Histoire du vicariat


Chap. I : UN DIOCESE PLACE SOUS



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Chap. I : UN DIOCESE PLACE SOUS

LA MOUVANCE DU SAINT ESPRIT

De prime abord, par trois signaux, Mgr Bigirumwami indique donc la voie qu’il va suivre dans le gouvernement de son Diocèse : Son sacre, au jour de la fête de la Pentecôte, le nom de sa devise Induamur arma lucis (Munissons-nous des armes de la lumière) et le nom de sa revue pastorale Cum Paraclito c’est-à-dire : Sous la mouvance du Saint Esprit. On comprend pourquoi il avait tant besoin de cette assistance du Saint Esprit. En effet, un nouvel évêque noir, nommé pour diriger un Diocèse dans un pays africain, dans une période qui annonçait les soubresauts de l’indépendance, la protection du Saint Esprit était le recours le plus indispensable.


Éclairé par l’Esprit Saint, Mgr Bigirumwami lance une revue, Cum Paraclito, dans laquelle il entend dialoguer, réfléchir et amorcer certaines nouveautés pastorales et catéchétiques. Jusqu’à ce jour, une revue de ce genre était inconnue au Rwanda. Le Diocèse de Kabgayi avait seulement un feuillet nommé le Trait d’union. Ce feuillet se limitait, justement, à transmettre les nouvelles et les décisions de l’évêque. Le nouvel évêque entend faire œuvre d’innovation dans ce domaine. Il veut un clergé qui réfléchit à haute voix et même par écrit. Il a dû, sans doute, garder longtemps dans son cœur un grand regret. Le clergé rwandais, des années durant, a développé une activité littéraire et artistique extraordinaire, mais qui n’a jamais fait l’objet de publication. Qu’on s’en souvienne. En 1935, un certain Père Blanc, Vincent de Decker, est arrivé au Rwanda et fut nommé professeur au Grand Séminaire de Nyakibanda. Philosophe et artiste, ce missionnaire remarquable communiqua aux Séminaristes le goût de la recherche dans les différents domaines de la culture rwandaise : dans la musique, dans la poésie et dans la médecine traditionnelle. Il poussa ensuite certains Séminaristes à acquérir une certaine compétence dans les arts suivants : le battement de tambour, le jeu de la guitare et la recherche sur les motifs décoratifs traditionnels. Dans ces divers domaines, nous connaissons des prêtres rwandais qui s’y sont spécialisés et produit des œuvres de grande qualité. En musique, citons les abbés Alfred Sebakiga et Eustache Byusa. Dans la poésie, nous connaissons le grand Alexis Kagame. Dans la médecine traditionnelle, nous connaissons les abbés Thomas Bazarusanga et Télesphore Kayinamura. Dans les autres arts traditionnels, mentionnons les noms suivants : Michel Rwabigwi pour la collection des motifs décoratifs, Michel Seyoboka pour la musique des tambours et Viateur Kabarira pour la musique de la guitare.
Pour trouver un cadre d’élaboration de toutes ces recherches, le Père de Decker avait créé un cadre en marge des Cours du séminaire, nommé le Cercle Sait-Paul. Parmi les recherches au sein de ce cercle qui existe encore aujourd’hui, on a connu les travaux concernant les us et coutumes, la religion traditionnelle et l’histoire du Rwanda pré-colonial. Toutes ces productions du clergé n’ont jamais fait l’objet d’une publication globale et appropriée pour constituer un héritage digne de ce nom. En créant cette revue, Mgr Bigirumwami voulait, sans doute, pallier à cette lacune. Désormais, les prêtres rwandais pourront utiliser cette revue pour faire connaître leurs travaux. Profitant de cette opportunité, en 1965, j’ai publié dans cette revue, en collaboration avec J. Majabo, un livret intitulé Imana y’u Rwanda. Malheureusement, l’histoire que nous avons connue depuis cette époque n’a pas parmi la réalisation de cet objectif. Depuis l’instauration du régime républicain, les tenants de ce régime ont fait comme si rien de bon n’avait été fait avant eux et que tout devait recommencer à nouveaux frais.


