Séance 4 : Les procédures d’urgence Le référé


Les faits et la procédure



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Les faits et la procédure
19. CHS est titulaire d'une AMM (autorisation de mise sur le marché) d'un médicament contenant de la phentermine. Les faits qui sont à l'origine du recours sont exposés dans l'ordonnance attaquée comme suit:

«9    Le 17 mai 1995, la République fédérale d'Allemagne a saisi le CSP, conformément à l'article 12 de la directive 75/319 telle que modifiée par la directive 93/39, en faisant état de ses craintes à l'égard des anorexigènes, au nombre desquels figurent des médicaments contenant de la phentermine, susceptibles de provoquer une grave hypertension artérielle pulmonaire.

10  La procédure initiée par cette saisine a conduit à l'adoption de la décision C(96) 3608 de la Commission, du 9 décembre 1996, [ci-après la 'décision du 9 décembre 1996‘] fondée sur l'article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive 75/319, enjoignant aux États membres de modifier certaines informations cliniques qui devaient figurer dans les autorisations nationales de mise sur le marché des médicaments en question.

11  Par lettre du 7 novembre 1997, adressée au président du CSP, le ministère des Affaires sociales, de la Santé publique et de l'Environnement belge a exprimé, notamment, sa crainte de l'existence d'une relation causale entre des dysfonctionnements de la valve cardiaque et la prise de médicaments contenant de la phentermine. Il a, en conséquence, demandé au CSP, conformément aux articles 13 et 15 bis de la directive 75/319, d'émettre un avis motivé à propos des médicaments concernés.

12  Le 22 avril 1999, le CSP a rendu un avis sur l'évaluation scientifique des médicaments contenant de la phentermine et a recommandé le retrait des autorisations de mise sur le marché desdits médicaments. La requérante a fait appel de cet avis. Une audition à cet égard a eu lieu en date du 28 juillet 1999. Dans son avis final, rendu le 31 août 1999, le CSP est arrivé à la conclusion que, même si les inquiétudes exprimées par le ministère belge ne peuvent pas totalement être exclues, aucun élément ne permet de les étayer. Toutefois, il a conclu que les médicaments contenant de la phentermine présentaient une balance bénéfices/risques défavorable et a recommandé que soient retirées les autorisations de mise sur le marché desdits médicaments.

13 Sur la base de cet avis, la Commission a adopté le 9 mars 2000 la décision concernant le retrait des autorisations de mise sur le marché des médicaments à usage humain qui contiennent la substance suivante: 'phentermine‘ [...] L'article 2 de la décision attaquée fait référence aux appréciations énoncées par le CSP dans cet avis. L'article 3 prévoit que les États membres retirent les autorisations de mise sur le marché pour tous les médicaments visés dans l'annexe I de la décision attaquée dans les 30 jours suivant la date de notification de ladite décision.»

20. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 22 mai 2000, CHS a saisi le Tribunal d'un recours en vertu de l'article 230, quatrième alinéa, CE tendant à l'annulation de la décision attaquée.
21 Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, CHS a formé une demande de sursis à l'exécution de la décision attaquée ainsi qu'une demande fondée sur l'article 105, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, tendant à ce qu'il soit statué de manière urgente sur cette demande de sursis à exécution.
22. Le 20 juillet 2000, le président du Tribunal a accueilli la demande fondée sur l'article 105, paragraphe 2, du règlement de procédure et ordonné que, jusqu'au prononcé de l'ordonnance mettant fin à la procédure de référé, il soit sursis à l'exécution de la décision attaquée.

