Relations des voyages faits par les Arabes et les Persans dans l'Inde et à la Chine dans leIXe siècle de l'ère chrétienne



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Cette espèce de femmes sortent le soir, sans se couvrir d'un voile, et portent des étoffes de couleur ; elles s'approchent des étrangers nouvellement arrivés dans le pays, notamment des gens corrompus et dépravés, et aussi des habitants du pays. Elles passent la nuit chez eux, et elles s'en retournent le lendemain matin. Louons Dieu de ce qu'il nous a préservés d'une pareille infamie.

La coutume des Chinois, de faire leurs achats et leurs ventes en pièces de cuivre, vient de l'inconvénient attaché à l'usage p.072 des pièces d'or et d'argent. Ils disent que, si un voleur parvient à s'introduire dans la maison d'un Arabe, qui est dans l'usage de faire ses transactions en pièces d'or et d'argent, il a la chance d'emporter sur son dos jusqu'à dix mille pièces d'or, ou le même nombre de pièces d'argent, ce qui suffit pour consommer la ruine de l'Arabe. Qu'un voleur, au contraire, s'introduise dans la maison d'un Chinois ; il ne pourra pas emporter plus de dix mille pièces de cuivre ; ce qui équivaut à dix mitscals d'or seulement (141).

Ces pièces de cuivre, que nous nommons folous (142), sont faites avec du cuivre et d'autres métaux (143) fondus ensemble. Elles sont de la grandeur de ce que nous appelons un dirhem bagly. Au milieu est un large trou par lequel on fait passer une ficelle. Mille de ces pièces équivalent à un mitscal d'or. Une seule ficelle enfile mille de ces pièces ; mais à chaque cent l'on fait un nœud. Quand un homme achète une ferme, ou une p.073 marchandise, ou des légumes et des objets au-dessus, il donne un certain nombre de ces pièces, suivant la valeur de l'objet. On trouve de ces pièces à Syraf ; ces pièces portent des mots écrits en chinois (144).

À l'égard des incendies qui ont lieu en Chine, de la manière de bâtir les maisons et de ce qui a déjà été dit à ce sujet, les villes sont, dit-on, construites en bois et avec des roseaux disposés en treillage, à la manière des ouvrages qu'on fait chez nous avec des roseaux fendus. On enduit le tout d'argile et d'une pâte particulière à la Chine, qui est faite de graines de chanvre (145). Cette pâte est aussi blanche que le lait ; on en enduit les murs, et ils jettent un éclat admirable.

Les maisons, en Chine, n'ont pas d'escalier, parce que les richesses des Chinois, leurs trésors et tout ce qu'ils possèdent, sont placés dans des caisses montées sur des roues et qu'on peut faire rouler. Lorsque le feu prend à une maison, on met en mouvement ces caisses avec ce qui p.074 y est renfermé, et il n'y a pas d'escalier qui empêche de s'éloigner avec rapidité (146).

Ce qui concerne les eunuques a été indiqué d'une manière bien brève (147). Les eunuques sont spécialement chargés de la perception de l'impôt et de tout ce qui tient aux revenus publics. Parmi eux, il y en a qui ont été amenés captifs des régions étrangères, et qui ont été faits, plus tard, eunuques ; il en est d'autres qui sont nés en Chine, et que leurs parents eux-mêmes ont mutilés pour les offrir au souverain, afin de capter par là sa bienveillance. En effet, les affaires de l'empire et ses trésors sont entre les mains des gens de la cour (148).

Les officiers qui sont envoyés par l'empereur vers la ville de Khanfou, port où affluent les marchands arabes, sont des eunuques. L'usage de ces eunuques, et des gouverneurs des villes en général, est, quand ils montent à cheval, de se faire précéder par des hommes qui tiennent à la p.075 main quelques pièces de bois semblables aux crécelles (des chrétiens), et qui les frappent l'une contre l'autre. Le bruit qui en résulte s'entend de fort loin. Aussitôt les habitants s'éloignent du chemin par où doit passer l'eunuque ou le gouverneur ; celui qui est sur la porte d'une maison se hâte d'entrer et de fermer la porte sur lui. Cet état dure jusqu'après le passage de l'eunuque ou de l'homme préposé au gouvernement de la ville. Aucun homme du peuple n'oserait rester sur le chemin, et cela par un effet de la crainte et de la terreur qu'inspirent les hauts fonctionnaires ; car ceux-ci tiennent à ce que le peuple ne prenne pas l'habitude de les voir, et à ce que personne ne pousse la hardiesse jusqu'à leur adresser la parole.

Le costume des eunuques et des principaux officiers de l'armée est en soie de la première qualité ; on n'apporte pas de soie aussi belle dans le pays des Arabes. Cette soie est très recherchée des Chinois, p.076 et ils la payent un prix très élevé. Un des marchands les plus considérables et dont le témoignage ne comporte pas de doute, raconte que, s'étant présenté devant l'eunuque envoyé par l'empereur dans la ville de Khanfou, pour choisir les marchandises venues du pays des Arabes et qui convenaient au prince, il vit sur sa poitrine un signe naturel, qui se distinguait à travers les robes de soie dont il était couvert. Son opinion était que l'eunuque avait mis deux robes l'une sur l'autre ; mais, comme il tournait continuellement les yeux du même côté, l'eunuque lui dit :

— Je vois que tu tiens tes yeux fixés sur ma poitrine ; pourquoi cela ?

Le marchand lui répondit :

— J'admirais comment le signe qui est sur ta peau pouvait se distinguer à travers les deux robes qui couvrent ta poitrine.

Là-dessus, l'eunuque se mit à rire et jeta la manche de sa tunique du côté du marchand, disant :

— Compte le nombre des robes que j'ai sur moi.

Le marchand le fit, et il compta p.077 jusqu'à cinq cabas (149) placés l'un sur l'autre, et à travers lesquels on distinguait le signe. La soie dont il s'agit ici est une soie écrue et qui n'a pas été foulée. La soie que portent les princes est encore plus fine et plus admirable (150).

Les Chinois sont au nombre des créatures de Dieu qui ont le plus d'adresse dans la main, en ce qui concerne le dessin, l'art de la fabrication, et pour toute espèce d'ouvrages ; ils ne sont, à cet égard, surpassés par aucune nation. En Chine, un homme fait avec sa main ce que vraisemblablement personne ne serait en état de faire. Quand son ouvrage est fini, il le porte au gouverneur, demandant une récompense pour le progrès qu'il a fait faire à l'art ; Aussitôt le gouverneur fait placer l'objet à la porte de son palais, et on l'y tient exposé pendant un an. Si, dans l'intervalle, personne ne fait de remarque critique, le gouverneur récompense l'artiste et l'admet à son service ; mais, si quelqu'un signale quelque défaut grave, p.078 le gouverneur renvoie l'artiste et ne lui accorde rien.

Un jour, un homme représenta, sur une étoffe de soie, un épi sur lequel était posé un moineau ; personne, en voyant la figure, n'aurait douté que ce ne fût un véritable épi et qu'un moineau était réellement venu se percher dessus. L'étoffe resta quelque temps exposée. Enfin, un bossu étant venu à passer, il critiqua le travail. Aussitôt on l'admit auprès du gouverneur de la ville ; en même temps on fit venir l'artiste ; ensuite on demanda au bossu ce qu'il avait à dire ; le bossu dit :

— C'est un fait admis par tout le monde, sans exception, qu'un moineau ne pourrait pas se poser sur un épi sans le faire ployer ; or l'artiste a représenté l'épi droit et sans courbure, et il a figuré un moineau perché dessus ; c'est une faute.

L'observation fut trouvée juste, et l'artiste ne reçut aucune récompense.

Le but des Chinois, dans cela et dans les choses du même genre, est d'exercer p.079 le talent des artistes, et de les forcer à réfléchir mûrement sur ce qu'ils entreprennent et à mettre tous leurs soins aux ouvrages qui sortent de leurs mains.

Il y avait, à Bassora, un homme de la tribu des Coreyschytes, appelé Ibn-Vahab, et qui descendait de Habbar, fils de Al-asvad (151). La ville de Bassora ayant été ruinée (152), Ibn-Vahab quitta le pays et se rendit à Syraf. En ce moment un navire se disposait à partir pour la Chine. Dans de telles circonstances, il vint à Ibn-Vahab l'idée de s'embarquer sur ce navire. Quand il fut arrivé en Chine, il voulut aller voir le roi suprême. Il se mit donc en route pour Khomdan, et, du port de Khanfou à la capitale, le trajet fut de deux mois. Il lui fallut attendre longtemps à la porte impériale, bien qu'il présentât des requêtes et qu'il s'annonçât comme étant issu du même sang que le prophète des Arabes. Enfin l'empereur fit mettre à sa disposition une maison particulière, et ordonna de lui fournir tout ce qui lui p.080 serait nécessaire. En même temps il chargea l'officier qui le représentait à Khanfou de prendre des informations, et de consulter les marchands au sujet de cet homme, qui prétendait être parent du prophète des Arabes, à qui Dieu puisse être propice ! Le gouverneur de Khanfou annonça, dans sa réponse, que la prétention de cet homme était fondée. Alors l'empereur l'admit auprès de lui, lui fit des présents considérables, et cet homme retourna dans l'Irac avec ce que l'empereur lui avait donné.

Cet homme était devenu vieux (153) ; mais il avait conservé l'usage de toutes ses facultés. Il nous raconta que, se trouvant auprès de l'empereur, le prince lui fit des questions au sujet des Arabes, et sur les moyens qu'ils avaient employés pour renverser l'empire des Perses. Cet homme répondit :

— Les Arabes ont été vainqueurs par le secours de Dieu, de qui le nom soit célébré, et parce que les Perses, plongés dans le culte du feu, adoraient le soleil et p.081 la lune, de préférence au Créateur.

L'empereur reprit :

— Les Arabes ont triomphé, en cette occasion, du plus noble des empires, du plus vaste en terres cultivées, du plus abondant en richesses, du plus fertile en hommes intelligents, de celui dont la renommée s'étendait le plus loin.

Puis il continua :

— Quel est, dans votre opinion, le rang des principaux empires du monde ?

L'homme répondit qu'il n'était pas au courant de matières semblables. Alors l'empereur ordonna à l'interprète de lui dire ces mots :

— Pour nous, nous comptons cinq grands souverains (154). Le plus riche en provinces est celui qui règne sur l'Irac, parce que l'Irac est situé au milieu du monde, et que les autres rois sont placés autour de lui. Il porte, chez nous, le titre de roi des rois (155). Après cet empire vient le nôtre. Le souverain est surnommé le roi des hommes, parce qu'il n'y a pas de roi sur la terre qui maintienne mieux l'ordre dans ses États que nous, et qui exerce une p.082 surveillance plus exacte ; il n'y a pas non plus de peuple qui soit plus soumis à son prince que le nôtre. Nous sommes donc réellement les rois des hommes. Après cela vient le roi des bêtes féroces, qui est le roi des Turks, et dont les États sont contigus à ceux de la Chine (156). Le quatrième roi en rang est le roi des éléphants, c'est-à-dire le roi de l'Inde. On le nomme chez nous le roi de la sagesse, parce que la sagesse tire son origine des Indiens. Enfin vient l'empereur des Romains, qu'on nomme chez nous le roi des beaux hommes (157), parce qu'il n'y a pas sur la terre de peuple mieux fait que les Romains, ni qui ait la figure plus belle. Voilà, quels sont les principaux rois ; les autres n'occupent qu'un rang secondaire.

L'empereur ordonna ensuite à l'interprète de dire ces mots à l'Arabe :

— Reconnaîtrais-tu ton maître, si tu le voyais ?