Chap. II : L’INDEPENDANCE

DANS LE GOUVERNEMENT DU DIOCESE DE NYUNDO

Lorsque Mgr Bigirumwami fut nommé évêque pour le 2ème Diocèse du Rwanda, l’évêque de Kabgayi et ses missionnaires qui avaient participé à sa promotion épiscopale lui avaient préparé une équipe de collaborateurs immédiats. Parmi ceux-ci, il fallait mettre le Vicaire général, l’Econome général, le Recteur du petit séminaire et le Curé de la cathédrale de Nyundo. Le Diocèse était ainsi généreusement quadrillé pour éviter au jeune évêque de faire de faux pas dans les débuts. Tout spontanément, Mgr Bigirumwami refusa ce cadeau qui pouvait être empoisonné. Il mit sur pied sa propre équipe composée du Vicaire général, Luis Gasore, de l’Econome général, Wenceslas Karibushi, du Recteur du petit Séminaire, Matthieu Ntahoruburiye et du Curé de la cathédrale, Déogratias Mbandiwimfura.


A l’égard des Missionnaires œuvrant déjà dans les Paroisses situées dans le nouveau Diocèse, Mgr eut une attitude de bienveillance fraternelle. Quant aux nouveaux Missionnaires allogènes, il inaugura une méthode audacieuse. Au lieu de recruter des Missionnaires déjà formés de l’extérieur, ainsi déformés en quelque sorte pour l’Afrique, il préféra accueillir de jeunes candidats pour les mettre au Grand Séminaire de Nyakibanda. De la sorte, ces jeunes gens expatriés, après avoir vécu et étudié avec des séminaristes rwandais dans une même maison de formation, ils en sortiraient prêts et disposés à servir sous les ordres d’un évêque rwandais. De mon temps, j’ai étudié au Grand Séminaire avec 6 séminaristes blancs de Nyundo: les abbés Paul Kesenne, Albert Cattoir, Jean-Baptiste Mendiondo, Raymond Delporte, Gabriel Maindron et Joseph Schmetz. Le fait de relever directement et exclusivement de l’évêque de Nyundo, sans référence à une autre autorité religieuse, mettait ces jeunes prêtres allogènes à l’aise dans la collaboration avec les autres prêtres rwandais incardinés dans le même Diocèse.



Chap. III : LA FORMATION DU CLERGE

A l’époque de la création du Diocèse de Nyundo, en 1952, les prêtres rwandais étaient les seuls à avoir eu un enseignement de niveau universitaire au Grand Séminaire de Nyakibanda. Les autres écoles qui donnaient une formation plus ou moins élevée étaient le Groupe Scolaire de Butare qui préparait des cadres auxiliaires pour l’Administration coloniale du pays ainsi que l’Ecole de Moniteurs de Zaza qui formait des enseignants de qualité pour les écoles primaires. Mais, en ces années qui préparaient déjà l’accession des pays africains à leur souveraineté nationale, l’Eglise préparait également les Diocèses à passer de la responsabilité des Missionnaires étrangers à celle des pasteurs locaux. Pour ce faire, les études universitaires étaient le moyen le plus sûr. A la date de son ordination épiscopale, un seul prêtre rwandais était porteur d’un diplôme universitaire de la première catégorie : l’abbé Déogratias Mbandiwimfura. Il avait obtenu le Doctorat en Droit Canonique de l’Université urbanienne de Rome, en 1947. Pendant les 15 années qui ont suivi, jusqu’à la date de l’indépendance du Rwanda en 1962, le pays a eu 4 autres Docteurs en diverses disciplines scientifiques : Alexis Kagame Docteur en Philosophie de Rome en 1952, Janvier Murenzi Docteur en Sciences sociales, politiques et diplomatiques de l’Université de Louvain en 1952, Bernard Manyurane Docteur en Droit Canonique de Rome en 1956 et Stanislas Bushayija Docteur en Droit Canonique de Rome en 1961. A la fin de son mandat épiscopal en 1974, parmi les 26 prêtres rwandais Docteurs en différentes disciplines scientifiques, le Diocèse de Nyundo comptait à lui seul 12 Docteurs, c’est-à-dire 47%. Il faut doc dire que Mgr Bigirumwami fut le principal promoteur des études universitaires pour les enfants de ce pays avant l’année de l’indépendance et même peu après. Ce faisant, il a contribué grandement ou progrès du Rwanda jusqu’à la fondation de la première Université Nationale du Rwanda par les Pères Dominicains du Canada en 1963.