(…)


L'ordonnance attaquée
25. Par l'ordonnance attaquée, le président du Tribunal a fait droit à la demande de CHS et a ordonné le sursis à l'exécution de la décision attaquée en ce qui concerne cette société.
26. Le juge des référés a considéré que la condition relative au fumus boni juris était satisfaite en l'espèce. À cet égard, il a fait état, au point 34 de l'ordonnance attaquée, des considérations suivantes:

«34 S'agissant du fumus boni juris, il y a lieu de constater que les moyens soulevés par la requérante ne semblent pas, à première vue, dépourvus de tout fondement. D'une part, il apparaît notamment que la compétence de la Commission pour adopter la décision attaquée est conditionnée par la nature de la décision du 9 décembre 1996 qui est sujette à débat. D'autre part, la Commission n'a pas apporté d'éléments convaincants permettant de comprendre la raison pour laquelle cette dernière décision et la décision attaquée aboutissent à des résultats diamétralement opposés. Les moyens avancés par la requérante méritent donc de faire l'objet d'un examen approfondi qui dépasse toutefois, en fait et en droit, le cadre de la présente procédure de référé.»

27. S'agissant de l'urgence, le juge des référés a conclu que le dommage que pourrait occasionner l'exécution immédiate de la décision attaquée présente un caractère grave et irréparable. Pour parvenir à cette conclusion, il s'est fondé sur les considérations suivantes:

«43    En l'espèce, l'exécution immédiate de la décision attaquée implique le retrait complet du marché des médicaments visés par l'article 1er de cette décision. De ce fait, elle implique que, s'il n'est pas sursis à l'exécution de la décision attaquée, les médicaments de substitution, dont l'existence est reconnue par les deux parties, vont fort probablement remplacer les médicaments retirés. Même si les déclarations selon lesquelles le médicament retiré présente un danger pour la santé du patient sont réfutées par la suite, il est souvent impossible de restaurer la confiance dans le produit, sauf dans des cas particuliers, à savoir lorsque les qualités du médicament sont particulièrement bien appréciées des utilisateurs et qu'il n'existe pas de parfait produit de substitution ou si le producteur jouit d'une réputation exceptionnellement bonne, de telle sorte qu'il ne peut pas être affirmé qu'il ne pourra plus reconquérir les parts de marché qu'il détenait avant le retrait. Toutefois, de tels cas particuliers n'existent pas en l'occurrence.

44    En outre, dans l'hypothèse d'une annulation de la décision attaquée par le Tribunal autorisant de la sorte la requérante à commercialiser à nouveau son médicament, le préjudice financier encouru par elle en raison de la diminution des ventes consécutive à une perte de confiance à l'égard de son médicament ne pourrait en réalité être quantifié de manière suffisamment complète aux fins de sa réparation.»

28. En ce qui concerne la balance des intérêts, le juge des référés a constaté qu'elle penche, en l'espèce, en faveur du sursis à l'exécution de la décision attaquée, en se fondant sur les considérations suivantes:

«49    En effet, il semble fort probable que l'exécution de la décision attaquée aurait pour conséquence la perte définitive pour la requérante de sa position sur le marché, même si le juge au fond annule la décision attaquée.

50  À l'encontre des intérêts commerciaux de la requérante, la Commission fait valoir que le sursis à l'exécution de la décision attaquée pourrait porter atteinte à la santé publique. À cet égard, il importe de souligner que, en principe, les exigences liées à la protection de la santé publique doivent incontestablement se voir reconnaître un caractère prépondérant par rapport aux considérations économiques (ordonnance [de la Cour du 12 juillet 1996,] Royaume-Uni/Commission, [C-180/96 R, Rec. p. I-3903], point 93; arrêt de la Cour du 17 juillet 1997, Affish, C-183/95, Rec. p. I-4315, point 43; ordonnance du Tribunal du 15 septembre 1998, Infrisa/Commission, T-136/95, Rec. p. II-3301, point 58, et ordonnance du président du Tribunal du 30 juin 1999, Alpharma/Conseil, T-70/99 R, Rec. p. II-2027, point 152).

51    Toutefois, il doit être noté que, dans ce cadre, la référence à la protection de la santé publique ne saurait, à elle seule, exclure un examen des circonstances de l'espèce et, notamment, des faits qui s'y rattachent.