L'empereur voulait parler de l'apôtre de Dieu, à qui Dieu veuille bien être propice. Je répondis :

— Et comment pourrais-je le p.083 voir, maintenant qu'il se trouve auprès du Dieu très haut ?

L'empereur reprit :

— Ce n'est pas ce que j'entendais. Je voulais parler seulement de sa figure.

Alors l'Arabe répondit oui. Aussitôt l'empereur fit apporter une boîte ; il plaça la boîte devant lui ; puis, tirant quelques feuilles, il dit à l'interprète :

— Fais-lui voir son maître.

Je reconnus sur ces pages les portraits des prophètes ; en même temps, je fis des vœux pour eux et il s'opéra un mouvement dans mes lèvres. L'empereur ne savait pas que je reconnaissais ces prophètes ; il me fit demander par l'interprète pourquoi j'avais remué les lèvres. L'interprète le fit, et je répondis :

— Je priais pour les prophètes.

L'empereur demanda comment je les avais reconnus, et je répondis :

— Au moyen des attributs qui les distinguent. Ainsi, voilà Noé, dans l'arche, qui se sauva avec sa famille, lorsque le Dieu très haut commanda aux eaux, et que toute la terre fut submergée avec ses habitants ; Noé et les siens échappèrent seuls au p.084 déluge.

À ces mots, l'empereur se mit à rire et dit :

— Tu as deviné juste lorsque tu as reconnu ici Noé ; quant à la submersion de la terre entière, c'est un fait que nous n'admettons pas. Le déluge n'a pu embrasser qu'une portion de la terre ; il n'a atteint ni notre pays ni celui de l'Inde (158).

Ibn-Vahab rapportait qu'il craignit de réfuter ce que venait de dire l'empereur et de faire valoir les arguments qui étaient à sa disposition, vu que le prince n'aurait pas voulu les admettre ; mais il reprit :

— Voilà Moïse et son bâton, avec les enfants d'Israël.

L'empereur dit :

— C'est vrai ; mais Moïse se fit voir sur un bien petit théâtre, et son peuple se montra mal disposé à son égard,

Je repris :

— Voilà Jésus, sur un âne, entouré des apôtres.

L'empereur dit :

— Il a eu peu de temps à paraître sur la scène. Sa mission n'a guère duré qu'un peu plus de trente mois.

Ibn-Vahab continua à passer en revue les différents prophètes ; mais nous nous bornons à répéter une partie de ce qu'il p.085 nous dit. Ibn-Vahab ajoutait qu'au-dessus de chaque figure de prophète on voyait une longue inscription, qu'il supposa renfermer le nom des prophètes, le nom de leur pays et les circonstances qui accompagnèrent leur mission. Ensuite il poursuivit ainsi :

« Je vis la figure du prophète, sur qui soit la paix ! Il était monté sur un chameau, et ses compagnons étaient également sur leur chameau, placés autour de lui. Tous portaient à leurs pieds des chaussures arabes ; tous avaient des cure-dents attachés à leur ceinture. M'étant mis à pleurer, l'empereur chargea l'interprète de me demander pourquoi je versais des larmes ; je répondis :

— Voilà notre prophète, notre seigneur et mon cousin, sur lui soit la paix !

L'empereur répondit :

— Tu as dis vrai ; lui et son peuple ont élevé le plus glorieux des empires. Seulement il n'a pu voir de ses yeux l'édifice qu'il avait fondé ; l'édifice n'a été vu que de ceux qui sont venus après lui.

« Je vis un grand nombre d'autres figures de p.086 prophètes dont quelques-unes faisaient signe de la main droite, réunissant le pouce et l'index, comme si, en faisant ce mouvement, elles voulaient attester quelque vérité (159). Certaines figures étaient représentées debout sur leurs pieds, faisant signe avec leurs doigts vers le ciel. Il y avait encore d'autres figures ; l'interprète me dit que ces figures représentaient les prophètes de la Chine et de l'Inde (160).

« Ensuite l'empereur m'interrogea au sujet des califes et de leur costume, ainsi que sur un grand nombre de questions de religion, de mœurs et d'usages, suivant qu'elles se trouvaient à ma portée ; puis il ajouta :

— Quelle est, dans votre opinion, l'âge du monde ?

Je répondis :

— On ne s'accorde pas à cet égard. Les uns disent qu'il a six mille ans, d'autres moins, d'autres plus ; mais la différence n'est pas grande.

Là-dessus, l'empereur se mit à rire de toutes ses forces. Le vizir qui était debout auprès de lui témoigna aussi qu'il n'était pas de mon avis. L'empereur me p.087 dit :

— Je ne présume pas que votre prophète ait dit cela.

Là-dessus la langue me tourna, et je répondis :

— Si, il l'a dit.

Aussitôt je vis quelques signes d'improbation sur sa figure ; il chargea l'interprète de me transmettre ces mots :

— Fais attention à ce que tu dis ; on ne parle aux rois qu'après avoir bien pesé ce qu'on va dire. Tu as affirmé que vous ne vous accordez pas sur cette question ; vous êtes donc en dissidence au sujet d'une assertion de votre prophète, et vous n'acceptez pas tout ce que vos prophètes ont établi. Il ne convient pas d'être divisé dans des cas semblables ; au contraire, des affirmations pareilles devraient être admises sans contestation. Prends donc garde à cela et ne commets plus la même imprudence.

« L'empereur dit encore beaucoup de choses qui sont échappées de ma mémoire, à cause de la longueur du temps qui s'est écoulé dans l'intervalle ; puis il ajouta :

— Pourquoi ne t'es-tu pas rendu p.088 de préférence auprès de ton souverain, qui se trouvait bien mieux à ta portée que nous pour la résidence et pour la race ?

Je répondis :

— Bassora, ma patrie, était dans la désolation ; je me trouvais à Syraf ; je vis un navire qui allait mettre à la voile pour la Chine ; j'avais entendu parler de l'éclat que jette l'empire de la Chine, et de l'abondance des biens qu'on y trouve. Je préférai me rendre dans cette contrée et la voir de mes yeux. Maintenant je m'en retourne dans mon pays, auprès du monarque mon cousin (161) ; je raconterai au monarque l'éclat que jette cet empire, et dont j'ai été témoin. Je lui parlerai de la vaste étendue de cette contrée, de tous les avantages dont j'y ai joui, de toutes les bontés qu'on y a eues pour moi.

« Ces paroles firent plaisir à l'empereur ; il me fit donner un riche présent ; il voulut que je m'en retournasse à Khanfou sur les mulets de la poste (162). Il écrivit même au gouverneur de Khanfou, pour lui recommander d'avoir des égards pour moi, p.089 de me considérer plus que tous les fonctionnaires de son gouvernement, et de me fournir tout ce qui me serait nécessaire jusqu'au moment de mon départ. Je vécus dans l'abondance et la satisfaction, jusqu'à mon départ de la Chine.

Nous questionnâmes Ibn-Vahab au sujet de la ville de Khomdan, où résidait l'empereur, et sur la manière dont elle était disposée. Il nous parla de l'étendue de la ville et du grand nombre de ses habitants. La ville, nous dit-il, est divisée en deux parties qui sont séparées par une rue longue et large. L'empereur, le vizir, les troupes, le cadi des cadis, les eunuques de la cour et toutes les personnes qui tiennent au gouvernement occupent la partie droite et le côté de l'Orient. On n'y trouve aucune personne du peuple, ni rien qui ressemble à un marché. Les rues sont traversées par des ruisseaux et bordées d'arbres ; elles offrent de vastes hôtels. La partie située à gauche, du côté du couchant, est destinée au peuple, aux p.090 marchands, aux magasins et aux marchés. Le matin, quand le jour commence, on voit les intendants du palais impérial, les domestiques de la cour, les domestiques des généraux et leurs agents entrer à pied ou à cheval dans la partie de la ville où sont les marchés et les boutiques ; on les voit acheter des provisions et tout ce qui est nécessaire à leur maître ; après cela, ils s'en retournent, et l'on ne voit plus aucun d'eux dans cette partie de la ville jusqu'au lendemain matin (163).

La Chine possède tous les genres d'agrément ; on y trouve des bosquets charmants, des rivières qui serpentent au travers ; mais on n'y trouve pas le palmier.

On raconte en ce moment un fait dont nos ancêtres n'avaient aucune idée. Personne, jusqu'ici, n'avait supposé que la mer qui baigne la Chine et l'Inde était en communication avec la mer de Syrie ; une pareille chose eût paru incroyable jusqu'à ces derniers temps. Or nous avons entendu dire qu'on vient de trouver dans la p.091 mer Méditerranée (mer de Roum ou mer du pays des Romains) des pièces d'un navire arabe qui se composait de parties cousues ensemble. Ce navire s'était brisé avec son équipage ; les vagues l'avaient mis en pièces, et les vents, par l'entremise des vagues, avaient poussé ses débris dans la mer des Khazar (la mer Caspienne). De là les débris avaient été jetés dans le canal de Constantinople, d'où ils étaient arrivés dans la mer de Roum et la mer de Syrie. Ce fait montre que la mer tourne la Chine, les îles de Syla, le pays des Turks et des Khazar ; ensuite elle se jette dans le canal de Constantinople, et communique avec la mer de Syrie. En effet, il n'y a que les navires de Syraf dont les pièces soient cousues ensemble ; les navires de Syrie et du pays de Roum sont fixés avec des clous, et non avec des fils (164).

On nous a raconté, de plus, qu'il a été trouvé de l'ambre dans la mer de Syrie. C'est une des choses qui paraissent p.092 incroyables, et dont on ne connaissait pas autrefois d'exemple. Pour que ce qu'on a raconté à cet égard fût vrai, il faudrait que l'ambre dont on parle fut arrivé dans la mer de Syrie par la mer d'Aden et de Colzom (la mer Rouge) ; en effet, la dernière de ces mers est en communication avec les mers dans lesquelles se forme l'ambre. Mais le Dieu très haut n'a-t-il pas dit qu'il avait élevé une barrière entre les deux mers (la mer Rouge et la mer Méditerranée) (165) ? Si donc le récit qu'on fait est vrai, il faut supposer que l'ambre trouvé dans la mer Méditerranée fait partie de l'ambre que la mer de l'Inde jette dans les autres mers, de manière que cet ambre, allant d'une mer à l'autre, sera arrivé jusque dans la mer de Syrie (166).



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Nouvelles observations sur la Chine



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p.105 La Chine, par suite de l'extrême sollicitude du gouvernement, était autrefois, avant les troubles qui y sont survenus de nos jours, dans un ordre dont il n'y a pas d'exemple.

p.106 Un homme, originaire du Khorassan, était venu dans l'Irac et y avait acheté une grande quantité de marchandises ; puis il s'embarqua pour la Chine. Cet homme était avare et très intéressé. Il s'éleva un débat entre lui et l'eunuque que l'empereur avait envoyé à Khanfou, rendez-vous des marchands arabes, pour choisir, parmi les marchandises nouvellement arrivées, celles qui convenaient au prince. Cet eunuque était un des hommes les plus puissants de l'empire ; c'est lui qui avait la garde des trésors et des richesses de l'empereur. Le débat eut lieu au sujet d'un assortiment d'ivoire et de quelques autres marchandises. Le marchand refusant de céder ses marchandises au prix qu'on lui proposait, la discussion s'échauffa ; alors l'eunuque poussa l'audace jusqu'à mettre à part ce qu'il y avait de mieux parmi les marchandises, et à s'en saisir, sans s'inquiéter des réclamations du propriétaire.

