Frère Sylvestre


CHAPITRE V ième LA CONGREGATION EST MENACEE DE S'ETEINDRE FAUTE DE SUJETS



Yüklə 2,51 Mb.
səhifə7/24
tarix15.10.2018
ölçüsü2,51 Mb.
#74168
1   2   3   4   5   6   7   8   9   10   ...   24

CHAPITRE V ième




LA CONGREGATION EST MENACEE DE S'ETEINDRE FAUTE DE SUJETS

1°. Après la fondation des établissements dont nous venons de parler, le Père Champagnat n'avait plus de Frères pour en fonder de nouveaux et il ne se présentait plus de novices, ce qui était pour lui une peine extrême, attendu qu'il prévoyait que dans un prochain avenir sa Congrégation, d'abord semblable à une lampe brillante, finirait par s'éteindre faute d'huile pour l'alimenter. Toutefois, il ne se découragea pas; sachant que c'est Dieu qui donne les vocations, plus que jamais il lui adressa de ferventes prières, il multiplia les neuvaines, il redoubla ses mortifications et surtout il eut recours à Marie, bien persuadé qu'elle l'aiderait dans un si pressant besoin, et c'est ce qu'elle fit effectivement en venant à son secours d'une manière presque miraculeuse.

2°. Pendant le carême de 1822, un mois environ avant l'entrée du Frère Stanislas dans la communauté, se présente un jeune homme du département de la Haute-Loire, demandant à entrer au noviciat. Le Père Champagnat, après l'avoir toisé et bien questionné, jugea qu'il n'était pas propre à la Congrégation, surtout quand il lui dit qu'il avait fait [120] partie de l'Institut des Frères des Ecoles Chrétiennes. Toutefois, afin de l'étudier de plus près, il lui permit de rester deux ou trois jours dans la maison; mais sa conduite pendant ce laps de temps, n'ayant pas plu au Vénéré Père, il lui signifia l'ordre de se retirer. Comme notre postulant insistait pour qu'il le gardât, afin de l'y engager, il demanda au Vénéré Père s'il le recevrait dans le cas où il amènerait des postulants de son pays. Sur la réponse affirmative du Père Champagnat, il partit muni d'une lettre d'obédience assez insignifiante qu'il lui donna.

3°. Arrivé dans son pays, distant de Lavalla d'environ quinze lieues, il détermine une huitaine de jeunes gens qui voulaient entrer chez les Frères des Ecoles Chrétiennes à le suivre, prétendant qu'il y allait lui-même. Ils y consentirent bien volontiers, car dans la localité on savait qu'il faisait partie de cette Congrégation et on ignorait qu'il en était sorti. Au bout de quelques jours les préparatifs sont faits, et voilà la petite caravane qui se met en route. Après deux fois le soleil couché, ils arrivent non loin de Lavalla dont ils aperçoivent le clocher. Alors leur conducteur, jouant du fin, leur dit que c'était dans cette pauvre paroisse qu'ils vont stationner pendant quelque temps, attendu que les Frères des Ecoles Chrétiennes y ont un noviciat, et qu'ensuite on les conduira à Lyon où d'abord ils avaient cru aller.

4°. L'arrivée de cette bande de novices, dont de suite le Père Champagnat connut le guide, le surprit étrangement. Il se présente tout d'abord à eux, les regarde attentivement de la tête aux pieds, leur demande le motif qui les amène et même fait mine de ne pas les recevoir, ce qui fut pour eux une si sensible affliction qu'elle parut clairement sur leur visage. [121]

Le Vénéré Père, s'en apercevant, se ravisa et leur dit de rester jusqu'au lendemain pour examiner s'il les recevrait ou non. Ne sachant où les loger, on les fit coucher à la grange sur de la paille. Le lendemain, le bon Père qui les avait déjà pris en affection, leur donna à chacun un chapelet et leur parla d'une manière si touchante de la Ste Vierge que dès lors, m'a dit l'un d'eux, leur résolution de rester avec le Vénéré Père était telle que rien au monde n'aurait pu les faire changer.

5°. Après ce petit discours, le Père leur déclara qu'étant si nombreux, il ne pouvait les recevoir sans consulter les Frères anciens, qu'en attendant ils pouvaient rester et s'occuper à ce qu'on leur dirait. Effectivement, il donna l'ordre aux principaux Frères qui étaient dans les postes de se rendre à Lavalla pendant la semaine sainte; après les avoir réunis et consultés, il leur déclara que son sentiment à lui était de recevoir toute la bande, même celui qui l'avait amenée. Tous ayant été de son avis, il n'hésita plus à les recevoir, mais, pour éprouver leur vocation, il les condamna à de rudes travaux et ne leur ménagea pas la pénitence publique. Après plusieurs jours, certainement bien durs et bien longs pour eux, il les fit assembler et, doutant encore de la vocation des plus jeunes, il leur dit qu'il allait les louer à quelques bons habitants de la paroisse pour garder les bestiaux, puis s'adressant au plus jeune, il lui demanda s'il y consentait: « Oui, dit-il, si vous me recevez après. » Le Vénéré Père, émerveillé de leur constance et les voyant prêts à faire tout ce qu'il voudrait, leur déclara nettement qu'il les recevait tous. Quant à leur conducteur, il fut renvoyé quelque temps après pour raison d'immoralité. Disons en passant, que c'était pour une faute de ce genre que les Frères des Ecoles Chrétiennes l'avaient expulsé. [122]

