Frère Sylvestre


CHAPITRE XVIII ième IL REÇOIT LES DERNIERS SACREMENTS



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CHAPITRE XVIII ième




IL REÇOIT LES DERNIERS SACREMENTS

1°. Le 3 mai, jour de la fête de l'Invention de la Ste-Croix, après avoir célébré le st sacrifice de la messe, il dit positivement que c'était la dernière fois qu'il montait à l'autel. Effectivement ses douleurs augmentèrent considérablement. Les Frères, éplorés, étaient tous plongés dans une espèce de stupeur qui leur arrachait des larmes dans la croyance qu'ils allaient bientôt le perdre. Lui aussi en versait, non pas que ses grandes souffrances en fussent la cause, mais bien plutôt de voir les Frères qui venaient lui rendre visite ou qui le servaient, profondément affectés, car il leur avait jusqu'alors dissimulé la croyance certaine de sa mort.

2°. Etant donc venu le moment où, suivant les préceptes de la Ste Eglise il devait recevoir les sacrements qui doivent soutenir le mourant dans la lutte suprême, il les demanda lui-même et dit au Frère Stanislas de préparer dans la salle des exercices tout ce qu'il fallait pour cette cérémonie, toujours consolante pour celui qui n'ayant aimé que Dieu pendant sa vie et travaillé pour sa plus grande gloire au milieu des combats et des persécutions de tout genre, n'attend plus que la couronne de justice qu'il a promise à ses fidèles serviteurs. A [203] cinq heures du soir tout était prêt ; les Frères, les novices et les postulants s'y rendirent et se rangèrent autour de la salle. Bientôt le Vénéré Père apparaît revêtu de l'étole et du surplis; à sa vue et surtout à son air serein, contrastant avec sa figure pâle et portant l'empreinte de la souffrance, tous profondément émus répandent des larmes. Au milieu de ces marques si attendrissantes d'une si sincère affection, le Vénéré Père s'assied sur un fauteuil, se recueille profondément, puis fait signe de commencer la cérémonie. Il reçoit premièrement l'Extrême-Onction et quitte lui-même les bas pour l'onction des pieds, ne voulant permettre à personne de lui rendre cet office. Ce premier sacrement administré, il reçoit le St Viatique avec une si profonde humilité et un amour si ardent que l'émotion gagnant tous les cœurs, c'est à peine si l'on peut respirer. Quant au Vénéré Père, tout absorbé et tout anéanti en la présence de celui que sa vive foi lui rendait présent comme s'il l'eût vu de ses propres yeux, il paraît ne rien voir, ne rien entendre, et reste dans une immobilité complète. Au bout de quelques minutes il ouvre les yeux et les promenant sur l'assemblée en pleurs, il leur adresse d'une voix faible mais émouvante une exhortation dont voici la substance.

3°. Commençant par ces paroles des Livres Saints: Souvenez-vous de vos fins dernières et vous ne pécherez jamais, il leur dit que c'est seulement lorsqu'on est au dernier moment de la vie que l'on comprend que ces paroles sont le moyen le plus efficace pour nous empêcher de commettre le péché, car, lorsqu'on est prêt de paraître devant Dieu, on a un mortel regret non seulement de l'avoir offensé mais encore d'avoir si peu fait pour sauver son âme. Citant ensuite ces paroles des psaumes de David: « Qu'il est beau, doux et agréable de vivre unis [204] ensemble comme des frères », il leur recommande de s'aimer les uns les autres, se rappelant qu'ils sont frères, que Marie est leur Mère commune et par suite qu'ils doivent s'aider et se rendre la vie agréable le plus possible en accomplissant avec soin les uns à l'égard des autres le grand précepte de la charité. Il désire que l'obéissance soit toujours la compagne de la charité, non pas, leur dit-il, qu'il ait à se plaindre d'eux à ce sujet, seulement il souhaite que son successeur puisse leur rendre le même témoignage, l'obéissance étant le plus grand chemin du paradis.