Le marchand partit secrètement de Khanfou, et se rendit à Khomdan, p.107 capitale de l'empire, à deux mois de marche, et même davantage. Il se dirigea vers la chaîne dont il a été parlé dans le livre premier (178). L'usage est que celui qui agite la sonnette sur la tête du roi soit conduit immédiatement à dix journées de distance, dans une espèce de lieu d'exil. Là, il est tenu en prison pendant deux mois ; ensuite le gouverneur du lieu le fait venir en sa présence et lui dit :

— Tu as fait une démarche qui, si ta réclamation n'est pas fondée, entraînera ta perte et l'effusion de ton sang. En effet, l'empereur avait placé à la portée de toi et des personnes de ta profession des vizirs, et des gouverneurs auxquels il ne tenait qu'à toi de demander justice. Sache que, si tu persistes à t'adresser directement à l'empereur, et que tes plaintes ne soient pas de nature à justifier une telle démarche, rien ne pourra te sauver de la mort. Il est bon que tout homme qui voudrait faire comme toi soit détourné de suivre ton exemple jusqu'au bout. Désiste-toi donc de ta p.108 réclamation, et retourne à tes affaires.

Or, quand un homme, en pareil cas, retire sa plainte, on lui applique cinquante coups de bâton et on le renvoie dans le pays d'où il est parti ; mais, s'il persiste, on le conduit devant l'empereur.

Tout cela fut pratiqué à l'égard du Khorassanien ; mais il persista dans sa plainte, et demanda à parler à l'empereur. Il fut donc ramené dans la capitale, et conduit devant le prince. L'interprète l'interrogea sur le but de sa démarche ; le marchand raconta comment un débat s'était élevé entre lui et l'eunuque, et comment l'eunuque lui avait arraché sa marchandise des mains. Le bruit de cette affaire s'était répandu dans Khanfou, et y était devenu public.

L'empereur ordonna de remettre le Khorassanien en prison, et de lui fournir tout ce dont il aurait besoin pour le boire et le manger. En même temps il fit écrire par le vizir à ses agents de Khanfou, pour les inviter à prendre des informations sur p.109 le récit qu'avait fait le Khorassanien, et à tâcher de découvrir la vérité. Les mêmes ordres furent donnés au maître de la droite, au maître de la gauche et au maître du centre ; en effet, c'est sur ces trois personnages que roule, après le vizir, la direction des troupes ; c'est à eux que l'empereur confie la garde de sa personne ; quand le prince marche avec eux à la guerre et dans les occasions analogues, chacun des trois prend autour de lui la place qu'indique son titre (179). Ces trois fonctionnaires écrivirent donc à leurs subordonnés.

Mais tous les renseignements qu'on recevait tendaient à justifier le récit qu'avait fait le Khorassanien. Des lettres conçues dans ce sens arrivèrent de tous les côtés à l'empereur. Alors le prince manda l'eunuque ; dès que celui-ci fut arrivé, on confisqua ses biens, et le prince retira de ses mains la garde de son trésor ; en même temps le prince lui dit :

— Tu mériterais que je te fisse mettre à mort. Tu m'as p.110 exposé aux censures d'un homme qui est parti du Khorassan, sur les frontières de mon empire, qui est allé dans le pays des Arabes, de là dans les contrées de l'Inde, et enfin dans mes États, dans l'espoir d'y jouir de mes bienfaits ; tu voulais donc que cet homme, en passant, à son retour, par les mêmes pays, et en visitant les mêmes peuples, dît : « J'ai été victime d'une injustice en Chine, et on m'y a volé mon bien ». Je veux bien m'abstenir de répandre ton sang, à cause de tes anciens services ; mais je vais te préposer à la garde des morts, puisque tu n'a pas su respecter les intérêts des vivants.

Par les ordres de l'empereur, cet eunuque fut chargé de veiller à la garde des tombes royales, et de les maintenir en bon état.

Une des preuves de l'ordre admirable qui régnait jadis dans l'empire, à la différence de l'état actuel, c'est la manière dont se rendaient les décisions judiciaires, le respect que la loi trouvait dans les cœurs, et l'importance que le p.111 gouvernement, dans l'administration de la justice, mettait à faire choix de personnes qui eussent donné des garanties d'un savoir suffisant dans la législation, d'un zèle sincère, d'un amour de la vérité à toute épreuve, d'une volonté bien décidée de ne pas sacrifier le bon droit en faveur des personnes en crédit, d'un scrupule insurmontable à l'égard des biens des faibles et de ce qui se trouverait sous leurs mains.

Lorsqu'il s'agissait de nommer le cadi des cadis, le gouvernement, avant de l'investir de sa charge, l'envoyait dans toutes les cités qui, par leur importance, sont considérées comme les colonnes de l'empire. Cet homme restait dans chaque cité un ou deux mois, et prenait connaissance de l'état du pays, des dispositions des habitants et des usages de la contrée, Il s'informait des personnes sur le témoignage desquelles on pouvait compter, à tel point que, lorsque ces personnes auraient parlé, il fût inutile de recourir à de nouvelles informations. Quand cet p.112 homme avait visité les principales villes de l'empire, et qu'il ne restait pas de lieu considérable où il n'eût séjourné, il retournait dans la capitale et on le mettait en possession de sa charge.

C'est le cadi des cadis qui choisissait ses subalternes et qui les dirigeait. Sa connaissance des diverses provinces de l'empire, et des personnes qui, dans chaque pays, étaient dignes d'être chargées de fonctions judiciaires, qu'elles fussent nées dans le pays même ou ailleurs, était une connaissance raisonnée, laquelle dispensait de recourir aux lumières de gens qui peut-être auraient obéi à certaines sympathies, ou qui auraient répondu aux questions d'une manière contraire à la vérité. On n'avait pas à craindre qu'un cadi écrivît à son chef suprême une chose dont celui-ci aurait tout de suite reconnu la fausseté, et qu'il le fît changer de direction.

Chaque jour, un crieur proclamait ces mots à la porte du cadi des cadis :

— Y p.113 a-t-il quelqu'un qui ait une réclamation à exercer soit contre l'empereur, dont la personne est dérobée à la vue de ses sujets, soit contre quelqu'un de ses agents, de ses officiers et de ses sujets en général ? Pour tout cela je remplace l'empereur, en vertu des pouvoirs qu'il m'a conférés et dont il m'a investi.

Le crieur répétait ces paroles trois fois. En effet, il est établi en principe que l'empereur ne se dérange pas de ses occupations, à moins que quelque gouverneur ne se soit rendu coupable d'une iniquité évidente, ou que le magistrat suprême n'ait négligé de rendre la justice et de surveiller les personnes chargées de l'administrer. Or, tant qu'on se préserva de ces deux choses, c'est-à-dire tant que les décisions rendues par les administrations furent conformes à l'équité, et que les fonctions de la magistrature ne furent confiées qu'à des personnes amies de la justice, l'empire se maintint dans l'état le plus satisfaisant.

On a vu que le Khorassan était p.114 limitrophe des provinces de l'empire. Entre le Sogd (la Sogdiane) et la Chine proprement dite, il y a une distance de deux mois de marche, et cet espace consiste dans un désert impraticable et dans des sables qui se succèdent d'une manière non interrompue, n'offrant ni eau, ni rivières, ni habitations. Voilà pourquoi les guerriers du Khorassan ne songent pas à envahir les provinces de la Chine (180).

La Chine, du côté du soleil couchant, a pour limite la ville appelée Madou, sur les frontières du Tibet. La Chine et le Tibet sont dans un état d'hostilités continuelles (181). Quelqu'un de ceux qui ont fait le voyage de Chine nous a dit y avoir vu un homme qui portait sur son dos du musc dans une outre ; cet homme était parti de Samarkand, et avait franchi à pied la distance qui sépare son pays de la Chine. Il était venu de ville en ville jusqu'à Khanfou, place où se dirigent les marchands de Syraf. Le pays où vit la chèvre qui fournit le musc de Chine, et p.115 le Tibet, ne forment qu'une seule et même contrée. Les Chinois attirent à eux les chèvres qui vivent près de leur territoire ; il en est de même des habitants du Tibet. La supériorité du musc du Tibet sur celui de la Chine tient à deux causes : la première est que la chèvre qui produit le musc trouve, sur les frontières du Tibet, des plantes odorantes (182), tandis que les provinces qui dépendent de la Chine n'offrent que les plantes vulgaires. La seconde cause consiste en ce que les habitants du Tibet laissent les vessies dans leur état naturel, au lieu que les Chinois altèrent les vessies qui se trouvent à leur portée. Ajoutez à cela que le musc chinois nous vient par la mer, et que, dans le trajet, il contracte une certaine humidité. Quand les Chinois laissent le musc dans sa vessie, et que la vessie est déposée dans un vase bien fermé (183), il arrive dans le pays des Arabes ayant les mêmes qualités que le musc du Tibet.

Le premier de tous les genres de musc p.116 est celui que la chèvre dépose en se frottant contre les rochers des montagnes, au moment où la matière s'est amassée dans son nombril, et qu'elle s'y est réunie sous forme d'un sang frais, comme se rassemble le sang lorsqu'il survient un ulcère. Quand l'instant de la démangeaison est arrivé, et que l'animal en est incommodé, il se frotte contre les pierres, au point que sa peau se fend, et que ce qui est en dedans coule ; mais à peine la matière est sortie que la plaie se dessèche, et que la peau se ferme ; dès lors la matière s'amasse de nouveau.

Il y a au Tibet des hommes qui font métier d'aller à la recherche du musc, et qui possèdent, à cet égard, des connaissances particulières. Quand ils ont trouvé du musc, ils le ramassent, le réunissent ensemble et le déposent dans des vessies. Ce musc est réservé pour les princes. Le musc a acquis son plus haut mérite, quand il a eu le temps de mûrir, dans la vessie, sur l'animal même ; il l'emporte alors sur p.117 les autres muscs, de même que les fruits qui mûrissent sur l'arbre l'emportent sur les fruits qu'on cueille avant leur parfaite maturité.

Du reste, on va à la chasse des chèvres avec des filets dressés ou avec des flèches. Quelquefois on enlève la vessie de l'animal avant que le musc soit mûr. En ce cas, quand on retire le musc de dessus l'animal, il a une odeur désagréable qui dure un certain temps, jusqu'à ce qu'il ait séché ; mais, du moment que le musc est sec, ce qui n'a lieu qu'après beaucoup de temps, il change, et alors il devient véritablement du musc.

La chèvre qui produit le musc est comme nos chèvres, pour la taille, la couleur, la finesse des jambes, la division des ongles, les cornes d'abord droites, ensuite recourbées. Elle a deux dents minces et blanches aux deux mandibules ; ces dents se dressent sur la face de la chèvre ; la longueur de chacune n'est pas tout à fait la distance qui existe entre l'extrémité du p.118 pouce et l'extrémité de l'index ; ces dents ont la forme de la dent de l'éléphant. Voilà ce qui distingue cet animal des autres espèces de chèvre (184).

La correspondance qui a lieu entre l'empereur de la Chine et les gouverneurs des villes ainsi que les eunuques, se fait sur des mulets de la poste, qui ont la queue coupée, comme les mulets de la poste chez nous. Ces mulets suivent certaines routes déterminées d'avance (185).

Les Chinois, outre les diverses particularités que nous avons décrites, ont celle de pisser debout. Tel est l'usage du peuple parmi les indigènes. Quant aux gouverneurs, aux généraux et aux personnes notables, ils se servent de tubes de bois verni, de la longueur d'une coudée ; ces tubes sont percés des deux côtés, et le côté supérieur est assez large pour pouvoir y introduire le bout de la verge. On se met donc sur ses pieds quand on veut pisser ; on tourne le tube loin de soi, et on y décharge l'urine. Les Chinois p.119 prétendent que cette manière d'uriner est plus salutaire au corps, et que toutes les maladies auxquelles est sujette la vessie, notamment la pierre, viennent uniquement de ce qu'on s'accroupit pour pisser, ajoutant que la vessie ne se décharge complètement qu'autant qu'on fait l'opération debout (186).