6°. Cependant les amis du Père Champagnat lui firent des reproches de s'imposer la charge de nourrir tant de monde n'ayant pas de ressources, mais le Vénéré Père ne voyant dans cette augmentation du personnel qu'une protection visible de la Ste Vierge, convaincu que c'était N. D. du Puy qui les lui envoyait (car ils étaient tous de la Haute-Loire)39, ne se mit nullement en peine de leurs récriminations. Même il regarda l'événement dont nous venons de parler comme un commencement de consistance et de prospérité de sa Congrégation. En effet, un Frère chargé d'aller dans le pays de ces jeunes gens pour prendre des renseignements sur leur compte et recevoir leur modique pension, y fit connaître la Congrégation jusqu'alors ignorée, sauf dans le diocèse de Lyon. De plus, les nouveaux postulants, ayant écrit à leurs parents qu'ils étaient très contents à Lavalla, en attirèrent d'autres de sorte qu'au bout de six mois ils se comptaient vingt du pays dans le noviciat.

7°. Cette augmentation de sujets rendit tous les appartements très insuffisants, surtout le dortoir; aussi était-on forcé de coucher deux dans le même lit, et le Père Champagnat qui les avait lui-même confectionnés était loin d'avoir eu l'idée de les faire servir pour deux. Donc, voyant qu'un nouveau local était absolument nécessaire, il ne balança pas, malgré sa pauvreté, de l'entreprendre; on peut même dire qu'il le fit tout entier de ses propres mains, quoique tous les Frères y eussent été employés, car ce fut lui qui fit toute la maçonnerie. Il ne craignait pas de se présenter à ceux qui le demandaient avec la truelle à la main et une soutane toute terreuse, mais toujours avec un abord avenant et [123] un air digne, gai et content. Comme quelques ecclésiastiques le blâmaient de cette occupation, il leur répondit simplement qu'il ne faisait pas ce métier par plaisir mais bien par nécessité.

8°. Rien n'était plus édifiant que de voir cette petite communauté travailler la plus grande partie de la journée en gardant un profond silence, interrompu seulement par quelques encouragements du Vénéré Père ou par quelques lectures pieuses. Celui-ci, toujours le premier au travail et s'attachant à ce qu'il y avait le plus pénible, ne laissait jamais échapper une parole de plainte, malgré la maladresse des Frères dont le plus grand nombre n'était pas rompu à cette sorte d'occupation. La maison construite, il fit lui-même presque toute la menuiserie.

9°. Le dimanche, il donnait aux Frères quelques leçons de chant, leur apprenait à servir la messe, à faire le catéchisme, l'oraison mentale, et les moyens à prendre pour acquérir les vertus de leur saint état. Ses exhortations étaient courtes, mais selon son habitude toutes pleine de feu, surtout lorsqu'il parlait de la Ste Vierge Marie, tâchant autant qu'il était en lui de leur inspirer une grande et solide dévotion envers cette bonne Mère, dévotion dont il leur donnait constamment lui-même l'exemple.

10°. Toute cette espèce de dissipation extérieure et de travail forcé que nécessitait la construction de la maison, ne fut nullement préjudiciable aux Frères; même elle ne fit qu'accroître leur attachement à leur vocation et les porter à la pratique de la vertu. La charité régnait entre eux d'une manière admirable et ils se faisaient un plaisir de s'entre aider toutes les fois que l'occasion s'en présentait. Le [124] règlement était observé avec la plus grande exactitude; jamais, d'après un Frère qui y était à cette époque, il n'avait vu personne rester au lit après le signal du lever. Si quelqu'un venait à s'oublier, il n'attendait pas qu'on l'avertit, il demandait lui-même une pénitence à genoux et en public. Plusieurs sollicitaient la permission de passer le temps de la récréation, ou au moins une partie, à aller visiter le St Sacrement, à réciter le chapelet ou encore à faire quelque travail manuel.

11°. Dans les établissements, c'était même dévouement, même piété, même ferveur et même charité. Comme il n'y avait pas encore des règles bien fixes sur le bien à faire dans la Congrégation, plusieurs, en sus de l'enseignement, s'adonnaient à des oeuvres de charité corporelles; ils visitaient les malades, faisaient leur lit et les veillaient au besoin. D'autres quêtaient pour entretenir chez eux les enfants de la paroisse jusqu'à leur première communion. De plus ces quêtes servaient encore à procurer le nécessaire à un grand nombre d'indigents. A Lavalla, tous les soirs pendant l'hiver, les Frères faisaient encore un catéchisme indépendamment de ceux des classes; il durait ordinairement une heure et demie. Les enfants et les jeunes gens y assistaient en grand nombre. Ce surcroît de travail donna aux Frères l'occasion de s'insinuer dans l'esprit de plusieurs parents de ces enfants et de ces jeunes gens dans le but de les déterminer à faire leurs pâques, que quelques-uns ne négligeaient que trop. Témoin du bien réalisé par les Frères dans leurs divers postes, plusieurs curés en demandèrent au Père Champagnat; de là trois nouvelles fondations de 1822 à 1823, savoir; Symphorien-le-Château, Boulieu et Vanosc. [125]



Yüklə 2,51 Mb.

Dostları ilə paylaş:
1   2   3   4   5   6   7   8   9   10   ...   24




Verilənlər bazası müəlliflik hüququ ilə müdafiə olunur ©genderi.org 2024
rəhbərliyinə müraciət

    Ana səhifə