52    En l'espèce, la Commission a bien établi qu'il existe des incertitudes en ce qui concerne les risques associés aux médicaments contenant de la phentermine, même si ces risques sont légers. Néanmoins, alors que la décision du 9 décembre 1996 et la décision attaquée sont fondées sur des données tout à fait identiques, les mesures prises par la Commission en 1996 et en 2000 pour la sauvegarde de la santé publique à l'égard de ces risques divergent fondamentalement. Dans ces circonstances, la Commission était tenue de démontrer que les mesures de sauvegarde contenues dans la décision du 9 décembre 1996 se sont avérées insuffisantes pour protéger la santé publique, de telle sorte que les mesures de protection qu'elle a prises par la décision attaquée ne sont pas manifestement démesurées. La Commission n'est toutefois pas parvenue à en faire la démonstration.

53    En outre, il convient d'observer que le fait que les risques pour la santé ayant déterminé l'adoption de la décision attaquée avaient déjà été pris en compte dans la décision de la Commission du 9 décembre 1996 et avaient donné lieu à une modification des informations obligatoires concernant les médicaments prescrits sur ordonnance indique que la mise en œuvre de la décision attaquée n'est pas urgente.»

Le pourvoi

(…)


Appréciation

(…)


53. Il convient d'examiner tout d'abord le moyen tiré de la dénaturation du contenu de la décision attaquée.
54. À cet égard, il ressort de la motivation de l'ordonnance attaquée relative tant au fumus boni juris qu'à la balance des intérêts que les considérations suivantes ont revêtu un caractère déterminant dans le raisonnement du juge des référés:

-    «[...] la Commission n'a pas apporté d'éléments convaincants permettant de comprendre la raison pour laquelle [la décision du 9 décembre 1996] et la décision attaquée aboutissent à des résultats diamétralement opposés» (point 34);

-    «[...] alors que la décision du 9 décembre 1996 et la décision attaquée sont fondées sur des données tout à fait identiques, les mesures prises par la Commission en 1996 et en 2000 pour la sauvegarde de la santé publique à l'égard de ces risques divergent fondamentalement. Dans ces circonstances, la Commission était tenue de démontrer que les mesures de sauvegarde contenues dans la décision du 9 décembre 1996 se sont avérées insuffisantes pour protéger la santé publique, de telle sorte que les mesures de protection qu'elle a prises par la décision attaquée ne sont pas manifestement démesurées» (point 52);

-    «[...] les risques pour la santé ayant déterminé l'adoption de la décision attaquée avaient déjà été pris en compte dans la décision de la Commission du 9 décembre 1996 et avaient donné lieu à une modification des informations obligatoires concernant les médicaments prescrits sur ordonnance» (point 53).

55. Il y a lieu de constater que ces appréciations ne reposent pas sur une analyse, même sommaire, de la motivation de la décision attaquée telle qu'elle figure à l'annexe II de cette dernière, à laquelle renvoie son article 2.

(…)
64. Force est de constater que, dans ses appréciations concernant le fumus boni juris et la balance des intérêts, l'ordonnance attaquée ne fait nullement état des considérations qui se trouvent dans la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne le changement des critères scientifiques d'évaluation des médicaments destinés au traitement de l'obésité et l'absence d'effet thérapeutique des médicaments contenant de la phentermine.


65. Or, un tel changement apparaît, selon les termes mêmes de la décision attaquée, comme un élément déterminant pour l'évaluation desdits médicaments par le CSP et par la Commission.
66. En outre, en raison de cette omission, les risques auxquels les points 52 et 53 de l'ordonnance attaquée font référence ne concernent que la nocivité du médicament prise isolément, sans que celle-ci soit mise en rapport avec l'absence d'effet thérapeutique de celui-ci.
67. Il résulte de ce qui précède que, dans la mesure où elle révèle une absence de prise en considération des aspects essentiels de la motivation de la décision attaquée et, partant, une dénaturation du contenu de celle-ci, l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de droit.
68. Dès lors, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens du pourvoi, il convient de faire droit à celui-ci et d'annuler l'ordonnance attaquée.
69. En vertu de l'article 54, premier alinéa, du statut CE de la Cour de justice, lorsque le pourvoi est fondé, la Cour annule la décision du Tribunal. Elle peut alors soit statuer elle-même directement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d'être jugé, soit renvoyer l'affaire devant le Tribunal pour qu'il statue. L'affaire étant en état d'être jugée, il y a lieu de statuer définitivement sur la demande en référé.