Ce qui fait que les hommes, chez les Chinois, se laissent pousser les cheveux sur la tête, c'est que, lorsqu'un enfant vient au monde, on se dispense de lui arrondir la tête et de la redresser, comme cela se pratique chez les Arabes (187). Les Chinois disent que cela contribue à faire perdre au cerveau son état naturel et altère le sens commun. La tête d'un Chinois présente un aspect difforme ; les cheveux qui la couvrent cachent ce défaut (188).

Les Chinois se divisent en tribus et en familles, comme les tribus des enfants d'Israël et des Arabes. On a égard à cela dans les choses de la vie. En Chine, un homme n'épouse pas une personne qui lui p.120 est proche et qui est de la même famille ; il est obligé de chercher ailleurs. En principe, un homme ne se marie pas dans sa tribu (189) ; c'est comme lorsque, chez les Arabes, un homme de la tribu de Temym ne se marie pas dans la tribu de Temym, ni un homme de la tribu de Rebyé dans la tribu de Rebyé, mais que les hommes de Rebyé se marient dans la tribu de Modhar, et les hommes de Modhar dans la tribu de Rebyé. Les Chinois disent que c'est un moyen d'avoir de plus beaux enfants (190).

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Louanges à Dieu, le maître des mondes ! Que ses bénédictions soient sur les meilleures de ses créatures, Mahomet et sa famille tout entière ! Dieu nous suffît. O le bon protecteur et la bonne aide !

Collationné avec le manuscrit sur lequel cette copie a été faite, au mois de safar de l'année 596 (novembre 1199 de J.-C.). Que Dieu nous conduise au bien !



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NOTES DE LA TRADUCTION



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(1) C'est-à-dire une série de faits historiques.

(2) Il s'agit ici de la mer qui baigne les côtes occidentales de la presqu'île de l'Inde, depuis l'embouchure de l'Indus jusqu'aux environs de la ville de Goa. C'est la mer que les écrivains arabes appellent mer Larevy ou mer du pays de Lar. Comme les navires des Arabes partaient des bouches du Tigre et suivaient d'abord les côtes de Perse, la mer Larevy était précédée par la mer appelée mer de Perse. Il n'est point parlé ici de la mer de Perse, à cause de la lacune qui se trouve au commencement du volume.

(3) Ici commence la deuxième page du manuscrit arabe, et ce n'est qu'à partir de là que le récit devient authentique. La partie qui précède, partie qui occupe le côté verso du premier feuillet du manuscrit, me paraît apocryphe, et elle a été probablement imaginée pour dissimuler la lacune. Cette partie présente quelques expressions dont j'ai rendu le sens un peu au hasard.

(4) Le mot arabe dérive du syriaque , terme qui s'applique à tout objet avec lequel on fait du bruit, en le frappant. Il se dit des cloches et des sonnettes, et c'est le sens qu'il a ici. On s'en est ensuite servi pour désigner les crécelles avec lesquelles, dans les églises, on annonce les différentes parties de l'office. En effet, dans les États musulmans, l'usage des cloches est maintenant interdit, excepté dans les montagnes du Liban, dans lesquelles la population est uniquement composée de chrétiens.

(5) On trouve un récit analogue dans la relation de Néarque, probablement à l'occasion de l'apparition de quelque baleine. Néarque rapporte que ses compagnons étant saisis de frayeur à l'aspect d'un poisson d'une grandeur monstrueuse, il les engagea à pousser tous à la fois un grand cri et à sonner des trompettes, ce qui mit le monstre en fuite. (Arrien, Historia indica, édition de Schmieder, Halle, 1798, page 164 et suiv.) Au temps de Strabon, les navigateurs avaient adopté cet usage. (Strabon, liv. XV.) Mais Philostrate, qui écrivait à la fin du IIe siècle de notre ère, fait mention, dans sa Vie d'Apollonius de Thyane, d'une coutume qui se rapproche davantage du récit de l'auteur arabe. Les navigateurs suspendaient à la proue et à la poupe du bâtiment des sonnettes qui étaient mises en mouvement par la marche du navire. (Philostrati opera, édition de Leipsick, 1709, page 139.)

(6) Les détails qu'on lit ici se retrouvent en grande partie dans le Ketab-al-adjayb, accompagnés de nouvelles circonstances. En ce qui concerne le oual, que Massoudi nomme aoual, voyez le Moroudj-al-dzeheb, tome Ier, fol. 45 verso. C'est un squale.

(7) La mer de Herkend est bornée à l'ouest par les Laquedives et les Maldives ; à l'est, par le continent de l'Inde ; au sud-est, par l'île de Ceylan et le golfe de Manar.

(8) Ptolémée (liv. VII, chap. 4) porte le nombre de ces îles à treize cent soixante et dix-huit. Comparez le passage arabe relatif aux Maldives et aux Laquedives avec le récit de Massoudi.

(9) Le Ketab-al-adjayb porte, au lieu de plante, le mot maison. Massoudi parle de morceaux d'ambre gros comme des quartiers de rocher et comme des montagnes. Ce sont des exagérations évidentes.

(10) Il s'agit ici d'ambre gris. Suivant l'opinion de Swediaur, opinion qui est maintenant généralement suivie, l'ambre gris est formé des excréments durcis des cachalots. (Voyages de Chardin, édition de M. Langlès, tome III, pages 325 et suivantes. Voyez également ci-après, page 144.)

(11) La traduction française d'Édrisi, tome Ier, page 69, porte al-kandj.

(12) Voy. à ce sujet le Discours préliminaire.

(13) Le mot arabe qui sert à désigner une île se dit aussi d'une presqu'île. Quand donc les Arabes veulent parler d'une véritable île, ils disent que c'est une île entourée par la mer.

(14) Les musulmans croient qu'Adam, après son péché, fut jeté dans l'île de Ceylan, sur la montagne qui domine l'île ; c'est de là que cette montagne a été appelée Pic d'Adam. Les musulmans y vont en pèlerinage ; suivant Ibn-Bathoutha, qui visita la montagne au XIVe siècle de notre ère, et qui a donné à ce sujet des détails curieux, ces pèlerinages commencèrent dans la première moitié du IVe siècle de l'hégire, Xe de notre ère. (Voy. la traduction anglaise de la relation d'Ibn-Bathoutha, par M. Lee, pages 41, 42 et 186 et suiv.) De leur côté, les bouddhistes de l'Inde, de la Chine et des contrées intermédiaires se rendent à cette montagne, parce que, dans leur opinion, le fondateur de leur religion y a laissé, comme marque de son séjour, la trace de son pied. (Voy. la relation d'un voyage fait par un Chinois, dans le Ve siècle de notre ère, et intitulée Foe-koue-ki, pages 332 et suiv.) Le mot rohoun est une altération du sanscrit rohana.

(15) Ce nom est écrit de diverses manières : Alrâmy, Alramny, Alrâmyn, etc.

(16) On voit ci-après, page 93, qu'il s'agit ici de parasanges carrées, ce qui fait environ vingt-neuf parasanges de long sur vingt-neuf parasanges de large.

(17) Le camphre vient surtout dans l'île de Sumatra ; le suc dont il se forme est reçu dans un vase où il prend de la consistance ; c'est alors qu'il reçoit le nom de camphre. Quand le suc est extrait de la sorte, l'arbre se sèche et meurt. (Comparez le Ketab-al-adjayb, fol. 22 ; Édrisi, tome Ier de la trad. française, page 80, et Marsden, History of Sumatra, 3e édition, pages 149 et suiv.) M. Walckenaer a fait observer que le camphre est resté inconnu aux Grecs et aux Romains, et que c'est une remarque faite par les Arabes. (Analyse des voyages de Sindebad, par M. Walckenaer, Annales des voyages, de 1832, page 16.) A l'égard de Fansour, nom du lieu d'où on tirait le camphre, ce nom varie dans les manuscrits. On trouve Fayssour, Cayssour, etc.

(18) Édrisi (tome Ier de la trad. française, pages 76 et 77) a écrit Al-beynan.

(19) La mer de Schelaheth paraît répondre au golfe formé par l'île de Ceylan et le continent indien, au nord-est de l'île. Les deux mers dont il est parlé ici sont donc le golfe de Manar et le golfe de Palk.

(20) Ce nom est écrit ailleurs Lykh-yâlous, Lenkh-yâlous, etc. Massoudi a écrit alendjemâlous.

(21) Les îles nommées encore aujourd'hui Andaman. Massoudi appelle ces îles Abrâmân.

(22) Le texte porte de plus : « Il s'agit ici des parties naturelles. » Ces mots sont en partie raturés dans le manuscrit.

(23) Il s'agit ici d'une trombe, et dans ce qui suit de quelque volcan sous-marin. Camoëns a donné une description de la trombe dans le cinquième chant de son poème. Pline le naturaliste en avait parlé sous la dénomination de columna.

(24) Dans la direction du nord-ouest.

(25) Ce poisson, suivant quelques auteurs, répond à l'espadon. Mais ce n'est pas le cas ici.

(26) Ici, dans le manuscrit original, il y a une lacune d'un ou de plusieurs feuillets.

(27) Khanfou est, à proprement parler, le nom d'un port situé sur les côtes de Chine, à l'embouchure du fleuve Tsien-thang. (Voy. le Discours préliminaire.)

(28) Les incendies sont encore très fréquents à Canton, et pour les mêmes raisons. (Voy. la Description de la Chine, par Davis, tome Ier, pages 111 et 376 ; tome II, page 87.)

(29) C'est-à-dire le khalife de Bagdad. La même expression se retrouve dans divers endroits de l'ouvrage de Hamza d'Ispahan, notamment aux pages 201 et suiv. Le mot sulthan signifie en arabe « puissance », et il fut, dans l'origine, appliqué au khalife, comme équivalent de souverain. Mais, vers le milieu du IVe siècle de l'hégire, Xe siècle de notre ère, lorsque les khalifes de Bagdad eurent été dépouillés, par des soldats heureux, de la puissance temporelle, et qu'ils furent réduits à la puissance spirituelle, le mot sulthan devint le titre exclusif de l'émir qui dominait tous les autres. (Voyez à ce sujet mes Extraits des historiens arabes des croisades, Paris, 1829, page 177.) Le mot sulthan servit même à désigner d'une manière générale l'homme investi du pouvoir civil. (Voyez le traité d'Ibn-Haucal, intitulé : Description de Palerme, traduit par M. Amari, dans le Journal asiatique, cahier de janvier 1845, pages 93, 98 et 99.)

(30) Voy. sur cet endroit, le Discours préliminaire.

(31) Mascate signifie, en arabe, « un lieu de descente ». Ce n'était d'abord qu'un mouillage ; mais, peu à peu le concours des navires lui donna de l'importance, et à la fin Sahar se trouva en partie abandonné. (Voy. le Discours préliminaire.)

(32) Koulam est la ville nommée aussi Quillon ; pour le mot malay, il entre dans la dénomination vulgaire de Malabar ou pays de Mala. Le manuscrit et le texte imprimé portent Koukam-malay ; mais Koukam est une faute de copie, et le copiste lui-même a pris la peine d'écrire en marge qu'il fallait lire Koulam. Il est surprenant que ni Renaudot, ni M. Langlès n'aient fait attention à la note marginale qui est de la même main que la relation entière. Du reste, la différence, en arabe, est légère. Édrisi a adopté la bonne leçon. (Voyez le tome Ier de la trad. française, pages 160 et 172.)

(33) Le mot arabe que je traduis par « péage », signifie proprement un lieu où l'on entretient des hommes armés.

