu'on ne me somme de revenir pour le 15 novembre. Je regrette un peu de manquer à mes habitudes et de ne pas fêter la sainte de ce jour; mais, d'un autre côté, j'ai besoin de prendre soin de mes poumons et le dernier séjour a été si triste, que je n'ai pas le goût de revoir les mêmes choses que vous savez.
Dimanche dernier, je suis allé à Saint-Cloud déjeuner, après avoir assisté au saint sacrifice de la messe. On m'a demandé de vos nouvelles comme toujours. Le prince a mal à ses dents de sept ans. Il est, d'ailleurs, en très bonne condition, ne grandissant pas beaucoup, mais prenant des muscles. L'impératrice est un peu souffreteuse à Schwalbach, dont elle se trouve bien, quoiqu'elle ait toujours des vomissements comme avant son départ.
Ce qu'on dit de contes et de bêtises au sujet
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de ce voyage est prodigieux. Ce qui l'est encore davantage, c'est que des gens sérieux et crus tels croient toutes ces bourdes qu'on débite. On parle entre autres d'une visite of her Majcsty à mademoiselle ***, pour la prier de ne plus demeurer à Montretout, attendu qu'on était affligé de voir sa maison des fenêtres de Saint-Cloiul.
11 paraît qu'il y a eu répression assez rude à Turin. Cent soixante personnes ont été tuées dont cinq soldats. Les rues sont droites, et les balles coniques vont loin. Il semble, d'ailleurs, que le ministère a été fort imprudent dans toute l'affaire et n'a rien fait pour éviter l'émeute en préparant un peu les esprits. A ce qu'il me semble, il n'y a que les exagérés des deux camps qui se plaignent du traité. Je crois qu'en l'exécutant de bonne foi, on rendra la place intenable pour le pape, qui, d'ailleurs, mourra probablement avant le terme fixé.
Les changements ministériels qu'on attendait n'auront pas lieu. Drouyn de l'Huys a fait galamment le sacrifice de ses anciennes opinions, et il n'y a plus lieu de lui faire la guerre. Je ne sais quand la session commencera, probablement vers
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le mois de février. Elle s'annonce mieux que la précédente qui pourtant n'a pas été mauvaise. Thiers est devenu à peu près républicain, vraisemblablement parce qu'il espère être nommé président à son tour. Je le regarde comme enfourné dans une voie déplorable dont il ne sorlira plus que par une catastrophe.
Un certain M. X., très connu à Paris, a été surpris l'autre jour avec des gamins habillés les uns en femmes, les autres en abbés, il y en avait un en évoque. On dit qu'il a pris la fuite.
Adieu, mon cher Panizzi; je vous écrirai encore une fois avant de me mettre en route.
XXVII
Madrid, casa de la
Exma S* condesa del Montijo,
11 octobre 18G4.
Mon cher Panizzi,
Me voici à Madrid depuis quelques heures seulement et, ne pouvant dormir, je vous écris. Ce voyage, en vérité, n'est plus une grande fatigue
LETTRES A M. PA'NIZZI 5T
i
comme autrefois. Plus de passeports et un chemin de fer assez bon qui vous mène de Bayonnè-ici en seize heures. Quand les employés sauront mieux leur mélier,on pourra faire le trajet en dix heures.
Au point de vue de la politique, les affaires sont meilleures vues de près que de loin. Le ministère Mon, qui était une coalition, est tombé devant une-i autre coalition. Le cabinet Narvaez a l'air assez-solide, et sa vieille réputation d'énergie a fait de l'effet sur les ultra-progressistes tapageurs. Reste-à savoir ce qu'il deviendra à l'user et comment. il se conduira devant les Cortès. Il a deux mois-pour s'y préparer, et on a ici comme en tout pays constitutionnel des recettes pour faire parler dans les élections.la voix du peuple : vox popidï vox Dei. Narvaez flatte les journalistes et les, gens qui aiment les places. C'est un assez bon moyen de réussir. Le toute façon, je ne crois plus-que je verrai un pronunciamiento de ma fenêtre. En quittant Paris, vendredi dernier, j'ai vu notre amie de Biarritz. J'ai eu une petite conversation de quatre heures, dont vous pouvez deviner le thème. Elle avait besoin de sfogarsi. Tout est
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