Sur la demande en référé

Sur le fumus boni juris

(…)


75. Dans le cadre de l'appréciation du fumus boni juris des demandes de sursis à exécution, il n'appartient pas au juge des référés de se prononcer à titre définitif sur l'interprétation des dispositions applicables au litige.
76. Sous cette réserve, force est de reconnaître que, même si la décision du 9 décembre 1996 n'a pas précédé la délivrance des AMM nationales, il ne saurait être inféré de cette circonstance que les États membres disposaient, après l'adoption de cette décision, d'une liberté absolue en ce qui concerne le maintien de ces AMM nationales, au risque de réduire à néant l'harmonisation à laquelle ladite décision a procédé. À première vue, la thèse de CHS priverait d'effet utile les décisions de la Commission concernant des AMM déjà délivrées, adoptées selon la procédure prévue aux articles 13 et 14 de la directive 75/319.
77. Par ailleurs, il ressort du point 63 de la présente ordonnance que, même si la saisine du CSP était motivée par des considérations tenant à la nocivité du médicament contenant de la phentermine, la décision qui met fin à la procédure prévue aux articles 13 et 14 de la directive 75/319 peut, à première vue, tenir compte de la question de savoir si les bénéfices du médicament continuent de l'emporter sur ses effets nocifs.
78. Il en résulte que les arguments invoqués par CHS ne semblent pas établir, en première analyse, que la Commission n'aurait pas été compétente pour adopter la décision attaquée.
79. En deuxième lieu, CHS fait valoir que la procédure suivie en l'espèce devant le CSP et la Commission est caractérisée par une infraction grave aux règles de forme en ce que la procédure d'adoption de la décision attaquée a connu des retards excessifs à tous les stades et les délais fixés dans la directive 75/319 n'ont pas été respectés. CHS ajoute que, l'issue de la procédure ayant été déterminée d'avance et des informations pertinentes lui ayant été cachées, elle a été privée du droit de défendre effectivement ses intérêts au moment où, avant de rendre son premier avis, le CSP a examiné l'affaire. En particulier, CHS relève que, antérieurement au premier avis du CSP, elle n'a jamais été informée du fait que ce dernier envisageait de recommander le retrait de la phentermine pour des raisons d'efficacité alors que, en fin de compte, celles-ci constituent le seul motif pour lequel le retrait a été recommandé. Ces lacunes auraient violé des garanties procédurales fondamentales et n'auraient pas été purgées par les voies de recours ouvertes aux stades ultérieurs de la procédure.

(…)


82. Il convient de relever que, au terme d'une première analyse, il ne semble pas résulter des termes des articles 13 et 14 de la directive 75/319 que les délais dont le dépassement est critiqué par CHS présentent un caractère impératif. Cette dernière ne précise aucunement quel préjudice concret aurait été causé par les retards constatés ni dans quelle mesure ceux-ci auraient un effet quelconque sur les droits de la défense ou sur le contenu de la décision attaquée.
83. En outre, il ressort du dossier, d'une part, que CHS, qui a été invitée à fournir des données sur l'efficacité de son médicament dès le début de la procédure, a présenté des observations orales devant le CSP avant qu'il n'émette son premier avis et, d'autre part, qu'elle a pu prendre position sur celui-ci et a donc été en mesure de défendre son point de vue avant l'adoption de l'avis final du CSP.
84. Dans ces conditions, les arguments de CHS ne parviennent pas à établir, au vu d'une première analyse, que les irrégularités formelles invoquées auraient porté atteinte à ses droits de défense ou auraient eu le moindre effet sur le résultat de la procédure.
85. En troisième lieu, CHS allègue que la décision attaquée méconnaît les articles 11 et 21 de la directive 65/65 fixant les conditions de retrait d'une AMM. En l'espèce, pour ordonner le retrait de l'AMM dont est titulaire CHS, il faudrait établir soit que les médicaments contenant de la phentermine sont nocifs, soit qu'ils n'ont aucun effet thérapeutique ou encore qu'ils ne possèdent pas la composition qualitative et quantitative déclarée. En méconnaissance de l'article 11 de la directive 65/65, la Commission aurait recouru à un critère totalement différent, à savoir la balance bénéfices/risques.