(34) Mille dirhems faisaient à peu près mille francs de notre monnaie actuelle. Quant au dinar, il valait un peu plus de vingt francs.

(35) Voy. tome Ier page 8, et le Discours préliminaire.

(36) Le mot bâr est écrit ailleurs mâr. On le retrouve dans Malabar, etc.

(37) L'empire du Zâbebj avait pour centre les îles de Java et de Sumatra.

(38) Le pagne est une étoffe rayée avec laquelle on se couvre le milieu du corps. (Comp. la Chrestomathie arabe de M. de Sacy, tome Ier, page 195, et l'abbé Dubois, Mœurs de l'Inde, tome Ier, page 455.)

(39) Kalah-bâr me semble répondre à la partie méridionale du Coromandel. (Voy. le Discours préliminaire.)

(40) Édrisi (tome Ier, page 82) a écrit Tenoumah.

(41) Sur ces différents lieux, voyez le Discours préliminaire.

(42) Probablement Kalah-bar.

(43) Cette pierre est encore employée dans la médecine chinoise. (Voy. l'Encyclopédie japonaise, liv. LXI, fol. 30.) Cette indication m'est fournie par M. Édouard Biot.

(44) On a signalé plusieurs volcans dans les îles de la Malaisie. (Voy. les relations modernes.)

(45) On lit, dans le dictionnaire heptaglotton de Castel, que le mot kouschan se dit d'un ragoût fait en Arabie, avec du riz et du poisson, ou bien avec du gras-double.

(46) Autre espèce de concombre.

(47) C'est la liqueur nommée arack. Sur cette liqueur, qui a le goût de notre vin blanc, voy. la Description de la Chine, par Davis, tome Ier, page 308.

(48) Nabyd se dit, en arabe, des liqueurs fermentées, en général, principalement du jus de palmier. Sur ce jus, nommé, dans la presqu'île de l'Inde, toddy, et, dans les îles de la Malaisie, touah et nira, comparez l'abbé Dubois, Mœurs de l'Inde, tome Ier, page 7, et M. Dulaurier, Recueil des lois maritimes, par M. Pardessus, tome VI, page 462.

(49) Ce papier est fait avec des matières végétales. (Voy. la Description générale de la Chine, par Davis, trad. franç., tome II, page 158.)

(50) Voy. la description de la ville de Quinsaï, par Marco-Polo, description qui a été reproduite dans le Discours préliminaire.

(51) Chez les musulmans, on coupe la main droite au filou. Pour le voleur proprement dit, il perd la main droite et le pied gauche.

(52) Dans l'Inde, tout le monde, même les statues des Dieux, portent des pendants d'oreille. (Dubois, Mœurs de l'Inde, tome Ier, page 469). Quinte-Curce (liv. VIII, chap. IX) a parlé de cet usage, qui, chez les Grecs et les Romains, était réservé aux esclaves. Balhara est le titre que les écrivains arabes des premiers temps donnent au prince qui régnait dans la partie occidentale de l'Inde, aux environs du Guzarate et du golfe de Cambaye.

(53) Thatherya me paraît être une altération du mot grec statère, servant à désigner une monnaie d'argent. Les Indiens avaient des monnaies, frappées au coin du pays, comme le prouvent les médailles qu'on y découvre chaque jour. Ici il est parlé de monnaies thathériennes, frappées aux environs du Guzarate ; Ibn-Haucal, témoin oculaire, dit que ces monnaies étaient aussi en usage dans la vallée de l'Indus. (Voy. le recueil de M. Gildemeister, intitulé De rebus indicis, page 28 du texte. Voy. aussi Édrisi, tome Ier de la trad. franç. page 162.) Le mot latin denarius, appliqué surtout à une monnaie d'or, s'était également introduit dans le sanscrit, sous la forme dinara ; on le trouve avec cette acception dans l'Amara-cocha, vocabulaire qui paraît avoir été composé dans le Ve siècle de notre ère. (Notes de M. Troyer, Histoire de Cachemire, tome Ier, page 435.) Sur les monnaies d'or, voy. ci-après, page 153. Les mots denier et statère se sont sans doute introduits dans l'Inde avec les monnaies grecques et romaines, qu'on sait y avoir été un objet d'importation. (Voyez le Périple de la mer Érythrée, page 28.)

(54) Sur les principales ères des Indiens, voy. l'extrait d'Albyrouny que j'ai publié dans le Journal asiatique de septembre 1844, pages 277 et suiv. (pages 135 et suiv. du tirage à part.)

(55) Les Arabes, à l'époque dont il s'agit ici, étaient établis en grand nombre sur les côtes du golfe de Cambaye et y faisaient un riche commerce. (V. le Discours préliminaire.)

(56) On lit, page 133, que la ville de Canoge était située dans le Djorz ; or, Canoge se trouvait sur la rive occidentale du Gange, au sud-est de Dehli. Le Djorz me paraît répondre au Douab des Indiens, qui portait jadis le nom de Sorasena. (Comparez Arrien, Historia indica, chap. VIII, et les Chefs-d'œuvre du théâtre indou, trad. franç., tome Ier, page LXXVII.)

(57) Massoudi s'exprime ainsi (Moroudj-al-dzeheb, tome Ier, fol 75) :



(58) Les manuscrits de Massoudi portent Thâken et Thakân. Le même nom est écrit ailleurs Thafen, Thaben, etc. Massoudi place ce pays dans l'intérieur des terres. (V. le Discours préliminaire.)

(59) Les manuscrits de Massoudi portent Ouahman. Suivant Massoudi, cette contrée s'étendait sur la côte et dans l'intérieur des terres. Elle paraît répondre à l'ancien royaume de Visapour.

(60) Il y a là une exagération évidente ; néanmoins, le même nombre se trouve dans le Moroudj de Massoudi (tome Ier, fol. 75 verso).

(61) On lit dans le Moroudj ces mots :

Le fait rapporté ici ne paraîtra pas invraisemblable, si l'on fait attention que de tout temps, chez les Indiens, chaque caste et chaque profession a ses attributions particulières, et qu'un homme d'une caste n'empiète jamais sur les attributions d'un homme d'une autre caste ; ajoutez à cela qu'une armée indienne entraîne avec elle des ouvriers de tous les états et se suffit à elle-même. Voy. la description que Bernier a faite de l'armée mogole, sous l'empereur Aureng-zeb, époque, cependant, où les mœurs nationales s'étaient modifiées. (Voyages de Bernier, tome II, page 250.)

(62) Il est parlé de ces étoffes dans le Périple de la mer Érythrée.

(63) On lit dans le Moroudj de Massoudi (tome Ier, fol. 75 verso) : « On exporte du pays, le poil appelé samara, dont on fait les émouchoirs ou chasse-mouches ; ces émouchoirs reçoivent des manches d'ivoire et d'argent, et les serviteurs les tiennent sur la tête des princes, les jours de réception. » D'un autre côté, dans le manuscrit, le mot que j'ai traduit par « étoffes », serait susceptible d'être lu « plantes ». On sait que, dans l'Inde, la chaleur du climat a rendu nécessaire l'usage du parasol et de l'émouchoir. Le parasol porte, en sanscrit, le nom de tchatra. (V. le Harivansa, traduction de M. Langlois, tome Ier, page 109, et ci-devant, page 151.) Le parasol, ayant passé de l'Inde en Perse, y a reçu le nom de tchatra ; quant à l'émouchoir, il est nommé, en sanscrit, tchamara, mot qui a été rendu, par Massoudi, par samara. Sur le tchamara, voy. le Harivansa, tome Ier, page 307. L'émouchoir est appelé en hindostani, tchaounri et pankha. Ordinairement, le tchamara est fait avec le crin de la queue du bœuf du Tibet, appelé yak ou bos grunniens. Quelquefois, le nom s'applique à l'animal lui-même (Harivansa, tome Ier, page 359). Les émouchoirs se font aussi avec de la soie et des plumes de paon.

(64) Massoudi écrit noschan et nouschan (Moroudj, tome Ier, fol. 75, verso et 177 verso) Cette dénomination est probablement un mot indigène altéré. Albyrouny a parlé du même animal, sous la forme sanscrite ganda (Journal asiatique de septembre 1844, pages 251 et suiv. et page 109 du tirage à part), et il le distingue du kerkedenn. Il en est de même de Kazouyny, dans le Adjayb-al-makhloucat ; Kazouyny appelle cet animal sinad. La description qu'il en donne est accompagnée d'une figure. Cette description a été reproduite par Domayry, dans son Histoire des animaux.

(65) La même description, accompagnée de quelques nouvelles circonstances, se retrouve dans le Moroudj, tome Ier, fol. 76. (Voy. aussi l'extrait d'Albyrouny, Journal asiatique, à l'endroit cité, ainsi que le Ayyn-Akbery, version anglaise, Londres, 1800, in-4°, tome II, page 96.) On peut rapprocher de ces divers témoignages celui de Cosmas, recueil de Montfaucon, tome II, pages 334 et suiv.

(66) Massoudi, tome Ier, fol. 76, écrit Alkamen. Ce pays me paraît répondre au Myssore.

(67) Massoudi a écrit Firendj. C'est, ce me semble, la côte de Coromandel. Voy. le Discours préliminaire.

(68) Sur les côtes de l'empire birman. Édrisi fait de ce pays une île, parce qu'en arabe le même mot se dit d'une île et d'une presqu'île. (Voy. le tome Ier de la trad. franç., page 88.)

(69) Le musc du Tonquin est encore un des plus estimés.

(70) Il s'agit probablement ici de la Cochinchine. Massoudi a écrit Maber, et Édrisi Mayed. Celui-ci fait aussi de ce pays une île. (Tome Ier de la trad. franç., page 89.)

(71) Notice sur la Cochinchine, par le père Gaubil ; Histoire générale de la Chine, par le père Mailla, tome XII, page 10.

(72) La nuit est divisée par les Chinois en cinq veilles, et chacune d'elles est annoncée au son du tambour ou d'une cloche. Le djadem servait également à annoncer les incendies, si fréquents dans la Chine. Voy. la description de la ville de Quinsaï, par Marco-Polo, description qui a été rapportée dans le Discours préliminaire. L'auteur arabe dit que le son du djadem et du tambour était une manière de rendre hommage au souverain ; cet usage existait dans les pays musulmans, sous le nom de nouba. Du reste, l'abbé Renaudot fait remarquer, dans ses notes (page 188) que les honneurs du djadem et du tambour ont été partagés par les gouverneurs de provinces et les magistrats. Quant aux mots arabes que j'ai traduits par : « les Chinois ont des signes et des poids pour connaître les heures », ils sont ainsi rendus par Renaudot, page 25 : « ils ont aussi des cadrans et des horloges à poids ». L'interprétation donnée par Renaudot est peut-être la véritable. D'après ce que m'apprend M. Édouard Biot, le caractère chinois qui désigne le gnomon, piao, se dit proprement d'un signal. Les Chinois avaient, plusieurs siècles avant notre ère, des horloges d'eau ou clepsydres, ainsi que des gnomons ; le gnomon est indiqué avec son cadran dans le Tcheou-li, article Ta-sse-tou. Pour l'horloge d'eau, elle est indiquée dans le même recueil, article kié-hou-chi.

(73) Le texte porte avec des folous. Le mot folous est une altération du mot grec obole.

(74) Voy. Édrisi, tome Ier de la trad. franç., page 68, et ci-après, page 142.