A la nomination de Mgr Bugirumwami comme évêque de Nyundo, le Rwanda possédait un seul grand séminaire, celui de Nyakibanda dans l’ancienne Province de Nyaruguru. Dans ses débuts, ce séminaire avait accueilli les séminaristes provenant de 3 pays : le Burundi, le Kivu du Congo-belge et le Rwanda. Peu après la fondation du Diocèse de Nyundo, Mgr Bigirumwami a été obligé d’ouvrir son grand séminaire à Nyundo. Il faut rappeler ici que l’élection de Mgr Bigirumwami est arrivée dans les années qui préparaient immédiatement le recouvrement de la souveraineté nationale. A cette époque, le Grand Séminaire de Nyakibanda était devenu le foyer des mouvements politiques divers. En effet, quelques professeurs de ce séminaire étaient devenus des conseillers politiques des leaders hutu qui militaient dans les mouvements politiques colonialo-hutu comme : Joseph Gitera, Grégoire Kayibanda et leurs compères. Parmi ces professeurs Pères Blancs nommons les suivants : le Père Jan Adriaenssens, et Léopold Vermeersch.
Ces deux professeurs travaillaient avec des Professeurs et Fonctionnaires belges de Butare dont les plus connus sont les suivants : Marcel d’Hertefelt, André Coupez, Jacques Maquet, Bernard Lugan et l’ancien Père Blanc Roger Heremans. C’est ce groupe de Butare, avec leurs collègues d’ailleurs, qui ont entrepris l’écriture de l’histoire du Rwanda pour la faire dire que le malheur du Rwanda est le Tutsi depuis toujours. A ces deux groupes, il faut ajouter aussi d’autres Missionnaires, particulièrement remuants dans tout le pays. Parmi ceux-ci, on peut nommer les Pères Blancs : Arthur Dejemeppe. Celui-ci a été, pendant un temps, Provicaire du Diocèse de Kabgayi entre la démission de Mgr Laurent Déprimoz et la nomination de Mgr André Perraudin. Le militantisme de Dejemeppe a été poursuivi et même accentué par son successeur. On sait qu’il s’est rendu célèbre par deux prises de position politiquement catastrophique. Il a écrit une Lettre nommée Super omnia Cartas dans laquelle il affirmait que les malheurs des Hutu viennent des Tutsi. Ce sont ces idées qu’il a communiquées au Résidant Spécial Guy Logiest et que celui-ci a mis en pratique en effaçant le Tutsi de la face politique du Rwanda et en faisant du Hutu le seul maître de céans du Rwanda. Nous n’oublions pas non plus l’abbé Naveau qui a fondé la Société des Etudiants Catholiques Africains (SECA). C’est ce mouvement politique, rependu dans les écoles du Rwanda, qui a été à la base des troubles politiques dans les écoles et fait de la jeunesse instrument de la désolation dans le pays. Ce Naveau était un prêtre du Diocèse de Namur en Belgique, recruté par Mgr Bigirumwami pour son Diocèse. Après les dégâts qu’il a causés dans les écoles, Mgr Perraudin a pris initiative de le chasser du pays, car il trouvait que sa haine pour le Tutsi était presque démoniaque. Ce sont tous ces colons, en soutanes ou en pantalons, qui ont vulgarisé l’idéologie raciste et inventé l’histoire du Rwanda made in Europe.
Ajoutons deux informations concernant les deux grands initiateurs du militantisme colonialo-Parmehutu. Jan Adriaenssens était de vocation tardive chez les Pères Blancs. Avant d’entrer dans cette société missionnaire, il avait travaillé et milité dans Le mouvement du syndicalisme Flamand. C’est dans ce mouvement qui opposait Flamands et Wallons qu’il a appris le militantisme divisionniste qu’il a importé au Rwanda. Il a pris les Hutu pour Flamands et les Tutsi pour Wallons. Au Grand Séminaire, il nous enseignait le Cours de Missiologie qui était comme une sorte d’initiation à la colonisation catholique des pays africains. Après avoir quitté le Rwanda, il a défroqué. C’était la suite normale de son aventure au Rwanda. Quant