Maîtrise d'Histoire (1973) michele grenot


D’où les difficultés de sa carrière



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D’où les difficultés de sa carrière


Cette indépendance de caractère entraîne pour WALLON des difficultés dans sa carrière :

Cette dualité de WALLON a pu lui nuire à certains moments de sa carrière : nous avons parlé de ses difficultés à "faire carrière" dans l'Université, des reproches qui lui furent adressés, comme professeur, écrivain ou homme politique, ses échecs à l'Académie Française, ses difficultés à l'élection du Sénat en décembre 1875, etc.

En octobre 1875, Le XIXème siècle écrit :

"Pauvre, pauvre M.WALLON ! II lui aurait fallu si peu pour satisfaire les libéraux français en général, les universitaires en particulier ! . . . En revanche, les cléricaux ne seront jamais contents quoiqu'on fasse pour leur service. ..100000 églises ne leur suffiront pas, s'ils n'ont pas la force en main pour y traîner les dissidents et les philosophes. "

En effet, nous avons vu WALLON être rejeté à différentes occasions par des groupes qu'il affectionnait pourtant : les universitaires, les libéraux, les catholiques.

Mais aussi c'est par cette indépendance d'opinions que WALLON est amené à faire l'unanimité.

A sa mort, la presse, les personnalités du monde politique, académique et universitaire sont unanimes à le respecter, malgré ses tendances politiques ou religieuses. Quand le président du Sénat demande de lever la séance en signe de deuil, le lendemain de la mort de WALLON, la séance est levée à l'unanimité.

Ils considèrent l'ensemble des activités politiques sur toute sa vie et ne retiennent plus que ce qu'elle a de positif à leurs yeux. J. CORNELY, dans son article dans le journal Le Siècle (journal libéral qui a été sous la direction de J. SIMON), donne une explication assez juste sur cette unanimité quant à l'éloge de WALLON à sa mort : celle-ci est due, selon lui, à la conjoncture politique : l'évolution de la république vers l'anticléricalisme, l'opposition se regroupe dans le cléricalisme et reconnaît WALLON comme un catholique faisant l'ombre sur le libéral. Les anticléricaux, eux, mettant la lumière sur le libéral.

"M. WALLON a dû aux circonstances actuelles l'avantage d'avoir une bonne presse à sa mort," dit J. CORNELY, "en admettant que le fait soit un avantage et que les hommes politiques raisonnables n'emportent pas dans leur cercueil l'habitude qu'ils ont été obligé de contracter de leur vivant de mépriser et de tenir pour nul et non avenu tout ce qu'on peut dire et écrire d'eux. S'il était mort plus tôt, quand il y avait encore des partis d'opposition, sa mémoire eut été maudite par eux comme celle d'un homme leur ayant barré la route. Mais il n'y a plus de partis politiques d'opposition. La République s'étant jusqu'à un certain point confondue avec l'anticléricalisme, les opposants dynastiques ont fusionné dans le cléricalisme, en vertu de la vieille règle qui préside à la répartition des sympathies humaines : les ennemis de nos ennemis sont nos amis. Le cléricalisme, couvrant donc toutes les oppositions, a dû arborer un mot d'ordre qui les satisfasse toutes. Ce mot d'ordre a été habilement choisi dans le magasin des formules républicaines : c'est le mot "liberté". . Les nécrologues disent donc de M.WALLON : celui-là aima la liberté. . . Ils ont d'ailleurs raison. Le père WALLON aima la liberté ! . . . et j'ajouterai que la cause de nos difficultés actuelles est précisément que M.WALLON n'ait pas été tiré à un plus grand nombre d'exemplaires. S'ils avaient été seulement 300 comme lui, catholiques fervents et républicains convaincus, il se serait formé un parti républicain catholique avec lequel les autres fractions républicaines eussent dû compter et aujourd'hui l'on ne songerait pas le moins du monde à séparer l'Eglise et l'Etat. La qualité de républicain et celle d de catholique sont restées incompatibles. Voilà le mal !"