(75) Il s'agit ici de la porcelaine. Voy. aussi Édrisi, tome Ier de la trad. franç., pages 193 et 194. M. Alexandre Brongniart a consacré aux origines de la porcelaine une section du grand ouvrage qu'il vient de publier sous le titre de Traité des arts céramiques, tome II, page 473 et suiv. On trouve dans la relation du célèbre voyageur arabe, Ibn-Bathoutha, qui était né à Tanger, sur les bords de l'océan Atlantique, et qui pénétra en Chine vers l'année 1345 de notre ère, deux passages relatifs à la porcelaine ; dans ces passages, Ibn-Bathoutha paraît faire entrer, dans la cuisson de cette précieuse poterie, le charbon de terre, qui était dès lors employé en Chine comme moyen de chauffage, et dont Marco-Polo a fait mention. Les expressions dont se sert Ibn-Bathoutha ne sont pas très précises ; peut-être même elles manquent d'exactitude. Voici les deux passages de la relation arabe :

« La poterie chinoise ne se fabrique que dans la ville de Zeytoun et à Synkilan. On emploie pour cela une terre provenant de certaines montagnes du pays ; cette terre brûle comme le charbon, et on y ajoute des pierres particulières à la contrée ; on fait brûler les pierres pendant trois jours ; ensuite on y verse de l'eau, et le tout redevient terre. Après cela on couvre cette terre. La meilleure poterie est celle qui est restée couverte pendant un mois complet ; on ne dépasse pas ce terme. La moins bonne est celle qui n'est restée couverte que pendant dix jours ; celle-ci se vend, dans le pays, à un aussi bas prix que la poterie chez nous, et même à un prix plus bas. La poterie chinoise est exportée dans l'Inde et dans tous les pays, jusque dans nos contrées du Magreb ; c'est la plus belle espèce de poterie.

Voy. les manuscrits du supplément arabe de la Bibl. roy. n° 670, fol. 131 verso. Ibn-Bathoutha s'exprime ainsi au folio suivant :

« Les habitants de la Chine et du Khatay n'ont pas d'autre charbon qu'une terre qui est particulière à leur pays. Cette terre est ferme, comme la terre glaise chez nous. On met le feu à cette terre, et elle brûle comme du charbon ; elle donne même plus de chaleur que le charbon. Quand elle est convertie en cendres, on la délaye dans l'eau, puis on la fait sécher et on la fait servir une seconde fois. On continue la même opération jusqu'à ce qu'elle soit entièrement dissoute. C'est la terre qu'on emploie pour faire les vases de poterie chinoise ; seulement l'on y ajoute certaines pierres.

Ces deux passages de la relation d'Ibn-Bathoutha sont indiqués dans l'abrégé publié en anglais par M. Lee, page 208. Il est parlé d'une poterie particulière qui se fabriquait à Koulam, dans le midi de l'Inde, dans la relation de Misar (édition de M. de Schlœzer, page 24). À l'égard du témoignage de Marco-Polo, relativement au charbon de terre, voy. l'édition de la Société de géographie, page 115 et 390. Marco-Polo a aussi parlé de Zeytoun, qui n'est pas mentionné dans la présente relation. Zeytoun est pour Tseu-thoung ; c'est le nom d'un port de mer de la province de Fou-kian, dont la dénomination actuelle est Thsiuan-tchou-fou. (Mémoires relatifs à l'Asie, par Klaproth, tome II, pages 208 et suiv., et Journal asiatique d'avril 1833, page 342.) Enfin la ville de Syn-kilan est probablement le port de Canton. (Journal asiatique du mois de mai 1833, page 458.)

(76) C'est-à-dire, garanties contre tout accident. Le dork, d'après le traité arabe intitulé Taryfat, indique une valeur que le vendeur dépose entre le mains de l'acheteur, comme garantie, de la part du vendeur, de la bonne qualité de l'objet vendu, l'acheteur prenant à sa charge certains accidents qui peuvent survenir. (Voyez le Taryfat, édit. de Constantinople, pages 61 et 82.)

(77) Jusqu'à la fin de la mousson.

(78) Confucius conseille de dépenser à l'enterrement de ses parents jusqu'à la moitié de ses biens. L'empereur actuel, plus sage que Confucius, a mis des bornes à ces sacrifices inutiles. Souvent un fils, pour honorer son père, avait ruiné sa famille. (Timkowski, Voyage à Peking, trad. franç., tome II, page 55.)

(79) Ce qui est dit des aliments laissés auprès des morts est modifié ci-devant, page 62. Il est probable que le marchand Soleyman a fait quelque confusion avec l'usage chinois d'après lequel, dans les cérémonies faites en l'honneur des morts, on présentait autrefois des aliments à un enfant, qui représentait le premier chef de la famille, et l'on augurait, d'après les paroles qui lui échappaient, si les offrandes étaient agréables aux ancêtres. Cette cérémonie est indiquée dans le Chi-king. (Voy. les Recherches de M. Édouard Biot sur les mœurs des anciens Chinois, Journal asiatique de novembre 1843, page 351.)

(80) Voy. ci-devant, page 74.

(81) Toussendj paraît répondre à Cheou-tching, Thoucam à Tchou-kouan, titre général des chefs de l'administration supérieure, et Dyfou à Tchi-fou, titre donné aux gouverneurs de villes du premier ordre. Klaproth a publié un tableau des titres accordés aux villes et aux fonctionnaires de la Chine. (Journal Asiatique d'avril 1833, pages 350 et suiv.)

(82) Il n'y a pas, en Chine, d'avocat qui plaide ; les déclarations des parties sont écrites, en forme de mémoire, par des écrivains autorisés, qui peuvent aussi les lire devant la cour. Ces écrivains achètent leur titre, et s'indemnisent par les prélèvements ou honoraires qu'ils reçoivent des parties. (V. le Chinese Repository, tome IV, page 335.)

(83) On se sert, en Chine, pour cet objet, de bambous dont la forme et la grandeur sont déterminées d'avance. (Code pénal de la Chine, traduit du chinois en anglais par M. Staunton, et de l'anglais en français par M. Renouard de Sainte-Croix, tome Ier, page 16 et 19.)

(84) Voy. ci-devant, page 46. Cet usage a varié suivant les temps.

(85) Par vivres, il faut entendre le riz, le blé, le millet et les autres grains. Il existe un mémoire du père Cibot sur les greniers publics en Chine. (Description de la Chine, par Grosier, tome dernier.)

(86) Voy., dans le Discours préliminaire, ce que Marco-Polo dit sur le montant des impôts prélevés sur la ville de Quinsaï, qui ici répond à la dénomination de Khanfou.

(87) Sur le mot , voy. le Dictionnaire des matières médicales, par Ibn-Beythar.

(88) Les auteurs chinois font mention de l'impôt sur le sel et sur le thé, à l'époque dont il s'agit ici. (Voyez Klaproth, Notice sur l'encyclopédie de Ma-touan-lin, Journal asiatique de juillet 1832, page 20.)

(89) Comparez ce passage avec ce que dit Édrisi, tome Ier de la trad. franç. page 100. Autrefois, près du palais de l'empereur, à Péking, il y avait un salon avec un tambour ; des mandarins et des soldats y montaient la garde jour et nuit. Quand quelqu'un ne pouvait obtenir justice, ou qu'il était vexé, il allait frapper le tambour ; à ce bruit, les mandarins étaient obligés d'accourir, d'examiner les griefs du plaignant, et de lui procurer satisfaction. Aujourd'hui cet usage est aboli. (Timkowski, Voyage à Peking, tome II, page 160. Voy. aussi les notes de Renaudot, page 190.)

(90) Les passe-ports et les billets de passe sont mentionnés dans le Tcheou-li, par conséquent plusieurs siècles avant notre ère. On peut consulter sur ce qui se pratique maintenant le Code pénal de la Chine, trad. fr., tome Ier, pages 377 et suiv.

(91) Le texte arabe est obscur. Dans les anciens temps, suivant le Tcheou-li, les conventions privées des Chinois étaient faites en double. On séparait en deux la tablette ou, plus tard, le papier qui portait les deux doubles, et on devait les représenter soit à l'échéance du prêt, ou bien en cas de difficulté sur la convention. (Voy. le mémoire de M. Édouard Biot sur le système monétaire des Chinois, Journal asiatique de mai 1837, page 434. Voy. aussi le Livre de la voie et de la vertu, par Lao-tseu, traduction de M. Stanislas Julien, page 290.)

(92) Le fakkoudj correspond aux dénominations chinoises kouang et min, et équivaut à mille pièces de cuivre enfilées ensemble. L'enfilade est estimée ici le dixième de dinar ou pièce d'or arabe, et, comme le dinar valait, au Xe siècle, vingt francs à peu près, il en résulte que l'enfilade valait deux francs, et que la pièce de cuivre n'était estimée que le cinquième d'un de nos centimes. (Voy. ci-après, page 72.) Il fallait que l'or et l'argent fussent alors bien rares en Chine, pour que le cuivre conservât si peu de valeur dans le change.

(93) C'est le même mot qui est écrit par quelques auteurs arabes fagfour ; sa forme est altérée. On peut consulter sur ce mot le supplément du père Visdelou, à la Bibliothèque orientale de d'Herbelot, au commencement. De son côté, Massoudi, Moroudj, tome Ier, fol. 59, verso, dit que bagbour est le titre par lequel le peuple chinois désigne l'empereur ; mais que, lorsqu'on s'adresse au prince même, on le nomme thamgama. Pour la dénomination elle-même, elle existe en Chine depuis la plus haute antiquité ; c'est le titre thian-tseu ou fils du ciel, donné aux empereurs. (Voy. le Journ. asiat. de juin 1830, page 409, mémoire de M. Kurz.)

(94) Voy. ci-devant, page 39.

(95) Cet usage s'est maintenu jusqu'à nos jours, et tient lieu de ce que nous appelons l'état civil. (Code pénal de la Chine, trad. franç., tome Ier, pages 139 et suiv.) Marco-Polo a parlé de cet usage, mais considéré sous un point de vue astrologique (édition de la Société de géographie, page 171).

(96) L'âge où les hommes en Chine ont été soumis à la capitation a varié ; mais le Gouvernement s'est toujours montré plein d'égards pour les vieillards.

(97) La dynastie Thang, qui régna entre les années 620 et 906 de l'ère chrétienne, donna une grande impulsion à l'enseignement. Les maîtres des écoles reçurent à certaines époques une somme d'argent des étudiants ; à d'autres époques des allocations leur furent affectées.

(98) Les femmes, chez les Arabes, se coupent la chevelure. Sur cet usage, voy. mon ouvrage sur les monuments arabes, persans et turcs, du cabinet de M. le duc de Blacas, tome II, page 328.

(99) Le manna est un poids indien, qui varie suivant les provinces, depuis deux livres jusqu'au-dessus de quarante.

(100) Sur les épreuves judiciaires dans l'Inde, comparez le Code de Manou, livre VIII, n° 114, et les Mœurs de peuples de l'Inde, par M. l'abbé Dubois, tome II, pages 465 et 546. Voy. aussi l'ouvrage d'Albyrouny, manuscrits arabes de la Bibl. roy. fonds Ducaurroy, n° 22, fol. 143 ; et les Recherches asiatiques, trad. franç., tome Ier, pages 471 et suiv.

(101) Ce récit est reproduit par Massoudi, qui dit avoir été lui-même témoin du fait. (Voy. le Moroudj-al-dzeheb, tome Ier, fol. 32.) Édrisi a étendu cet usage à toute l'Inde. (Voy. le tome Ier de la trad. franç., page 178.)

(102) Voy. tome Ier, page 5.

(103) Traité d'Albyrouny déjà cité, fol. 142, verso.

(104) Il s'agit des castes des brahmes, des kschatrias, etc.

(105) À l'époque où écrivait l'auteur de la relation, tous les princes musulmans, à la différence de ce qui avait lieu dans l'Inde, reconnaissaient l'autorité spirituelle et la prééminence temporelle du khalife de Bagdad.