à Léopold Vermeersch, son militantisme colonialo-parmehutu a joué un rôle nocif sur deux évêques. Mgr André Perraudin, au temps où il était Recteur du Grand Séminaire de Nyakibanda, il ne manifestait aucun penchant racial. C’est si vrai que lorsque il fut nommé évêque, je lui ai dédié une Ode nommée Un pasteur aux augures heureux. C’est ce Père Vermeersch qui l’a contaminé avec ses idées racistes. Après avoir quitté Nyakibanda, il a manigancé habilement pour devenir Vicaire général du jeune évêque, Vincent Nsengiyumva, nouvellement nommé archevêque de Kigali. On peut difficilement ignorer l’influence néfaste en matière politique que ce Vicaire a pu exercer sur son évêque. C’est, peut-être, cette influence qui a occasionné la fin tragique et regrettable de notre ancien archevêque.
Au sein du séminaire même la crise était très profonde. On faisait croire que tous les séminaristes de Nyakibanda étaient devenus de la pourriture. Il ne restait donc qu’à fermer le séminaire et chercher une autre méthode pour former le futur clergé digne de ce nom. A cet effet, en 1960, une grande retraite a été organisée dans la paroisse de Save. Celle-ci fut animée par le Père Jésuite burundais Gabriel Barakana. Durant cette retraite, chaque séminariste était invité à réfléchir et à se demander s’il était à sa place. Le supérieur passait régulièrement pour voir combien avaient décidé leur départ et pour aider les hésitants. Je me souviens qu’il est venu chez moi et m’a demandé si j’avais fini de réfléchir. Je lui ai répondu : après avoir consulté notre prédicateur de retraite, j’ai compris que mon devoir sacré est de rester au séminaire pour devenir prêtre. Si mes supérieurs pensent le contraire, a eux la responsabilité devant Dieu de me renvoyer. En disant cela, je pensais en moi-même : je n’aiderai jamais mes fossoyeurs. Il faut noter ici que pendent cette retraite, à peu près 60 séminaristes ont été obligés de quitter.
Pour remédier à cette situation, nos Supérieurs hiérarchiques ont demandé à la Compagnie des Prêtres de Saint-Sulpice, spécialisée dans la formation du clergé diocésain, de prendre en charge le Grand Séminaire de Nyakibanda à la place des Pères Blancs. Cette Compagnie a envoyé à Nyakibanda deux prêtres, les abbés Edouard Cavelleau et Blaise Forissier. Ce recours aux Sulpiciens a été boycotté par les Pères Blancs. Finalement, les évêques du Rwanda ont placé à la tête du Grand Séminaire des prêtres rwandais : Matthieu Ntahoruburiye, comme Recteur, Déogratias Mbandiwimfura et Bernard Manyurane comme professeurs. Peu d’années après, cette solution a été rendue intenable. Prenant alors son courage à deux mains, Mgr Bigirumwami a créé son propre Grand Séminaire à Nyundo avec pour premier Recteur Matthieu Ntahoruburiye, accompagné par l’abbé Déogratias Mbandiwimfura. La critique destructrice des Missionnaires étrangers avait fait croire que les Rwandais étaient devenus inaptes au sacerdoce. Devant cet affront, il fallait prouver le contraire. C’est dans ces conditions que se situe la coexistence des deux Grands Séminaires au Rwanda. Dans les lignes qui viennent, nous verrons comment la persécution contre le Diocèse de Nyundo a fini par obliger les derniers effectifs de ce Séminaire de Nyundo à chercher refuge au Grand Séminaire de Bujumbura au Burundi. C’est seulement après le remplacement de Mgr Bigirumwami à la tête du Diocèse de Nyundo que tous les Grands Séminaristes du Rwanda se sont retrouvés de nouveau à Nyakibanda. Le climat politique dans le pays était devenu plus serein. Ainsi Nyakibanda a pu reprendre son rôle ancien comme pépinière de prêtres dignes du Rwanda. Mgr Aloys Bigirumwami aura été, de la sorte, la planche de salut du clergé rwandais.