(…)


87. À cet égard, il convient de constater que la motivation de la décision attaquée, dont l'avis du CSP fait partie intégrante, indique que celle-ci est fondée sur l'absence d'efficacité thérapeutique des médicaments contenant de la phentermine.
88. En outre, ainsi qu'il ressort du point 63 de la présente ordonnance, l'exigence selon laquelle les bénéfices du médicament doivent l'emporter sur ses effets nocifs n'est pas uniquement applicable lors de l'octroi de l'AMM, mais elle peut également justifier le retrait de celle-ci, le rapport bénéfices/risques devant être évalué aussi après que l'AMM est délivrée, comme le précise expressément l'introduction de l'annexe de la directive 75/318.
89. En quatrième lieu, CHS fait valoir que la décision viole l'article 253 CE en ce qu'elle se borne à adopter l'avis du CSP sans autres raisons ni explications, et ce nonobstant les vices juridiques et scientifiques dont est entaché ledit avis, lesquels ont été exposés à la Commission par CHS et les autres titulaires d'AMM de médicaments contenant de la phentermine.

90. Sans préjudice de l'analyse de la motivation de la décision attaquée qui devra être effectuée par le juge saisi du fond, il suffit de constater que, selon l'article 14 de la directive 75/319, ce n'est que dans le cas exceptionnel où le projet de décision de la Commission n'est pas conforme à l'avis du CSP que la Commission doit expliquer en détail les raisons des différences existant entre sa décision et ledit avis. Dans ce contexte, le fait que la Commission a fait sien l'avis du CSP n'apparaît pas, au terme d'une première analyse, de nature à établir que la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation.


91. En dernier lieu, CHS soutient que la Commission a violé le principe de la répartition de la charge de la preuve en ne respectant pas la règle selon laquelle la charge de la preuve des motifs du retrait mentionnés dans la décision attaquée doit peser sur les autorités compétentes. La Commission aurait attendu que les titulaires d'AMM concernés apportent des preuves appropriées de l'efficacité de la phentermine alors qu'elle aurait dû prouver elle-même l'inefficacité de cette substance. CHS reproche en outre à la Commission d'avoir commis une erreur manifeste d'appréciation. Elle fait valoir que les conclusions de cette dernière concernant la sécurité et l'efficacité du médicament en cause, conclusions fondées sur l'avis du CSP, ne sont pas étayées par les pièces en possession de celui-ci et de la Commission, notamment les lignes directrices citées dans la décision attaquée. Ni la Commission ni le CSP n'auraient indiqué que de nouveaux éléments étaient apparus depuis 1996, époque à laquelle ce dernier avait estimé que la phentermine était efficace et non dangereuse et avait, dès lors, recommandé d'autoriser la mise sur le marché de cette substance, recommandation qui fut suivie par la Commission.

(…)