(106) Par vin, il faut entendre toute espèce de liqueur fermentée. Les Chinois boivent principalement de l'eau-de-vie faite avec du riz ; c'est ce qu'on appelle en Europe arak ; il y a d'ailleurs des vignes en Chine, comme l'auteur le dit ci-dessous, page 57. Sur l'usage du vin en Chine, voy. un mémoire de Klaproth (Journal asiatique de février 1828, page 99 et 100.)

(107) Voy. ci-devant, page 97, ainsi que le Code de Manou, livre XI, n° 90 et suiv.

(108) Le pays du poivre est la côte du Malabar.

(109) Code de Manou, livre VII, n° 5, 201 et suiv.

(110) Marco-Polo parle d'une tribu tartare chez laquelle le même usage existait de son temps. Voy. l'édition de la Société de géographie, page 78.

(111) Chez les musulmans on coupe simplement la main aux filous ; encore se borne-t-on ordinairement à la bastonnade. Tome Ier, page 24.

(112) En ce qui concerne les courtisanes des temples de l'Inde, voy. Édrisi, tome I de la trad. franç., page 81, et ci-devant, page 134.

(113) Le mot firasch est arabe et est ainsi défini dans le Taryfat : état d'une femme qu'un homme s'est réservée pour lui seul, avec l'idée d'en avoir des enfants. Ainsi, une femme mariée est en état de firasch, aussi bien que l'esclave qui est grosse et dont l'enfant est reconnu d'avance par le maître. En pareil cas, chez les musulmans, une femme ne peut pas se marier à un autre homme, jusqu'à l'expiration de sa grossesse. On voit qu'en Chine et dans l'Inde il en était autrement. Chez les Romains, Auguste, comme on sait, épousa Livie, déjà grosse d'un premier mari.

(114) Il s'agit évidement ici des bouddhistes qui, depuis longtemps, étaient fort nombreux en Chine, et qu'on nomme les adorateurs de Fo. Les disciples de Confucius et les tao-sse ne sont pas idolâtres.

(114 bis) Le sens est peut-être : Dans l'Inde, quand quelqu'un perd une personne de sa famille, il se rase la tête et la barbe. Voy. le Lévitique, ch. X, vers. 6.

(115) Statues des divinités, en général. Sur ce mot, voy. ce que j'ai dit dans le Journal asiatique de février 1845, page 167.

(116) Chez les musulmans comme chez les juifs, on égorge l'animal et l'on commence par en tirer tout le sang.

(117) Dubois, Mœurs des peuples de l'Inde, tome Ier, pages 253, 269, 330 et suiv.

(118) L'usage du cure-dent est pour les musulmans un moyen de propreté ; c'est même un devoir religieux. Quelques auteurs font remonter cet usage chez les Arabes, jusqu'avant Mahomet. Voyez Pococke, Specimen historiæ Arabum, page 303, et le Tableau de l'empire ottoman, de Mouradjea d'Ohsson, tome II, page 16. Le même usage existe chez les Indiens. Voy. l'ouvrage de M. l'abbé Dubois déjà cité, tome I, page 334. Il est fait mention de cette coutume, par rapport aux Indiens, dans la relation de Hiouan-thsang, prêtre bouddhiste chinois, qui visita l'Inde, entre les années 619 et 645 de J.-C., et qui publia sa relation, à son retour en Chine, par ordre de l'empereur. M. Pauthier en a inséré de longs extraits dans le Journal asiatique de l'année 1839. On peut voir, en ce qui concerné le cure-dent, le cahier de décembre 1839, page 462, avec les observations de M. Stanislas Julien, cahier de mai 1841, page 439. L'usage du cure-dent, chez les Indiens, tient à la même cause que chez les Arabes ; c'est que les Indiens, ainsi que le fait remarquer le voyageur chinois, apprêtaient leurs mets avec divers assaisonnements, et les prenaient avec les doigts, ne faisant usage ni de cuillères, ni de bâtonnets ; ce qui les obligeait de recourir à des moyens de propreté particuliers. Les extraits chinois publiés par M. Pauthier renferment plusieurs autres remarques qui se rapportent à ce qui est dit dans la présente relation. Il est singulier du reste que ni le marchand Soleyman, ni Abou-Zeyd, qui reviennent plusieurs fois sur l'usage du cure-dent, n'aient dit un mot d'une autre coutume qui existait depuis longtemps dans l'Inde ; c'est l'usage du bétel mêlé à quelque substance échauffante, et propre à contrebalancer l'action énervante du climat. Voici ce que dit Massoudi (tome Ier du Moroudj, fol. 91) :

« Les Indiens ont coutume de mâcher la feuille du bétel, mêlée avec de la chaux et humectée avec la noix d'arec ; cet usage s'est introduit à la Mekke et dans d'autres villes du Hedjaz et du Yémen ; on mâche cette composition en guise d'argile ; elle se trouve chez les droguistes, et elle sert pour les tumeurs, etc. Cette composition resserre les gencives, raffermit les dents, purifie et embaume l'haleine, corrige une excessive humidité, ramène l'appétit, excite à l'amour, imprime aux dents la couleur de la grenade, inspire la gaieté, communique un mouvement à l'âme et fortifie le corps. Les Indiens, grands et petits, ont horreur des dents blanches, et la personne qui ne fait pas usage du bétel est repoussée par tout le monde.

Le bétel est appelé par les Arabes tanboul ; c'est le sanscrit tamboula.

(119) Le bouddhisme.

(120) Il semblerait, d'après ce passage, qu'au temps où voyageait le marchand Soleyman, la religion bouddhique dominait en Chine et le brahmanisme dans l'Inde.

(121) M. Letronne a émis l'opinion que la division de l'écliptique en douze signes, admise dans l'Inde, a été empruntée par les Indiens aux Grecs, qui eux-mêmes la tenaient des Chaldéens. J'espère montrer, dans un mémoire spécial, qu'en général les connaissances astronomiques des Indiens dérivent de la Grèce. Quant à la division par mansions de l'espace que la lune parcourt en douze mois, division qui est admise par les Indiens, et qui ne se retrouve pas dans l'Almageste de Ptolémée, M. Biot place la source de ces notions dans la Chine (Journal des Savants, année 1839, page 721 ; année 1840, page 27, 75, 142, 227 et 266 ; année 1845, page 39). Néanmoins, il paraît qu'au VIe siècle de notre ère et dans les siècles qui suivirent immédiatement, les astronomes indiens avaient acquis la prééminence dans l'Asie orientale. Un bonze chinois, appelé Y-hang, ayant à exécuter, vers l'an 720 de J.-C. de grands travaux de géographie mathématique, eut recours à des traités occidentaux qui ne peuvent être que des traités indiens, et ses compatriotes l'accusèrent de s'être borné en général à les copier. (Mémoires sur l'astronomie chinoise, du père Gaubil, publiés par le père Souciet, tome II, page 74 ; et Histoire des empereurs chinois de la dynastie Thang, par le père Gaubil, Mémoires sur la Chine, tome XVI, page 16, et page 148 du Traité de la Chronologie chinoise.)

(122) En général, les chevaux qui se trouvent dans l'Inde sont venus des pays situés au nord-ouest, ou bien de l'Arabie.

(123) Davis, Description de la Chine, tome II, page 239.

(124) Il s'agit ici d'une guerre avec quelque peuple étranger à la presqu'île et professant une autre religion, ou bien de quelque guerre intestine entre les brahmanistes et les bouddhistes.

(125) On a vu ci-devant, page 25, le contraire de cela, du moins en ce qui concerne le Balhara. Probablement le Balhara donnait une solde, tandis que, chez les autres princes, les troupes étaient entretenues au moyen de bénéfices militaires.

(126) Espèce de manteau usité surtout en Perse, et qui couvre presque tout le corps. (Voy. le Voyage de Chardin, édition de M. Langlès, tome IV, page 2.)

(127) Par pagnes, l'auteur désigne sans doute un vêtement qui couvre le milieu du corps, et un second vêtement qui se met sur les épaules. On a vu ci-devant, page 17, que les Indiens ne portent qu'un pagne. Le second passage s'applique probablement aux Indiens du Nord et le premier aux Indiens du Midi, où la température est plus chaude. (Voy. les Mœurs de l'Inde, par l'abbé Dubois, tome Ier, pages 455 et 469.)

(128) Voy. sur ce passage le Discours préliminaire.

(129) Il s'agit probablement ici du Japon, alors en rapport de commerce avec la Chine. Dans le texte imprimé, on lit de plus que le premier livre a été lu par un musulman appelé Mohammed, l'an 1011 (de l'hégire, 1602 de J.-C.). Ces paroles se trouvent en effet dans le manuscrit, au bas de la page ; mais elles sont d'une autre main que le corps de la relation ; c'est mal à propos que M. Langlès les a reproduites, et même insérées au milieu du texte.

(130) Tome Ier, page 36.

(131) En chinois, Hoang-chao.

(132) Massoudi, Moroudj, tome Ier, fol. 59, place Khanfou à six ou sept journées de la mer. Évidemment il ne s'agit pas ici du port de Khanfou, qui était situé à l'embouchure du Tsien-Thang-Kiang, mais de Hang-tcheou-fou, capitale de la province, à quelques journées dans l'intérieur des terres. Aboulféda (Géographie, pages 363 et 364 du texte) ne fait qu'une ville de Khanfou et de Hang-tcheou-fou, qu'il nomme Khinsâ. Il est probable que déjà, du temps d'Aboulféda, Khanfou avait perdu une partie de son importance.

(133) Cette ville était nommée par les Chinois Tchang-ngan ; les Arabes et les écrivains syriens de l'époque l'appellent Khomdan. Son nom actuel est Si-ngan-fou. Sa situation est sur un des affluents du fleuve Jaune à plus de deux cents lieues de la mer, et elle est maintenant la capitale de la province Chen-si.

(134) La même ville est nommée ci-dessous, page 114, Madou, et c'est probablement la véritable leçon. La dénomination de Madou ou Amdou est encore usitée au Thibet. (Voy. la relation du père Orazio della Penna, Journal asiatique de septembre 1834, pages 193 et suiv.)

(135) Voy. le Discours préliminaire.

(136) Suivant Massoudi, l'armée des Turks se montait à quatre cent mille hommes, tant à pied qu'à cheval.

(137) Aboulféda a parlé de ces événements dans sa Chronique (tome II, page 250) ; et Reiske, dans ses notes sur le passage d'Aboulféda, a rapporté un extrait du Moroudj de Massoudi.

(138) Au lieu de généraux, le texte porte molouk althaouayf ou chefs de bande. Il s'agit ici des principautés qui, après la mort d'Alexandre et lorsque la puissance des princes séleucides fut déchue, se formèrent en Mésopotamie, en Chaldée et dans la Perse. Ces principautés se maintinrent sous la domination des Parthes et ne furent tout à fait éteintes que sous les rois sassanides. Les écrivains arabes supposent que ce fut Alexandre lui-même qui créa ces principautés. Hamza d'Ispahan (pages 41 et suiv.) porte le nombre de ces espèces de fiefs à quatre-vingt-dix. Suivant Hamza, toutes ces principautés furent subjuguées par Ardechir, fils de Babek, fondateur de la dynastie des Sassanides.

(139) Il s'agit probablement ici d'un fait exceptionnel et qui tenait à l'état d'anarchie où se trouvait l'empire. Peut-être Abou-Zeyd, qui n'avait pas lui-même visité la Chine, a mal interprété le récit qu'on lui a fait.

(140) On lit dans le texte ; c'est le pluriel du mot malay nakhodah, signifiant patron de navire, et dérivé du persan. Massoudi, dans son Moroudj, quand il parle de la navigation de la mer Méditerranée, se sert du mot grec nauty, le nauta des Romains.

