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IV
LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE D'AZERBAÏDJAN ET SA
CAPITALE. - LA VILLE DE
BAKOU.
Gouvernement d'Azerbaïdjan
Aussitôt après la proclamation de la République indépendante d'Azerbaïdjan,
le Conseil National forma son Gouvernement comprenant 12 ministres, originaires de
la contrée, ayant fait leurs études supérieures dans les universités et les écoles
techniques spéciales en Russie ou à l'étranger.
Aussitôt créé, le Gouvernement azerbaïdjanais (résidant provisoirement à
Elisabethpol-Gandja) dut,
avant tout, prendre des mesures sérieuses pour délivrer la
ville de Bakou et sa région des bolcheviks qui s'en étaient au mois de mars 1918.
Bakou, capitale de l'azerbaïdjan
Bakou, ville universellement connue par ses richesses pétro-lifères, est la
capitale naturelle de l'Azerbaïdjan.
Cette ville fut, même au
temps de la domination russe, non seulement le
centre économique, mais également le noyau intellectuel, religieux et politique de la
société musulmane du Caucase. Toutes les organisations tant soit peu importantes,
telles que Sociétés de bienfaisance, œuvres d'instruction
publique et politiques,
organes de la presse, etc., tout fut fondé et se trouve encore établi actuellement à
Bakou. C'est également là que se concentrent les meilleures forces intellectuelles du
pays: professeurs, médecins, avocats, publicistes.
D'origine très ancienne, Bakou fut de tous temps
une ville musulmane, elle
l'est restée jusqu'à nos jours en dépit de toutes les fluctuations de la fortune. La
citadelle de la ville, renfermant le palais et les tombeaux des Khans,
la tour
légendaire”de la Vierge”(Kiz-Koulessi), tous ces monuments, témoignages vivants de
l'histoire du peuple, prouvent l'Antiquité de la ville.
La plus grande partie des terrains et des immeubles de la ville appartenaient
et appartiennent encore aux habitants originaires de la région. C'est à eux également
qu'appartient la majeure partie des sources pétrolifères situées aux environs de Bakou;
de même qu'une quantité considérable d'entreprises pétrolifères.
Et pourtant ce n'est pas le côté matériel qui intéresse le plus la population
indigène, ce sont surtout les traditions et les souvenirs culturels et historiques
rattachés à cette contrée. Non loin de Bakou se trouvent des tombeaux sacrés vénérés
des musulmans, notamment celui du saint Bibi-Eybat, qui donna son nom aux riches
puits de pétrole.
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Ce n'est donc pas sans raison
que le peuple fit de Bakou, centre de la vie
économique, intellectuelle, religieuse et politique, sa capitale.
L'avenir du nouvel Etat azerbaïdjanais est si étroitement lié à cette ville que
l'existence de la République serait inconcevable sans elle, comme le serait celle d'un
être humain dépourvu de tête.
Il est donc facile de comprendre pourquoi les représentants de l'Azerbaïdjan,
réunis à Constantinople, adressèrent, le 12 septembre 1918,
une protestation
énergique à l'ambassade d'Allemagne. Cette protestation avait pour objet certaines
clauses complémentaires du Traité de Brest-Litovsk, élaborées le 9 septembre par le
gouvernement allemand et les bolcheviks. La troisième clause était résumée en ces
termes:
“Le gouvernement russe s'engage à renforcer l'intensité
des travaux de
l'industrie pétrolière de la région de Bakou afin de fournir à l'Allemagne le quart du
produit total.”
Cet acte, inique juridiquement, dépourvu de fondement et manifestement
injuste, est naturellement abrogé à l'heure actuelle ainsi que le traité de Brest-Litovsk
lui-même. Il n'aurait en aucun cas été accepté par le gouvernement de la République
de l'Azerbaïdjan.
Bien que la production du naphte surpasse
les besoins de la population, et
que le gouvernement se voie forcé de faire des arrangements avec les pays manquant
de combustibles, afin d'attirer les capitaux étrangers, la république ne saurait admettre
l'intervention de quiconque pour l'exploitation du naphte de la région de Bakou.
L'immixtion étrangère équivaudrait au suicide de la République.