Chap. IV : UNE EVANGELISATION EN PROFONDEUR CULTURELLE

Parmi les intellectuels rwandais qui ont fait des recherches est publiés des ouvrages dans le domaine de la culture rwandaise traditionnaire, le nom de Mgr Bigirumwami est une référence obligée. En fait, Il n’y a pas eu beaucoup. Comme on le sait Bigirumwami n’avait fait que des études disponibles au Rwanda : Petit et Grand Séminaire. Il peut donc être étonnant qu’un prêtre de son époque qui n’avait pas de diplômes Universitaires ait pu rédiger et publier les livres que l’on connaît à son palmarès. Avant de dire comment un prêtre diocésain a pu s’adonner au métier de l’écrivain, donnons d’abord la liste approximative de ses grandes publications en suivant l’ordre chronologique : Imigani migufi (Proverbes), en 1967 ; Imigani miremire (Contes moraux), en 1971 ; Ibitekerezo (Traditions orales), en 1971 ; Imihango (Coutumes), en 1974 ; Imana y’ Abantu-Imana mu Bantu (Anthropologie religieuse), en 1976 ; Umuntu (Anthropologie chrétienne), en 1983. Comme on le voit, 4 domaines sont ciblés : 1. la littérature sapientielle, 2. les traditions populaires, 3. les coutumes, 4. la théologie anthropologique. Mgr Bigirumwami n’était pas un chercheur de bureau. Il a été pasteur de paroisses pendent 23 ans. On peut se demander alors comment et pourquoi il a pu publier tant d’ouvrages qui supposent une recherche assidue et un temps considérable ? La réponse n’est pas à inventer. Plus d’une foi, il s’en est expliqué. Ce sont les questions de ses ouailles qui l’ont motivé. Celles-ci devaient trouver des réponses dans le domaine de la culture rwandaise. A l’aide de ses divers collaborateurs et collaboratrices, il a ramassé une documentation monumentale que reflètent ses livres. Devenu évêque, il a décidé de publier le résultat de toutes ces recherches. Comme on vient de le voir, l’ensemble de ces publications peut se ramener à deux catégories. La 1ère comprend des collections, la 2ème est une réflexion théologique sur le contenu de ces collections.