4°. En ce moment, son cœur débordant de joie de mourir dans la Société de Marie, il laisse échapper cette exclamation: « Oh! qu'il fait beau69 mourir dans la Société de Marie! C'est aujourd'hui, je vous l'assure, ma plus grande consolation. » De là il les engage tous à persévérer dans leur vocation, les assurant de leur salut s'ils ont le bonheur d'y mourir. A ces mots, sentant sa voix faiblir, il termine cet entretien, dont je ne donne qu'un pâle abrégé, en demandant pardon à tous des mauvais exemples qu'il aurait pu leur donner quoique, dit-il, je ne sache pourtant pas avoir fait volontairement de la peine à personne. A ces paroles, les Frères tombent à genoux et éclatent en sanglots. « C'est à nous à demander pardon au bon Père », s'écrie l'un des aumôniers. Mais dominés par une de ces émotions qui absorbent toutes les facultés de l'âme et les sens du corps, les Frères ne l'entendent pas. Le Vénéré Père, profondément affecté lui-même et ne pouvant plus, malgré son courage énergique, comprimer les émotions de son cœur, se retira dans sa [205] chambre pour continuer son action de grâce. Cette scène lamentable et attendrissante se passait un lundi, 11 du mois de mai 1840. Celui à qui je l'ai entendu raconter et qui était présent ne pouvait retenir ses larmes en m'en faisant le récit, tant il en était encore affecté.

5°. Ce jour-là même, on commença une neuvaine à Ste Philomène à laquelle il avait une dévotion particulière. On conçut même, lorsqu'elle fut achevée, quelque espoir de guérison, car la douleur de ses reins et l'enflure des mains et des jambes avaient comme disparu. Même il put sortir de sa chambre et aller faire une visite au St Sacrement. En sortant, il fut voir à la sacristie une nouvelle crédence qui, comme il le dit au Frère Stanislas, ne devait pas lui servir.

6°. Je conclurai ce chapitre par quelques inquiétudes qui lui survinrent après qu'il eut été administré. D'abord, il se reprochait de n'avoir pas assez tenu au travail et d'avoir été trop indulgent à l'égard des paresseux; or ce scrupule ne pouvait venir que de l'horreur qu'il avait pour l'oisiveté, car, et j'en sais quelque chose, il ne pouvait souffrir la lâcheté ni que l'on restât oisif, au point qu'un jour voyant un ancien Frère que j'ai bien connu jeter nonchalamment des pierres dans un lieu qui lui avait été indiqué, il envoya un autre Frère lui porter son traversin en lui faisant transmettre l'ordre de s'y asseoir dessus. On comprend assez si la leçon fut efficace.

7°. Il lui vint aussi des sentiments de crainte de n'avoir pas fait tout le bien que Dieu attendait de lui. Le cher Frère François dissipa toutes ces craintes en lui mettant sous les yeux principalement la grande grâce que Dieu lui avait faite en le [206] choisissant pour fonder la Congrégation appelée à faire un si grand bien dans la Ste Eglise et pour laquelle il avait usé ses forces, sa santé et sacrifié tous ses instants. Alors son cœur s'ouvrit à la confiance et le calme; la tranquillité revint dans son âme.

8°. Ce n'était pas tout; il se reprochait encore de n'avoir pas fondé une société agricole pour les enfants orphelins, craignant que Dieu lui en demandât compte d'autant plus qu'on lui en fournissait le moyen libéralement. Alors le cher Frère François lui fit comprendre que cette oeuvre, étant tout à fait différente de celle de la Congrégation, il n'aurait pu s'occuper de l'une sans nuire à l'autre, le soin des Frères absorbant tout son temps et qu'il fallait laisser cela à ceux à qui Dieu en donnerait la pensée plus tard. (Aujourd'hui elle est réalisée par les Frères de Nouméa)70. Satisfait de cette réponse, il n'en parla plus.

9°. Enfin le croirait-on, notre bon Père, lui, qui portait un si grand intérêt aux malades, qui constamment veillait à ce qu'il ne leur manquât rien pour les soulager et hâter leur guérison, et dont il se préoccupait comme une mère de son enfant souffrant, se reprochait de ne pas les avoir assez bien soignés; c'était donc là un véritable scrupule; mais n'est-ce pas le propre des saints de croire qu'ils n'en font jamais assez pour assister leurs semblables; car plus ils croissent en amour de Dieu, plus aussi devient intense leur charité à l'égard du prochain. [207]





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