Il va de soi que ladite population n'en cessa pas moins d'etre un peuple
d'origine turque, comme elle l'est encore de nos jours; cependant, vu le peu de
developpement et l'absence totale d'investigations dans le domaine de l'histoire et de
l'ethnographie du Caucase et notamment de l'Azerbaıdjan alors ignore du monde
scientifique, l'opinion erronee du gouvernement russe au sujet de la composition
ethnographique de cette population fut officiellement sanctionnee. Les habitants des
anciens Khanats, turco-musulmans sont actuellement connus sous le nom de Tatars du
Caucase malgre leur origine dont la meilleure preuve est l'analogie des langues,
mreurs, coutümes, des croyances et des traditions. Le meme fait a ete demontre par
l'historien français M.Leon Cahun ainsi que par M.H. Vambery, savant hongrois bien
connu, et d'autres.
Narrant les exploits, en Azerbaıdjan, du fameux conquerant de l'Asie,
Tamerlan (ou Temir-Liang, ce qui signifie Timour le boıteux), M. Leon Chaun
dit:”LAzerbaidjan, pays turc par ses habitants et sa langue depuis un temps fort
recule, s'est volontairement soumis a Timour.”
M.H. Vambery, touchant a l'ethnologie de l'Azerbaidjan, trouve qu'il serait
difficile de demontrer a quelle epoque et de quelle maniere l'element iranien a pu etre
evince du territoire d'Azerbaıdjan.
Cette question reste a resoudre. Nous citerons, cependant, quelques faits:
En Azerbaidjan, dans sa partie persane, aussi bien qu'au Caucase, ou plutöt
en Transcaucasie, la population est composee de Turcs, parlant un dialecte turc appele
azerbaidjanais, qui possede sa litterature, sa poesie nationale, ses traditions et ses
mythes. Les deux principales doctrines de l'Islam y sont professees.
Au point de vue de la culture intellectuelle l'Azerbaıdjan, tout par-
ticulierement dans la contree persane, a subi la profonde influence de l'ancienne
litterature persane, dont les coryphees sont Ferdousi, Hafiz et Saadi que les
Azerbaıdjanais aiment encore a citer de nos jours. A la longue, au fur et a mesure de
l'affaiblissement de la puissance de la Perse, de la decadence de sa culture sociale,
d'une part, et d'autre part grace a la propagation, toujours croissante de la culture
russe, ainsi qu'a la conscience naissante de son propre caractere national,
l'Azerbaıdjan vit disparaıtre les liens qui l'unissaient a la Perse.
Jetons maintenant un coup d'oeil sur cette partie de l'Azerbaıdjan qu'il serait
juste de nommer, geographiquement parlant, Azerbaıdjan du Caucase. Nous ne
toucherons pas a l'Azerbaıdjan persan, auquel nous envoyons, nous, Azerbaıdjanais
du Caucase, nos souhaits de bien-etre et d'organisation sociale et politique basee sur
des fondements de liberte politique et individuelle, sous l'egide de l'Iran, autrefois
puissant et cultive.
POPULATION INDIGENE DE L'AZERBAIDJAN -
SES RAPPORTS AVEC L'ANCIEN ETAT RUSSE
La domination russe
Durant la domination russe au Caucase, les Azerbaıdjanais indigenes furent
comparativement aux autres peuples de cette contree, les plus exposee aux
persecutions. Tandis que leurs voisins, Georgiens et Armeniens, ont leurs ecoles
nationales, leurs eglises, leurs proprietes, leur presse en langue maternelle, diverses
societes de bienfaisance, etc., tout est interdit aux Azerbaıdjanais. Dans les cas tres
rares ou une autorisation est accordee, elle est presentee sous une forme si rebutante
qu'elle en perd son sens moral.
Il suffira de dire que la langue maternelle etait presque supprimee dans les
ecoles. C'est avec le meme sans-gene que le Gouvernement russe se comportait a
l'egard du clerge musulman. Affectant une consideration exageree envers les pretres
et l'Eglise russe, il maltraitait le clerge musulman dont les cadres, sans exclure les
hauts dignitaires, tels que le mufti ou le scheikh-oui-islam, etaient formes de pretres
choisis parmi les plus ignorants ou souvent meme d'illettres, qu'on retribuait
miserablement.
Les biens des mosquees etaient soumis a la juridiction des fonctionnaires. Il
etait expressement defendu de batir des mosquees sans l'assentiment du clerge
orthodoxe. En un mot, les Russes, tout en accusant de fanatisme les musulmans, se
montraient beaucoup plus fanatiques que ceux-ci.
Pour ce qui est des organisations publiques, nous ne dirons que ceci: ce n'est
qu'en 1905 qu'on obtint du Gouvernement russe le droit de fonder, a Bakou, la Societe
musulmane de bienfaisance. La presse periodique, les livres, les theatres, tout etait en
butte aux persecutions et expose aux cruautes de la censure des fonctionnaires russes.
Renaissance intellectuelle
Malgre tous les obstacles, les Azerbaıdjanais ne pouvaient, comme bien l'on
pense, rester insensibles aux grandes idees de liberte civique, religieuse et politique
venues de l'Europe occidentale et se propageant en Russie des le debut du XIX siecle.
Depuis 1860, ces idees avaient conquis les esprits des classes intellectuelles de la
Russie, aussi bien que ceux des autres peuples soumis a l'Empire.
Il etait clair que pour etre en communion intellectuelle par les bienfaits de
ces grandes idees il fallait avant tout se connaıtre soimeme, etudier sa nation, son
histoire, sa situation actuelle, ses besoins, ses idees et son ideal.
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