Pour la première foi, j’ai connu de près Mgr Bigirumwami le jour même de son sacre en 1952. Ce jour-là, une réception en son honneur a été organisée au Petit Séminaire de Kabgayi où j’étais en dernière année. A cette occasion, j’ai eu l’honneur de lui déclamer un poème intitulé Mugabwa-mbere = Le premier évêque rwandais. De puis lors, on est resté en contact. A sa demande, j’ai pu effectuer certains travaux. J’ai commencé la traduction et le commentaire de son grand livre : Imigani miremire. Deux volumes sont déjà parus sur la 1ère partie : les Contes moraux du Rwanda, I-II, (UNR, 1987,1989). La 2ème partie, qui comprendra aussi deux volumes, est en préparation. C’est sur son invitation également que j’ai publié le livre sur notre Religion traditionnelle : Le Dieu de nos pères, en 3 volumes (Bujumbura 1974, 1975, 1981. A la première page de ce 3ème volume, j’ai affiché la photo de Mgr Bigirumwami, accompagnée de la dédicace formulée en ces termes : « je dédie ce livre à l’homme qui est, pour moi, un modèle réussi parmi les Imanistes chrétiens». Plus tard, j’ai publié un autre qui résume et complète celui-ci, sous le titre : Je ne suis pas venu abolir mais accomplir (Kigali, 1995).
Après plus de 10 ans d’enseignement à l’université de Kinshasa, où, entre autre Cours je donnais celui sur la Religion traditionnelle Africaine à des étudiants venus de plusieurs pays de l’Afrique sub-saharienne. En échangeant avec eux, je me suis rendu conte que cette zone de l’Afrique avaient une seule religion traditionnelle malgré les différences linguistique régionale. J’ai, donc, éprouvé le besoin de rédiger ce dernier livre pour notifier cette découverte. A ce moment-là, parlant de la religion de notre zone on disait que, en matière religieuse, nous avons des «traditions religieuses» ou que notre religion était de l’Animisme. Peu après de multiples échanges et colloques, l’on apprit l’habitude de parler même à Rome, des la Religion traditionnelle Africaine, au singulier.
Comme on le voit bien, ces ouvrages véhiculent la même réflexion que celle qui se trouve dans les deux livres de Mgr Bigirumwami : Imana y’abantu-Imana mu bantu = le Créateur et le Rédempteur. Il est question, dans ces ouvrages, de la Théologie, de la création et de la rédemption. En d’autres termes, il s’agit du lien entre la religion naturelle et la religion chrétienne qui ont le même fondateur à savoir : le Verbe de Dieu devenu homme. C’est cette méthode catéchétique que prônait Mgr Bigirumwami. Cette méthode s’appelle aujourd’hui l’inculturation de la théologie ou l’évangélisation en profondeur culturelle. Si une telle méthode avait été suivie dans l’évangélisation de notre peuple, la division raciale inculquée aux Rwandais aurait été probablement refusée. Lisons le passage dans lequel Mgr Bigirumwami donne la définition de l’homme.
- « Tous les hommes, de toutes provenances, portent en eux le cœur et l’intelligence de Dieu.

- Tous les hommes, qu’ils le veuillent ou non, ils trouvent dans leur âme et dans leur corps, le Dieu qui les a tirés du néant et les a fait exister. 

- Ils se sont trouvés dans l’existence qui leur est donnée par le Créateur».
Faisons une petite comparaison avec le texte parallèle du catéchisme que les Missionnaires nous ont enseigné :
« - L’homme, c’est quoi ? L’homme, c’est l’âme et le corps.

- L’âme, c’est quoi ? L’âme, c’est quelque chose de vivant, qui ressemble seulement à l’intelligence. Elle est invisible, elle est insaisissable, elle est ne meurt pas parce qu’elle n’a pas de corps. Elle peut penser, comprendre, être libre, aimer et agir ».


Ces deux citations illustrent la différence entre une catéchèse inculturée qui s’enracine dans l’expérience culturelle d’un peuple et la catéchèse théorique et conceptuelle. La première produit la conversion du cœur tandis que la seconde se limite à un endoctrinement sociologique. Si l’on avait compris, comme le dit notre vénéré évêque, que «tous les hommes, sans exception, sont créés à l’image de Dieu» (Abantu bose, baremwemwo umutima n’ubwenge biva ku Mana), qu’on n’aurait pas entendu les a aberration que nous connaissons : « ils sont mauvais par nature … ces sont des serpents … ».
Chap. V : LA NOMINATION DES EVEQUES