93. À cet égard, il convient tout d'abord de constater que, contrairement à ce que prétend CHS, la décision du 9 décembre 1996 n'a pas qualifié la phentermine de substance «non dangereuse». Au contraire, dans cette décision, la Commission faisait état d'un certain nombre d'effets nocifs.
94. Ensuite, sans préjuger l'analyse que le juge saisi du fond devra effectuer en ce qui concerne la portée des lignes directrices citées dans la décision attaquée, il convient de relever que la plupart de celles-ci sont postérieures à 1996 et qu'elles n'ont donc pas été prises en considération par la Commission dans sa décision du 9 décembre 1996.
95. Enfin, il y a lieu de relever que les arguments de CHS, rappelés au point 91 de la présente ordonnance, concernent principalement la manière dont la Commission a mis en œuvre la marge d'appréciation dont elle dispose pour évaluer la nécessité d'une mesure de retrait d'une AMM. En effet, il est constant que toute décision de retrait d'une AMM qui est prise en application de la procédure prévue aux articles 13 et 14 de la directive 75/319 doit respecter les conditions de fond qu'exige l'article 11 de la directive 65/65, conditions qui sont relatives à l'efficacité, à la sécurité et à la qualité du médicament. Ce type de décision est donc le résultat d'appréciations complexes relevant du domaine médico-pharmacologique.
96. En principe, de telles appréciations font l'objet d'un contrôle juridictionnel restreint. En effet, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, lorsqu'une autorité communautaire est appelée, dans le cadre de sa mission, à effectuer des évaluations complexes, elle jouit de ce fait d'un large pouvoir d'appréciation, dont l'exercice est soumis à un contrôle juridictionnel limité, qui implique que le juge communautaire ne saurait substituer son appréciation des éléments de fait à celle de ladite autorité. Ainsi, ce dernier se limite, en pareil cas, à examiner la matérialité des faits et les qualifications juridiques que cette autorité en déduit et, en particulier, si l'action de cette dernière n'est pas entachée d'une erreur manifeste ou de détournement de pouvoir, ou si cette autorité n'a pas manifestement dépassé les limites de son pouvoir d'appréciation (voir, concernant le retrait d'une AMM d'un médicament, arrêt Upjohn, précité, point 34).
97. En l'espèce, il n'apparaît pas, à première vue, que la décision attaquée, fondée sur l'avis du CSP, soit entachée d'une erreur manifeste ou d'un détournement de pouvoir ni que la Commission ait manifestement excédé les limites de son pouvoir d'appréciation.
98. Il ressort de ce qui précède que, sans préjudice des appréciations à effectuer dans le cadre de l'examen du recours sur le fond, les moyens articulés par CHS dans le cadre de la procédure en référé ne l'emportent pas, au terme d'un premier examen, sur ceux dont se prévaut la Commission à l'appui de la légalité de la décision attaquée.
99. Néanmoins, dans la mesure où les moyens invoqués par CHS n'apparaissent pas dépourvus de tout fondement, le sursis sollicité ne saurait être rejeté au terme de l'examen du fumus boni juris sans que soient également examinées l'urgence invoquée et la balance des intérêts en présence.

Sur l'urgence et la mise en balance des intérêts

100. CHS fait valoir que, s'il n'est pas sursis à l'exécution de la décision attaquée, elle subira un préjudice grave et irréparable.


101. En particulier, elle soutient que le retrait de l'AMM du médicament contenant de la phentermine aurait pour conséquence que, même lorsque le retrait de l'autorisation aura été annulé, une réintroduction du médicament concerné, dans les mêmes conditions, ne sera pas possible puisqu'il s'avérera très difficile, et souvent impossible, de réimplanter sur le marché un médicament qui a disparu pendant une longue période. CHS allègue également que, si le sursis n'était pas accordé, elle devrait introduire une nouvelle demande d'AMM, même dans l'hypothèse où la décision attaquée serait annulée. Par conséquent, elle serait amenée à effectuer de longs essais cliniques sur ledit médicament, dont la durée, compte tenu du travail préparatoire, s'élèverait à deux années au moins.
102. Elle ajoute qu'elle n'est qu'une petite société pharmaceutique pour laquelle le médicament contenant de la phentermine constitue le premier produit qu'elle a acquis, lequel représente 35 à 40 % de son chiffre d'affaires. Selon CHS, si le sursis à l'exécution de la décision attaquée n'était pas octroyé, il est très douteux qu'elle puisse survivre en tant que société.
103.  CHS invoque également les dommages qui seraient causés aux patients et aux praticiens, qui seraient privés d'un médicament qui a été utilisé depuis des décennies pour le traitement de l'obésité. Concernant les patients, elle fait valoir que l'obésité est un problème de santé majeur en Europe et que les médicaments alternatifs seraient plus coûteux et auraient davantage d'effets secondaires. Quant aux cliniques privées dans lesquelles est effectué un tel traitement, la décision de retrait impliquerait la fermeture d'au moins 85 % d'entre elles, avec les pertes d'emplois qu'implique une telle fermeture pour le personnel médical et administratif.