(141) Le mitscal d'or, d'après ce qu'on a vu tome Ier, page 43, correspondrait à deux de nos francs, ce qui ferait une somme de vingt francs.

(142) Du mot grec obole.

(143) Le plomb et l'étain.

(144) La description qu'on vient de lire est très exacte. (Voy. la Chine, du père Duhalde, tome II, page 168, édit. in-fol. et le Mémoire de M. Édouard Biot, sur le système monétaire de la Chine, Journ. asiat. de 1837, mois de mai, août, septembre et novembre.)

(145) Il ne faut pas confondre cette pâte avec la laque de Chine. (Voy. la Description de la Chine, par Davis, tome II, page 251.)

(146) M. Davis a donné quelques détails sur les maisons chinoises, dans sa Description de la Chine, tome Ier, pages 331 et suiv.

(147) Ci-devant, page 37.

(148) Les eunuques exerçaient une grande influence en Chine, à l'époque dont il s'agit ici. Plusieurs fois ils firent et défirent les souverains. Les princes de la dynastie Thang les avaient mis en évidence, de peur de voir revenir les principautés feudataires qui, dans les anciens temps, avaient fait le malheur de l'empire. Renaudot fait remarquer, dans ses notes (p. 189), que les relations modernes font mention d'eunuques revêtus des charges les plus importantes, particulièrement des charges de finance. Il cite, à cette occasion, le témoignage du père Trigaut, qui dit qu'un très grand nombre d'eunuques étaient mis dans cet état par leurs propres parents. Le père Trigaut ajoute : « Quos castrant quam plurimi, ut inter regios famulos annumerari queant ; nam præter hos, alii regi non famulantur, nec a consiliis sunt, nec cum eo colloquuntur ; quinimo tota fere regni administratio in semivirorum manibus versatur. »

(149) Voy. sur ce mot, ci-devant page 60.

(150) Ce passage rappelle ces paroles de Pline le naturaliste (liv. VI, ch. xx) : « Primi sunt hominum, qui noscantur, Seres lanicio silvarum nobiles, perfusam aqua depectentes frondium canitiem ; unde geminus feminis nostris labor redordiendi fila, rursumque texendi. Tam multiplici opere, tam longinquo orbe petitur, ut in publico matrona transluceat. »

(151) Habbar, fils d'Al-asouad, était un des idolâtres de la Mekke, qui montrèrent le plus d'opposition aux prédications de Mahomet. Une branche de la famille de Habbar s'établit à Bassora ; une autre branche fonda une principauté sur les bords de l'Indus. (Voy. le Discours préliminaire.)

(152) Le récit qui suit se retrouve dans le Moroudj de Massoudi, tome Ier, fol. 61. Massoudi commence ainsi : « lorsque le prince des Zendj fit à Bassora ce qui est bien connu ». Il s'agit ici des dévastations commises par les Zendj, dans l'ancienne Chaldée. (Voy. la Chronique d'Aboulféda, tome II, page 238.) Cet événement eut lieu l'an 257 (870 ou 871 de J.-C.), quelques années seulement avant les désordres qui bouleversèrent la Chine, et mirent en danger l'existence du khalifat.

(153) Massoudi nous apprend, fol. 62 v., que ceci se passait l'an 303 (915 de J.-C.).

(154) On n'en a compté que quatre ; tome Ier, page 24.

(155) Les anciens rois de Perse s'étaient arrogé le titre de schahinschah ou roi des rois ; ce titre était rendu, par les Grecs, Βασιλεύς Βασιλέων.

(156) Il s'agit ici du roi des Tagazgaz. (Voy. Massoudi, Moroudj, tome Ier, 56, 59 verso et 70.)

(157) Dans le titre donné à l'empereur de la Chine, le mot homme désigne l'espèce et répond au homo des Latins ; ici il s'agit uniquement du sexe. C'est le vir des Latins.

(158) C'est ainsi que le déluge qui, suivant les écrivains chinois, eut lieu au temps de Yao, plus de deux mille ans avant notre ère, paraît avoir été particulier à la Chine.

(159) Tel est, en effet, le mouvement que font les musulmans, quand ils s'acquittent de leur profession de foi.

(160) Évidemment, la boîte renfermait une collection de portraits des divinités et des principaux personnages du judaïsme, du christianisme, du mahométisme, du bouddhisme et des autres religions de l'Inde et de la Chine. L'esprit général des princes de la dynastie Thang était la tolérance, et même peut-être l'indifférence. Tantôt le prince paraissait pencher pour le christianisme, tantôt pour le culte de Fo ou Bouddha, tantôt pour les doctrines des tao-sse ou disciples de Lao-tseu.

(161) Les khalifes de Bagdad appartenaient à la tribu des Corayschites.

(162) En Chine, les chevaux sont d'une petite espèce et fort rares. Les Chinois trouvent leur entretien trop cher. (Davis, Description de la Chine, tome II, page 237.)

(163) La ville de Peking est aussi divisée en deux parties séparées par une rue. Mais à présent il est permis à certains marchands d'habiter dans le quartier de l'empereur. Il existe une description de Péking, par le père Gaubil. Cette description a été reproduite avec quelques modifications par M. Timkowski, Voyage à Péking (trad. franç., tome II, page 124 et suiv.).

(164) Massoudi, qui rapporte le même fait, dit qu'il eut lieu aux environs de l'île de Crète. Les débris du navire étaient en bois de sadj ou de teck, et les pièces en étaient cousues ensemble avec des fibres de cocotier. Massoudi prétend que, si dans les mers de l'Inde on emploie le fil à la place des clous, c'est parce que dans ces climats brûlants le fer est dissous par l'eau de la mer. Il est certain que dans les mers de l'Inde, le fer s'use beaucoup plus promptement que dans les mers du Nord. C'est ce qui fait que maintenant les Anglais, dans l'Inde, emploient le cuivre de préférence au fer. Ajoutez à cela que le fer a toujours été rare en Asie. D'un autre côté, Massoudi paraît croire que, dans cette occasion, les débris du navire firent le tour de l'Asie et de l'Europe, et qu'ils entrèrent dans la mer Méditerranée par le détroit de Gibraltar. (Voy. le Moroudj-al-dzeheb, tome Ier, fol. 71 verso.) J'ai exposé, dans ma préface de la géographie d'Aboulféda, les différentes opinions des écrivains arabes sur la prétendue communication de la mer Noire et de la mer Caspienne, soit entre elles, soit avec les mers du Nord,.

(165) Voy. l'Alcoran, sourate XXVII, v. 61.

(166) Massoudi rapporte le même fait à la suite du premier, et il explique de même la manière dont cet ambre passa de la mer de l'Inde dans la mer Méditerranée.

(178) Ibid., page 40.

(179) Il est parlé de ces officiers dans le Chi-king, part. III, ch. I, ode 4.

(180) Les anciens Persans avaient la prétention d'avoir poussé leurs conquêtes jusqu'aux rives de la mer Orientale, et les récits qu'ils faisaient à cet égard se retrouvent dans le Schah-nameh de Ferdoussi. Lisez, dans ce poème, certains épisodes du règne de Kai-Kaous, notamment ce qui est dit dans l'édition de M. Mohl, tome II, page 463. Massoudi, longtemps avant Ferdoussi, avait parlé de ces épisodes. Voy. le Moroudj, fol. 103, verso. Mais ces récits sont romanesques.

(181) Les peuples du Tibet, dont parle Abou-Zeyd, sont appelés par les écrivains chinois Thou-fan ; à cette époque, ils exerçaient un grand ascendant sur la Chine et la Tartarie. (Voy. les Tableaux historiques de l'Asie, par Klaproth, pages 211 et suiv. et mon Discours préliminaire.)

(182) Le texte porte : « des épis à parfum ».

(183) Massoudi, qui rapporte les mêmes détails, parle d'un vase de verre. Voy. au fol. 69 du tome Ier du Moroudj. Le récit de Massoudi a été suivi en partie par Cazouyny. (Voy. Chrest. arabe, de M. de Sacy, tome III, page 410.)

(184) Comparez la description de l'animal appelé musc par Buffon, et celle du moschus par Cuvier, Règne animal, édition de 1839, tome Ier, page 259. La description d'Abou-Zeyd n'est pas entièrement exacte, vu que sans doute il n'avait jamais vu l'animal.

(185) En Chine, la poste ne sert qu'aux gens du Gouvernement.

(186) Les musulmans s'accroupissent, à l'exemple de Mahomet. (Mishkat-almassabih, tome Ier, page 86, et Chardin, tome IV, page 2.) C'est de peur qu'en faisant autrement il ne tombe quelque goutte sur les vêtements, et qu'on ne soit souillé. L'usage des musulmans est suivi par les idolâtres de l'Inde. (Voyez l'ouvrage de M. l'abbé Dubois, tome Ier, page 330.)

(187) Hippocrate, dans son livre des airs, des eaux et des lieux, dit que les peuples voisins de la mer Noire avaient adopté l'usage de comprimer le crâne de leurs enfants, et que les habitants de ces contrées étaient macrocéphales, c'est-à-dire qu'ils avaient la tête allongée. Le passage d'Abou-Zeyd montre qu'il en était de même chez les Arabes de son temps. Cet usage existe encore parmi les tribus arabes de l'Afrique ; c'est la mère de l'enfant qui est ordinairement chargée de cette opération ; elle se fait dans la première année de la vie, et, pour que l'enfant ne souffre pas, on la pratique graduellement, comme une espèce de massage, c'est-à-dire en frottant avec la paume de la main, et de bas en haut, les parties latérales de la tête. Les familles nobles attachent une grande importance à cette coutume ; d'abord par coquetterie, ensuite parce qu'on est jaloux de conserver sur la tête de l'enfant le type primitif, afin qu'il ne soit pas possible de le confondre avec la race berbère, généralement méprisée par les Arabes. (Voyage médical dans l'Afrique septentrionale, par M. le docteur Furnari, Paris, 1845, pages 23 et suiv.)

(188) Les Chinois, au XVIIe siècle, lors de l'invasion des Mantchoux, furent obligés de raser l'épaisse chevelure qui couvrait leur tête, pour se conformer à la coutume des Tartares, qui ne conservent qu'une longue tresse en forme de queue. Plusieurs Chinois aimèrent mieux s'expatrier que de renoncer à l'antique usage de la nation. (Davis, Description de la Chine, tome Ier, pages 52 et 185.) Les Coréens seuls ont conservé l'ancienne coutume.

(189) La population native de la Chine est désignée par les Chinois eux-mêmes sous le nom de Pe-sing ou « cent familles », vraisemblablement d'après une tradition qui fixait le nombre de celles qui avaient formé le premier noyau de la nation. Il n'y a même encore à présent que quatre ou cinq cents noms de famille répandus dans tout l'empire et les personnes qui portent un même nom de famille sont si bien considérées comme issues d'une même souche, que la loi s'oppose à toute alliance entre elles. Mais la civilisation a effacé toutes les autres nuances qui pouvaient distinguer ces anciennes tribus. (Comparez les Nouveaux mélanges asiatiques d'Abel-Rémusat, tome Ier, page 33, le Code pénal de la Chine, trad. franç., tome Ier, pages 191 et suiv., sections CVII et suiv., et le Journal asiatique de décembre 1830, page 413.)

(190) Massoudi a rapporté le même fait avec quelques autres circonstances (tome Ier du Moroudj, fol. 58 v.) Le passage a été reproduit par Reiske, dans ses notes sur la Chronique d'Aboulféda (tome II, page 713) ; mais Reiske a fait dire à Massoudi le contraire de ce qu'il avait dit.

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Remarques sur quelques passages de cet ouvrage

relatifs à l'histoire naturelle 1

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MAMMIFÈRES

Pachydermes. —


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