ET LE PROBLEME ETHNIQUE

Dès sa nomination, Mgr Bigirumwami s’est heurté au problème le plus dangereux pour le pays. A cette époque, ce problème n’était pas encore très aigu pour tout le monde. Lorsqu’il fut nommé évêque, on lui avait préparé un Vicaire général : l’abbé Joseph Sibomana. Dans le calcul politique de cette époque, un évêque tutsi devait avoir pour Vicaire général un prêtre hutu. Ce que voyant, Mgr Bigirumwami dit à l’abbé Sibomana : un Vicaire général d’un évêque est comme son épouse. Le choix de celle-ci, tu le sais, dépend principalement de son futur époux. Je ne veux pas qu’on te fasse jouer à mon égard le rôle de serviteur ou d’adversaire politique. Je me charge de te trouver une meilleure promotion. Je te demande de comprendre que je dois me chercher un Vicaire à mon choix. C’est ainsi que son choix tomba sur l’abbé Louis Gasore. Concernant Joseph Sibomana, Mgr Bigirumwami a tenu promesse. A la mort du premier évêque nommé de Ruhengeri, Mgr Bernard Manyurane, Joseph Sibomana fut nommé à sa place. Quelques années plus tard, lorsque cet évêque rencontra des problèmes insurmontables dans son Diocèse, Mgr Bigirumwami le reçut dans son Diocèse, le fit soigner et l’aida à trouver un nouveau Diocèse : celui de Kibungo. Mgr Bigirumwami fut magnanime en lui permettant de choisir parmi les prêtres de son Diocèse ceux qui pouvaient constituer la base du gouvernement de ce nouveau Diocèse. C’est ainsi, par exemple, que Mgr Chrysologue Kayihura, Recteur du petit séminaire de Nyundo, est devenu le premier Vicaire général de Mgr Sibomana à Kibungo.



La persécution du Diocèse de Nyundo

Parmi les persécutions du Gouvernement contre le Diocèse de Nyundo, signalons en premier lieu, la nationalisation de son petit séminaire. En 1973 lors que le mouvement qui préparait le coup d’Etat contre Kayibanda vidait les Tutsi des Etablissements scolaires, le Colonel Alexis Kanyaregwe a été nommé Recteur du Petit séminaire de Nyundo. Celui-ci s’est chargé immédiatement de normaliser la situation, c’est-à-dire : chasser les indésirables Tutsi. En deuxième lieu sur cette liste noire, signalons la fuite de son Grand Séminaire à Bujumbura au Burundi. Celle-ci fut effectuée dans le contexte de la chasse des étudiants tutsi de tous les établissements d’enseignement dans tout le pays. Pendant cette période, il y eut beaucoup de violences. Par des menaces et des violences physiques graves, tout le Grand Séminaire, étudiants et professeurs prêtres confondus, a dû se réfugier d’abord au Congo puis au Burundi. Les étudiants refugiés se sont mêlés aux autres et ont ainsi terminé leur formation et ont été ordonnés prêtres au Burundi. C’est plus tard que tous ces prêtres rwandais ont fini par rentrer au pays. En troisième lieu, signalons la fin de la résistance de Mgr Bigirumwami.


Fatigué par ces attaques politiques qui visaient au premier plan sa personne, Monseigneur, a pris la décision de donner sa démission à Rome alors que son mandat épiscopal de 75 ans n’était pas terminé. Toutefois, il a tenu à se faire remplacer par quelqu’un qu’il avait formé dans son petit Séminaire. C’est ainsi que Mgr Vincent Nsengiyumva est devenu le deuxième Evêque du Diocèse de Nyundo. Terminons cette liste par le méfait le plus grave contre ce Diocèse. Pendant le génocide qui a emporté plus d’une centaine d’ecclésiastiques, le Diocèse de Nyundo compte à lui seul, 30 sur 103 prêtres diocésains officiellement nommés, c’est à dire 30%. Sur cette liste des martyres, figure Mgr Louis Gasore, Vicaire général du Diocèse, tué pendant qu’il administrait le sacrement de la Confirmation aux chrétiens de la paroisse de Muhororo.

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