(…)


107. À titre liminaire, il y a lieu de relever que le caractère urgent d'une demande en référé doit s'apprécier par rapport à la nécessité qu'il y a de statuer provisoirement afin d'éviter qu'un dommage grave et irréparable soit occasionné à la partie qui sollicite la mesure provisoire [voir, par exemple, ordonnance du 18 novembre 1999, Pfizer Animal Health/Conseil, C-329/99 P(R), Rec. p. I-8343, point 94].
108. Il ressort également d'une jurisprudence constante que, particulièrement lorsque la réalisation du préjudice dépend de la survenance d'un ensemble de facteurs, il suffit que ce préjudice soit prévisible avec un degré de probabilité suffisant [voir, notamment, ordonnances du 29 juin 1993, Allemagne/Conseil, C-280/93 R, Rec. p. I-3667, point 34, et du 14 décembre 1999, HFB e.a./Commission, C-335/99 P(R), Rec. p. I-8705, point 67].
109. En l'espèce, l'exécution immédiate de la décision attaquée implique le retrait complet du marché des médicaments visés par l'article 1er de cette décision. De ce fait, s'il n'est pas sursis à l'exécution de celle-ci, il est probable que des médicaments de substitution, dont l'existence est reconnue par les parties, seraient prescrits en remplacement des médicaments retirés pendant la durée de la procédure sur le fond.
110. Le risque existe donc que, à la suite d'une éventuelle annulation de la décision attaquée, il soit difficile pour CHS de récupérer les parts de marché qu'elle détenait antérieurement à la mise en oeuvre de la décision attaquée.

111. Toutefois, CHS se borne à alléguer des difficultés pour récupérer des parts de marché, mais elle n'a aucunement établi que des obstacles de nature structurelle ou juridique empêcheraient les médecins de prescrire de nouveau de tels médicaments et CHS de reconquérir une fraction appréciable de ces parts de marché à la suite de la mise en place, notamment, de mesures appropriées de publicité auprès des médecins.


112. CHS soutient, certes, qu'elle serait tenue de demander une nouvelle AMM pour le médicament contenant de la phentermine même si la décision attaquée était annulée. Toutefois, une telle allégation est dépourvue de toute argumentation.
113. Au surplus, le préjudice allégué est d'ordre purement financier et, en principe, un préjudice purement pécuniaire ne saurait être regardé comme irréparable ou même difficilement réparable, dès lors qu'il peut faire l'objet d'une compensation financière ultérieure (ordonnance du 3 juillet 1984, De Compte/Parlement, 141/84 R, Rec. p. 2575, point 4).
114. Il appartient toutefois au juge des référés d'examiner les circonstances propres à chaque espèce (ordonnance De Compte/Parlement, précitée, point 4).
115. À cet égard, CHS se borne à alléguer de façon générale qu'il est «très douteux» qu'elle puisse survivre en tant que société, mais elle n'a pas apporté d'éléments de nature à établir la réalité de l'allégation selon laquelle elle ne pourrait pas poursuivre ses activités jusqu'au règlement de l'affaire au fond. Ainsi que le relève à juste titre la Commission, le projet de compte de gestion pour la période de novembre 1997 à mars 1999, qui est le seul document produit dans le cadre de la procédure en référé, ne corrobore nullement les affirmations concernant les difficultés de survie de CHS.
116. En outre, il y a lieu de tenir compte de la circonstance que CHS opère dans un marché, celui des médicaments à usage humain, hautement réglementé.
117. Or, dans un secteur qui requiert souvent des investissements importants et où les autorités compétentes peuvent être conduites à intervenir rapidement lorsque des risques pour la santé publique apparaissent, pour des raisons qui ne sont pas toujours prévisibles par les entreprises concernées, il incombe à ces dernières, sauf à devoir supporter elles-mêmes le préjudice résultant d'une telle intervention, de se prémunir contre les conséquences de celle-ci par une politique appropriée.
118. La décision du 9 décembre 1996 relevait déjà l'existence d'effets nocifs des médicaments contenant de la phentermine. Dans ces circonstances, la possibilité que soit adoptée une décision de retrait ou de suspension de l'AMM dont était titulaire CHS devait être prise en compte parmi les risques que cette dernière devait normalement supporter depuis que le CSP avait été saisi par un État membre, parce qu'il considérait que la modification des termes de l'AMM ou que sa suspension ou son retrait étaient nécessaires pour la protection de la santé publique.
119. Or, il convient de constater que, ainsi qu'il ressort du dossier, CHS a commencé ses activités commerciales en janvier 1998, alors que le CSP était déjà saisi.

