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LES TESTAMENTS DE MICHEL PINHAN

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le supposer. Pinhan tente d’éviter la dispersion des siens puisqu’Antoine

devient à son tour le facteur de stabilité en se substituant en tout à son père,

rôle dont ce dernier le charge.

Cinq petits-enfants sont cités. D’abord, les quatre enfants d’Antoine :

Alice, Sileta, ses « felezenas », Jean, Etienne, ses « felezenes ». Un Etienne

Pinhan est mentionné dans le CC 520, recueil de pièces justificatives des

comptes des années 1478, 1485, 1486, 1487, 1489 et 1490, f°18r. S’agit-il de ce

dernier ? Or si, dans le premier, Pinhan leur lègue cent florins et cinquante

florins, dans le codicille, il ne leur laisse que cinq florins, puis ils disparais-

sent des legs. Nous pouvons supposer qu’ils sont toujours vivants, puisqu’ils

ne sont pas cités dans les prières pour le repos de leur âme. Il faut donc en

déduire qu’un événement, assez grave, s’est produit entre eux pour qu’il les

raye de son testament. D’après N. Jornet

15

, ce dernier « peut être également



un facteur de rupture par l’exclusion de certains membres ». Mais le droit

provençal veut que tous les enfants vivants reçoivent quelque chose. Ce pro-

cédé s’applique aux petits-enfants. Quant à Bertrand Liautaut, Pinhan teste

en sa faveur dans la version du 7 janvier 1454 et dans celle du 15 septembre

1459. Il lui laisse vingt florins, cinq qu’il recevra le jour de ses vingt-cinq ans,

puis cinq par an pendant quatre ans. Par contre, si les quatre premiers sont

qualifiés de « felezenes », il n’en est pas de même pour Bertrand.

Sa sœur est elle aussi constamment mentionnée dans les six documents,

sous le patronyme paternel. Elle est, parfois, dite « de Bernis », ou « abitan

de Bernis ». Dans la première version, il signale qu’elle a un héritier, à qui il

refuse tout droit sur ce qu’il lègue à sa soeur. Or, dès 1448, il prie pour son

âme, au même titre que pour celle des morts qui lui étaient chers. Ce non-

obstant, elle ne disparaît pas des legs !

Enfin, nous avons des renseignements sur sa femme. Il a été marié deux

fois, d’abord avec Bertrande, la mère d’Antoine et d’Antoinette, puis avec

Delphine, la mère de ses autres enfants. Dans le testament du 4 mars 1454 il

est fait mention d’un fils de Delphine, Antoine Quodenau, probablement

issu d’un premier mariage. Il lui restitue sa dot. En tant que mari, il l’a per-

çue lors de son mariage, et elle doit être restituée si elle devient veuve. Il n’est

donc qu’un dépositaire, les parents assurant en quelque sorte l’avenir de leur

fille. La femme ne perd pas tous ses droits au moment de son mariage, et

l’époux n’est alors, selon l’expression juridique, que dominus usufructuarius.

Il ne touche finalement que les intérêts de la dot, puisque cette dernière est

restituée à la femme, et n’est pas impliquée dans la part d’héritage laissée aux

enfants. Mais, d’après J.-M. Carbasse

16

, « en pratique toutefois. le sort de la



veuve dépend entièrement des dispositions testamentaires de son mari, sauf

si elle a conservé quelques biens propres en dehors de sa dot ». Il semble

15. N. J

ORNET


op.cit., p.91.

16. J.- M. C

ARBASSE

, « La condition de la femme mariée en Languedoc (



XIII

e

-



XIV

e

siècles) » ; Cahiers de Fanjeaux n°23, La femme dans la vie religieuse du Languedoc (



XIII

e

-

XIV

e

siècles), Toulouse, 1988, p. 99-112.

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MARIE-ROSE BONNET

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donc que Pinhan se soit conformé à la réglementation en vigueur dans le

Midi. Delphine aura un usufruit sur les biens de son mari dans la mesure où

elle sera logée, nourrie et habillée. Il lui lègue de plus des bijoux, des meubles,

de la vaisselle. Il lui assure une rente, tant qu’elle ne se remariera pas. La res-

titution de la dot plus la rente viagère lui permettront ainsi de vivre jusqu’à

un éventuel remariage. Dans ce cas, l’autre mari la prenant en charge, la

réserve accordée par Pinhan n’aura plus de raison d’être. Cela implique peut-

être, indirectement, la rédaction d’un contrat de mariage, comme cela se fai-

sait dans le Midi dès le

XIII

e

siècle, la dot en étant alors un élément très impor-



tant. Et, ainsi que le signale J.-M. Carbasse

17

, « après la dissolution du



mariage, la logique « séparatiste » du régime dotal l’emportait et en bonne

règle la veuve devait récupérer sa dot et obtenir le paiement de l’augment de

dot à elle consenti par son mari dans le contrat de mariage ».

Or, à travers ces legs, transparaissent des rapports conflictuels avec son

beau-fils. En effet, dans la copie du 31 janvier 1454 et dans celle du 15 sep-

tembre 1459, Pinhan est amené à « prendre la parole » dans un discours

direct. Il s’adresse à son fils et à sa femme pour les exhorter à bien s’entendre :

ils doivent vivre en paix, car là où il y a paix et concorde, Dieu habite, et là

où il y a dispute et division, le démon habite… Il demande donc à Antoine

de ne pas mettre Delphine hors de la pièce où elle réside tant qu’elle portera

son nom. Mais, si nous observons bien le tableau mis en annexes, nous nous

rendons compte que le legs évolue au fil des années. La tension entre la belle-

mère et son beau-fils s’est probablement accrue, et Pinhan a alors senti le

besoin d’assurer financièrement l’avenir de sa seconde femme en lui laissant

une somme supplémentaire au cas où Antoine la chasserait de la maison.

Double intérêt, donc, d’abord à cause du style direct, ensuite par ce pan de

voile subrepticement levé sur une intimité familiale apparemment tendue !

Ainsi que le rappelle L. Stouff

18

, « l’un des buts du testament est d’éviter les



conflits entre le conjoint, les enfants, les parents, les héritiers possibles du

testateur… ». Il s’agit bien là d’une véritable transaction que Pinhan propose

à ses héritiers, qui perpétue ainsi la présence du chef de famille après la dis-

parition de ce dernier, qui règle les problèmes à venir, préside encore à la des-

tinée des siens, prolongeant alors son pouvoir au-delà de la mort. Il signale

en outre des « étrennes », consistant en une somme d’argent qui lui revient

de droit, non mentionnées dans les premières versions. Delphine devient

véritablement « propriétaire » d’un bien à la mort de son époux, parce que ce

dernier le confirme par écrit devant notaire. La femme dépend donc de la

bonne volonté du mari, en dernière instance. D’autres points, connus par

ailleurs, sont mis en évidence ici, concernant le sort de la femme et des filles.

17. J.- M. C

ARBASSE

op. cit., p.104.



18. L. S

TOUFF


, « Mourir à Arles aux derniers siècles du Moyen Age » ; Mélanges

M. Vovelle, vol. aixois. Société, Mentalités, CulturesFrance (

XV

e

-

XX

e

siècles), Aix-en-Provence,

1997, p.393-402.

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