La conciliation entre républicains et catholiques n'était-ce pas le rêve de WALLON ? Néanmoins, à la mort de WALLON, le ministère COMBES est bien loin. La majorité obtenue le 30 janvier 1875 par WALLON a basculé.


WALLON conciliateur


Pour la postérité, cependant, WALLON n'est ni un républicain, ni un catholique, mais l'homme qui a concilié les Français en 1875 en instaurant la République. C'est l'homme de l'Amendement et non l'historien, l'universitaire catholique, et nous pouvons dire en conclusion que c'est justement cette indépendance du personnage WALLON qui l'a mené à jouer ce rôle : de gauche et de droite, à la fois, libéral et conservateur à la fois.

Il est assez révélateur que deux revues satiriques républicaines, La Ménagerie Républicaine et Le Trombinoscope font de WALLON avant tout l'homme de la conciliation. La Ménagerie Républicaine, avec un texte de Léo TAXTIL et un dessin de J. BLASS représente, dans sa ménagerie d'hommes politiques de la IIIème République, WALLON en castor :



"Le castor constitutionnel est une variété très intéressante du genre castor, l'un des plus remarquables des mammifères rongeurs. "

"Variété politique de l'espèce, il s'est signalé par un travail de construction, tout auprès des grandes pièces d'eau de Versailles.

Notre castor, sans être d'un aspect élégant, se tient néanmoins avec beaucoup de propreté. Son pelage est fin et doux, et toujours soigneusement lustré. Très bien organisé pour nager entre deux eaux, il peut, au sein des fleuves parlementaires, se tenir dans la limpidité de la surface conservatrice et plonger dans les bas-fonds boueux de la démagogie ; mais il préfère les hautes eaux, et s'il descend parfois au fond du fleuve, c'est parce que la vase qu'il y recueille lui est nécessaire pour construire la hutte à laquelle il a laissé son nom. "

Pour Léo TAXTIL, la Constitution WALLON est un compromis.



"Voici comment le castor procède pour exécuter les travaux qui lui ont donné une réputation méritée :

Après un grand bouleversement social, il s'établit sur la rive droite d'un fleuve parlementaire mais en choisissant de préférence le centre d'un endroit à l'abri du courant. Il protège d'abord ces parages au moyen d'une digue qu'il construit très solidement, et pour laquelle il entrelace avec une habileté merveilleuse des branches arrachées aux arbres de droite et de gauche ; ces branchages ainsi réunis, il confectionne une sorte de mortier politique composé d'une dose modérée de sable conservateur et d'une forte quantité de limon radical. Ce mortier ne vaut pas, certes, le ciment romain, mais il offre néanmoins une certaine résistance aux flots parlementaires, même en cas de crue monarchique, à la condition que les matériaux ayant servi à bâtir la digue soient bien tassés et bien unis. Toutefois, en cas de débordement révolutionnaire socialiste, la digue pourrait être emportée, mais ce cas ne s'est pas encore produit ; cette digue est qualifiée de constitutionnelle ; l'eau, qu'elle entoure en partie, demeure désormais stagnante et n'est troublée que par les agitations révisionnistes. "

Cette comparaison de la part d'un républicain est intéressante : il reconnaît le rôle joué par WALLON dans la Constitution, cependant il doute de la stabilité de celle-ci. Il ne craint pas un retour à la monarchie, là est la grande victoire de WALLON pour les républicains, sa Constitution a résisté aux oppositions diverses de la monarchie. Cependant, Léo TAXTIL envisage peut-être un jour un bouleversement révolutionnaire socialiste : les agitations révisionnistes en sont les signes avant-coureurs

Le Trombinoscope par TOUCHATOUT attribue aussi à WALLON cette qualité de conciliateur :