120. En tout état de cause, à supposer même que le risque d'un dommage irréparable ou difficilement réparable à la suite de l'application de la décision attaquée pendant le déroulement de la procédure sur le fond soit regardé comme suffisamment établi, l'intérêt de CHS à obtenir le sursis à l'exécution de la décision attaquée ne saurait prévaloir en l'espèce sur l'intérêt que présente pour la Communauté le retrait immédiat de l'AMM dont elle était titulaire dans un but de protection de la santé publique.


121. À cet égard, il importe de rappeler que, en principe, les exigences liées à la protection de la santé publique doivent incontestablement se voir reconnaître un caractère prépondérant par rapport aux considérations économiques (ordonnance Royaume-Uni/Commission, précitée, point 93).
122. En l'espèce, il est constant que l'avis du CSP, auquel se réfère la décision attaquée, relève, en ce qui concerne les effets sur le système nerveux central, que les médicaments en cause ont «des effets graves, tels que des réactions psychotiques ou une psychose, une dépression et des convulsions» et que le risque de toxicomanie et de dépendance est «bien connu». Il relève également que «le profil de sécurité des médicaments contenant de la phentermine pose des problèmes en termes de risque potentiel de cardiopathie valvulaire avec une monothérapie par la phentermine, de risque d'hypertension artérielle pulmonaire primitive et d'autres effets indésirables graves cardio-vasculaires [...]». Ces considérations confirment les appréciations déjà portées sur la sécurité de ces médicaments en 1996.

123. C'est à la suite des appréciations du CSP, selon lesquelles l'effet thérapeutique des médicaments contenant de la phentermine faisait défaut dans le traitement de l'obésité, que la Commission, en se fondant sur l'avis dudit comité, a conclu que le rapport bénéfices/risques était défavorable.


124. Sans préjudice des appréciations à effectuer dans le cadre de la procédure sur le fond, le juge des référés ne saurait, en l'absence d'indices d'erreur manifeste ou de détournement de pouvoir, substituer ses propres appréciations à celles du CSP, qui sont le résultat d'une procédure approfondie et contradictoire l'ayant conduit à recommander le retrait des AMM des médicaments contenant de la phentermine.
125. Or, compte tenu desdites appréciations, il appert que l'octroi du sursis à l'exécution de la décision attaquée serait de nature à faire encourir aux utilisateurs de ces médicaments des risques sérieux et risquerait de causer, en termes de santé publique, des dommages auxquels il ne pourrait être remédié en cas de rejet ultérieur du recours sur le fond.

126. Cette conclusion ne saurait être infirmée par l'argument de CHS relatif au dommage qui résulterait pour les patients en cas de rejet du sursis à l'exécution de la décision attaquée, étant donné que l'existence de traitements alternatifs n'est pas contestée.


127. En outre, s'agissant des dommages prétendument causés aux cliniques dans lesquelles est effectué le traitement de l'obésité, force est de relever que les affirmations de CHS selon lesquelles la mise en œuvre de la décision attaquée impliquerait la fermeture d'au moins 85 % des cliniques privées, avec les pertes d'emplois qu'implique une telle fermeture pour le personnel médical et administratif, ne sont étayées que par la lettre du directeur de l'une de ces cliniques, laquelle ne contient pas la moindre pièce justificative à cet égard.
128. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la demande en référé doit être rejetée ».


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