"Un trait particulier de son caractère devait beaucoup plus contribuer à illustrer son nom que toutes ses autres qualités réunies : un désir violent de concilier les choses qui semblaient les plus inconciliables ; c'était une véritable passion chez cet enfant studieux et intelligent ; il déployait un véritable talent presque de génie, pour atteindre son but le plus cher : la conciliation à outrance Pour y parvenir, il usait de toutes les adresses, de toutes les ruses, de tous les stratagèmes imaginables, arrachant une concession à celui-ci, une autre à celui-là, ne se rebutant jamais, rédigeant les compromis les plus habiles et prouvant à chacune des parties opposées que ce compromis lui donnait une entière satisfaction. . . II arrivait toujours à son but et raccommodait ensemble des êtres qui, sans lui, se fussent tourné le dos pendant toute leur vie Dire que cela tenait toujours très bien et très longtemps ! . .. non ! . .. Mais enfin, il avait fait son devoir. Et puis, si l'on se refâchait, il se remettait avec courage à préparer le nouveau rapprochement. "

"Les événements qui devaient plus tard se dérouler en France destinaient infailliblement le jeune WALLON à jouer un rôle politique important ; un tel amour pour la conjonction ne pouvait manquer d'être utilisé à une époque où il est presque aussi impossible de faire une majorité dans la salle du théâtre de Versailles que de se défaire d'un billet de faveur pour celui de la Renaissance. "

Léo TAXTIL utilise différentes comparaisons pour illustrer ce trait de caractère : l'art de la sauce : faire avaler par des gens natifs et de bonne volonté les produits comestibles les plus contraires en disant : "Tiens, mais ce n'est pas encore trop mauvais". Ou encore l'art "de mélanger les couleurs : il corsait les nuances tendres, éteignant les tons vifs et criards. " Ou encore "il avait tenté de faire vivre en bonne intelligence un chien, un chat et un serin. Ce ménage à trois semblait impossible à organiser et cependant, à force de patience, M. WALLON a été sur le point de réussir."



"Toujours plein d'adresse et de ténacité, il sema des promesses ici, obtint des concessions là, et sut enfin limer, polir, adoucir avec tant d'habileté les coins de tous les articles d'une constitution genre mosaïque qu'un jour le chien, le chat et 1e serin, à moitié engourdis,- ensommeillés par ce bourdonnement incessant qui leur était jusqu'à la conscience de leurs situations respectives, crurent enfin être tombés d'accord. Le réveil ne tarda pas, et comme toutes les concessions qui n'ont pas pour base la clarté, la droiture et la loyauté, le Wallonat sombra dès le lendemain. Ni le chien, ni le chat, ni le serin n'y trouvaient leur compte. Tout récemment, M. WALLON a de nouveau tenté la même épreuve. Au moment où nous mettons sous presse, nous ignorons le résultat de cette courageuse expérience."

L'article est de février 1875. Après bien des déboires dont parle Léo TAXTIL, nous savons que la Constitution sera votée : elle comprend l'Amendement WALLON sur l'organisation des pouvoirs publics et celui sur l'organisation du Sénat qui finalement obtient aussi la majorité.

Mais Léo TAXTIL n'est pas très élogieux quant à la Constitution, il fait une quatrième comparaison :

"En somme, M.WALLON est le plus honnête homme du monde. Il fait consciencieusement de la mauvaise marqueterie pour de la bonne politique, voilà tout."

Homme de la conciliation, WALLON en 1875 est devenu célèbre : il a alors 63 ans. WALLON mourra en 1904. Pendant ces 29 ans qui lui restent à vivre, à en juger le témoignage de CROISET, "c'est alors une personnalité et celui-ci souligne la vénération personnelle dont il était de plus en plus environné, sans cesse grandie par le triple prestige de l'âge, du travail et de la parfaite honnêteté. "

Triple prestige de l'âge, du travail et de la parfaite honnêteté.

L'Eclair, le 14 novembre 1904 à la mort de WALLON écrit :



"Nul n'a le droit d'oublier. . . ce vieillard éminent, savant professeur, historien réputé, homme politique honnête..."

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